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MORALE. MÉTHODE SCOLASTIQUK’2416

pie désir contenant implicitement ces actes surnaturels. Car, avant la production de ces actes surnaturels, il n’y a dans l’âme aucune disposition surnaturelle dans laquelle ils puissent être contenus en germe. Jean de Saint-Thomas, Cursus theologicus, De fi.de, disp. IV, a. 1, n. 2, Paris, 1883, t. vii, p. 92 ; Gonet, Clypeus theologiæ thomislicæ, De virtutibuslheologicis, Paris, 1876, t. v, p. 262 sq. ; Salmanticenses, Cursus theologicus, tr. xvii, De fide, disp. VI, n. 69, Paris, 1879, t. xi, p. 324 sq. ; Billuart, Summu S. Thomæ, De fide, diss. III, a. 1.

b. En regard de la fin surnaturelle, la nécessité de recevoir les sacrements de baptême et de pénitence, et celle d’adhérer à la véritable Église de Jésus-Christ, sont appelées nécessités ex mera institutione Dei positiva, parce que ces moyens n’ont pas avec la fin surnaturelle une connexion intrinsèque nécessaire, mais seulement une connexion extrinsèque provenant de la volonté positive de Dieu. Dieu ne pouvant ainsi commander des choses dont l’accomplissement est impossible dans une circonstance donnée, on doit conclure que, dans la mesure où ces moyens sont invinciblement ignorés, ou que leur accomplissement actuel est physiquement impossible, un simple désir, qui doit être considéré comme suffisamment contenu dans la charité surnaturelle guidée par la foi surnaturelle, peut suffire pour le salut. Voir S. Thomas, Sum. theol., III a, q. lxviii, a. 2 ; Charité, t. ii, col. 2238 sq., et notre dissertation Extra Ecclesiam nulla salus, 1895, p. 222 sq., 237 sq., 373 sq. En ces occurrences, c’est la doctrine communément admise pour le baptême chez les adultes, pour le sacrement de pénitence nécessaire à ceux qui ont commis le péché, et pour la nécessité d’appartenir à la véritable Église de Jésus-Christ.

c. Quant aux préceptes divins ayant pour objet ce qui est simplement commandé par Dieu pour le bien cp’rituel des fidèles, sans être aucunement nécessaire pour le salut, leur comparaison avec la fin surnaturelle, et avec les préceptes ayant pour objet une chose nécessaire au salut, a conduit les théologiens à cette double conclusion communément admise : a) Puisque l’objet du commandement n’a aucune connexion nécessaire avec la fin surnaturelle, son accomplissement in voto n’est nullement nécessaire quand l’accomplissement effectif est rendu impossible. Suarcz, De fide, disp. XII, sect. I, prolog. 5. — P) Puisque l’objet du commandement n’a aucune connexion nécessaire avec la fin surnaturelle, il n’y a pas que la seule impossibilité physique qui excuse de son accomplissement effectif. Une impossibilité morale, dont la nature doit être appréciée selon l’importance du précepte, doit, quand elle est réelle, excuser de l’accomplissement du précepte, à moins d’intervention, dans le cas concret, de quelque précepte d’une importance supérieure et s’imposant rigoureusement. Ainsi l’accomplissement du précepte positif de pratiquer extérieurement la foi catholique est susceptible d’une suspension temporaire dans le cas d’une grave impossibilité morale ; pourvu que, dans la circonstance, il n’y ait point de nécessité positive de confesser sa foi, qu’il n’y ait point danger prochain d’apostasie et qu’il n’y ait point de scandale grave qui ne puisse être conjuré par d’autres moyens. Voir S. Thomas, Sum. theol., Iia-II 80, q. iii, a. 2.

