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MONTEMPUYS — MONTESQUIEU


thèque de l’Arsenal, n° » 10 847 et 10 982. Montempuys mourut le 23 novembre 1763, ayant fait sa soumission à l’Église.

Ses principaux écrits sont dirigés contre la bulle Unigenitus. Ce sont : Oratio habita in comitiis generalibus universitatis, in-4°, s. 1., 1716. — Mémoire présenté à S. A. Mgr. le duc d’Orléans, pour la défense de l’Université, contre un Mémoire de quelques prélats de France, 7 juin 1717. L’évêque de Senez le félicita vivement de ce Mémoire (Lettres de Messire Soanen, évêque de Senez, 6 vol. in-12, Cologne, 1750, t. i, p. 160-162, et aussi lettre du 19 mars 1717, t. i, p. 128-130). — Observations sur l’instruction de Mgr l’archevêque de Reims du 14 janvier 1717, in-12, 1717.

— Déclaration et conclusions de l’Université de Paris sur la proposition d’appel de la Constitution Unigenitus, in-4°, 1717. — Discours des 22 juin et 16 décembre 1717, dont l’Histoire du livre des Réflexions morales sur le Nouveau Testament et sur la Constitution Unigenitus, t. vi, p. 148-165, fait un très grand éloge.

— Enfin, après sa mésaventure, Montempuys publia des Observations sur la nouvelle édition des Mémoires de M. de Sully, principalement pour ce qui concerne les jésuites dans lesquels on rectifie plusieurs faits qui les concernent, sous le règne d’Henri I V, altérés dans cette nouvelle édition, in-12, La Haye, 1747, réimprimés en une nouvelle édition, considérablement augmentée, in-12, Amsterdam, 1762, sous le titre, Supplément aux Mémoires de Sully.

Quérard, La France littéraire, t. VI, p. 237 ; Hébraïl-Guyot-Laporte, La France littéraire, 2 vol., in-12, Paris, 1769-1784, t. H, p. 80-81 ; Journal et mémoires de Mathieu Marais, publié par M. de Lescure, 4 vol. in-8°, Paris, 1864, t. iii, p. 465-466 ; Histoire du livre des Réflexions morales sur le Nouveau Testament, 6 vol. in-12, Amsterdam, 1723, t. vi, p. 148-165.

J. Carreyre.

MONTESQUIEU (Charles-Louis-Joseph de Secondât, baron de la Brèdeet de), littérateur, historien et philosophe français, né au château de LaBrède, près de Bordeaux, le 18 janvier 1689, mort le 1 er février 1755, à Paris. I. Vie et œuvres. II. Idées. III. Influence.

I. Vie et œuvres. — De noblesse de robe, Charles de Secondât, après avoir fait ses études à Juilly chez les oratoriens et son droit à Bordeaux, devint en 1714 conseiller au parlement de cette ville. En 1716, un oncle, l’aîné de la famille, lui léguait avec sa charge de président à mortier son titre de baron de Montesquieu. Très fier de son sang et de son rang, mais peu attaché à son métier, Montesquieu s’occupa bientôt de littérature. En 1716, il lisait à la jeune Académie de Bordeaux, fondée en 1712 et où il venait d’entrer, plusieurs dissertations, Sur la politique des Romains dans la religion et Sur le système des idées, etc. Puis il s’adonnait aux sciences physiques que Newton avait mises à la mode et, dès 1719, précurseur de Buffon, il méditait une Histoire physique de la terre ancienne et moderne, et, en 1721, il rédigeait des Observations sur l’histoire naturelle. Mais gêné dans son travail scientifique par une dure myopie et par l’éloignement de la capitale, il s’adonnait exclusivement aux études morales et politiques.

Les Lettres persanes.