c) Enfin la comparaison entre les divers préceptes surnaturels et naturels aide à déterminer pratiquement lequel doit avoir la préséance, quand plusieurs sont en présence, et dans quelle mesure cet le préséance doit être assurée. Ainsi, selon l’appréciation

commune des théologiens, quand il y a impossibilité

de garder autrement un secret naturel ou confié, ou de défendre un inléi’èl suffisamment grave, le précepte de ne poinl coopérera la déception du prochain

doit céder ; de telle sorte que l’on peut, en ce cas, employer des expressions amphibologiques, à l’occasion desquelles le prochain pourra s’induire lui-même en erreur. Voir S. Thomas, Sum. theol., II a -Il æ, q. ex, a. 3, ad 4um.Demème, le précepte de ne point exposer un sacrement au péril de nullité ou de réception indigne doit, moyennant certaines conditions, céder devant le devoir de charité d’empêcher un scandale grave, ou d’éviter un dommage spirituel grave pour quelque individu. Inversement, en face d’un mal commun, comme un scandale grave, que l’on doit nécessairement empêcher ou écarter, des choses qui, sans cela, seraient en elles-mêmes permises, du moins avec, quelque raison, doivent être absolument interdites.

2° Grande utilité de la méthode scolastique pour répondre aux objections contre les vérités morales révélées, et pour montrer, par des arguments de convenance, l’harmonie de la vérité révélée avec les connaissances d’évidence rationnelle. — 1. Comme en dogmatique, la méthode scolastique est très utile en morale pour réfuter les objections rationnelles opposées aux vérités révélées ; non que la raison puisse, par elle-même, donner une démonstration effective de ces vérités dont elle ne peut avoir l’évidence intrinsèque, mais en ce sens qu’elle peut toujours montrer que les objections présentées n’ont point de valeur démonstrative. S. Thomas, Sum. theol., I a, q. i, a. 8 ; Cont. gent., 1, 1 ; In Boetium de Trinitate, q. ii, a. 1, ad 5um ; a. 2, ad4um ; a. 3.

2. La méthode scolastique est aussi très utile pour donner, en faveur des vérités révélées, des arguments de convenance empruntés aux connaissances d’évidence rationnelle, et servant à faciliter aux fidèles la connaissance des vérités surnaturelles. S Thomas, In Boetium de Trinitde, q. ii, a 3 ; a. 1, ad 5 unx.

Ainsi, dans la Somme théologique, saint Thomas justifie, par diverses preuves, la convenance parfaite de tout ce qui est ordonné par la loi nouvelle, I a -Il aî, q. cviii, a. 1 sq. ; l’excellence des conseils évangélique.s, q. cviii, a. 4 ; la nécessité de l’acte de foi surnaturelle pour le salut, II a -Il æ, q. ii, a. 3 sq. ; le précepte de confesser extérieurement sa foi, q. iii, a. 2 ; la convenance du précepte de la charité surnaturelle envers Dieu et envers le prochain, q. xliv ; le précepte de la prière considéré d’une manière générale ou dans ses diverses circonstances, q. lxxxiii, a. 2 sq. ; l’excellence du vœu considérée d’une manière générale, q. lxxxviii ; la nécessité des vœux religieux pour l’état religieux, q. clxxxvi, a. 1 sq. ; la nécessité du baptême pour le salut, soit d’une manière générale, Ill a, q. lxviii, a. 1 sq., soit particulièrement pour les enfants, q. lxviii, a. 9 sq. ; le précepte eucharistique, q. lxxiii, a. 3 ; q. lxxx, a. Il sq. : le précepte de la confession sacramentelle, In IYum Sent., dist. XVII, q. iii, a. 1.

3° Quant aux vérités morales naturelles. - - 1. C’est un fait constant que seule la méthode scolastique peut établir solidement ces vérités, soit en écartant, d’une manière efficace, les fausses méthodes, soit en fournissant tics arguments solides pour une démonstration effective.

a) Quatre méthodes principales doivent être ici écait ées. a. La méthode kantienne selon laquelle tonte obligation morale (si l’on peut vraiment, dans ce système, employer cette expression), serait produite par le commandement de chaque volonté individuelle dictant celle règle : « Agis de telle façon que la maxime qui dirige la conduite puisse devenir une

loi universelle. » <>n comprend que, dans ce système, les déductions de la raison pratique, étant des formules purement abstraites, sont Incapables d’établir une obligation morale, puisque de telles formules on ne peut déduire aucune affirmation portant sur une