En 1721, il faisait imprimer,

soi-disant, « à Cologne chez Pierre Marteau », dans la réalité en Hollande, ses Lettres persanes (150), 2 in-12, sans nom d’auteur. La même année, il publiait dans les mêmes conditions, une « seconde édition revue, corrigée, diminuée et augmentée par l’auteur », soit 137 lettres de l’édition précédente et 3 nouvelles ; non, comme l’a cru M. Vian, Montesquieu, sa réception à T Académie française et la deuxième édition des Lettres persanes, Paris, 1869, pour se faire pardonner les hardiesses de la première : il la destinait, scmble-t-il, aux

protestants français réfugiés dans les Provinces-Unies. Cf. Laboulaye, Œuvres complètes de Montesquieu, 1. 1, préface, p. 39, et H. Barckhausen, Montesquieu, ses idées et ses œuvres, Paris, 1907. Deuxième partie, I, préface aux Lettres persanes. En 1754, nouvelle édition donnée par l’auteur ; c’est la première, suivie d’un Supplément, comprenant les 3 nouvelles de la seconde et 8 autres, avec Quelques réflexions qui sont une apologie du livre et peut-être une réponse au livre de l’abbé J.-B. Gaultier, Les Lettres persanes convaincues d’impiété, in-12, 1751. Enfin, en 1913, M. Barckhausen en a donné une édition, revue et annotée d’après les manuscrits du château de La Brède avec un avantpropos et un index, 2 in-12. Elle donne 160 lettres, la 77e (sur le suicide) est supprimée.

Deux Persans, d’âge et de caractère différents, Rica et Visbeck, visitent l’Europe et renseignent sur les choses d’Europe des amis qui les renseignent à leur tour sur les choses de chez eux : tel est le sujet du livre. Ce sujet n’avait rien d’original et le livre est sans valeur documentaire sur les choses de Perse. L’imagination de l’auteur travaille simplement sur les données du Voyage en Turquie, en Perse et aux Indes de Tavernier, 1676-1679, et surtout sur le Voyage en Perse du protestant Chardin. 1686, qui venait d’être réédité, 1711. Le livre de Montesquieu est un roman libertin très précis, par où, arrivant en pleine Régence, il eut un succès sans précédent, et à la fois, une satire de la société européenne, particulièrement sévère pour la France ; il offre des portraits qui font penser à La Bruyère ; il critique durement les femmes et ceux qui arrivent par elles, la cour et les grands ; il est une satire souvent injuste du gouvernement de Louis XIV, en quoi encore il est bien de son temps, et de l’Église, par quoi il est une préparation au mouvement philosophique du xviiie siècle. Cf. W. Marcus, Die Darstellung der franzôsischen Zuslande in Montesquieu’s Lettres persanes, verglichen mit der Wirklichkeit, Breslau, 1902. Certaines lettres et, à tout le moins, certains passages, concernant surtout l’économie politique annoncent cependant l’Esprit des lois.

L’auteur qui avait tu son nom fut vite connu et, dès 1722, dans un séjour qu’il fit à Paris, tous les salons littéraires, salons de Mme de Lambert, de Mme de Tencin, de Mme du Defïand, de Mme de Prie, de Mlle de Clermont, s’ouvrirent devant lui. C’est pour Mlle de Clermont, dit-on, que Montesquieu composera le Temple de Gnide, « l’Apocalypse de la galanterie », selon Mme du Defïand, « une erreur de goût et une méprise de talent », selon Sainte-Beuve, Causeries du lundi, t. vii, p. 45. Il le publiera d’abord dans la Bibliothèque française, 1724, p. 82, puis à part, à Paris, en 1725.

Sacré homme de lettres, Montesquieu refit le geste de son compatriote, Montaigne ; en 1726, il vendit sa magistrature pour ne plus s’occuper que des lettres, et dès lors son histoire n’est plus que l’histoire de sa vie littéraire.

Le 5 janvier 1728, il était élu à l’Académie. Cela n’avait pas été sans peine. Ses Lettres persanes avaient été un scandale politique et, le Il décembre 1727, Fleury mettait un veto formel à son élection. Pourquoi Fleury a-t-il cédé ? Voltaire, Siècle de Louis XIV, liste des écrivains français, Montesquieu, imagine que l’auteur, « fit faire en peu de jours une nouvelle édition de son livre dans laquelle on retrancha ou on adoucit ». Fleury, « qui ne lisait guère » et que travaillaient « quelques personnes de crédit », n’y aurait plus regardé de si près. M. Vian a ajouté que la « seconde édition » de 1721 serait cette édition assagie. Mais tout résiste à ces hypothèses.

2° Les Considérations sur les causes de la grandeur