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joie de connaître la vérité avec une élite, si la foule avait été attirée par la nouvelle prophétie.

Tertullien lui-même contribua à affaiblir encore ce groupe en le scindant : tandis que les uns restaient fidèles à la doctrine de Montan, il entraîna les autres en des conventicules à lui. A l’époque de saint Augustin. De luvresibus., 80, il y avait encore à Cartilage quelques tertullianistes qui possédaient une basilique : le grand évêque eut la joie de les ramener à l’Église catholique. Entre temps, c’est le silence : Saint Cyprien ne cite pas les montanistes ; saint Optât de Milève, De schism. donatist., i, 9, les nomme parmi les hérésies disparues. Seule une inscription découverte en 1875 à Mascula en Numidie. fournit un curieux témoignage des survivances montanistes. Elle est ainsi conçue : Flabius auus domesticus in noniine Patris et Filii (et) domini Munlani. Ce Muntanus qui remplace si singulièrement le Saint-Esprit ne saurait être que Montan, dont nous savons d’ailleurs qu’il se présentait ou était présenté par ses disciples comme le Paraclet.

Il semble qu’à Rome le montanisme ait fait preuve de plus de vitalité qu’en Afrique. Mais nous ne savons rien de son histoire jusqu’à la fin du ive siècle, époque pour laquelle saint Jérôme met en garde sainte Marcelle contre les procédés des cataphrygiens qui font de la propagande en faveur de leur secte, Epist., xli, et l’auteur du Prædestinatus raconte comment un prêtre tertullianiste arriva à Rome du temps de Maxime, et parvint à s’emparer du tombeau des saints Processus et Martinianus autour duquel il réunissait ses fidèles, Prædeslin., lxxxvi : P.L., t. lui, col. 616. En Espagne, ni en Gaule le montanisme ne semble avoir pénétré. Il reçut en Occident son arrêt de mort par la loi du 22 février 407 due à l’empereur Honorius, Cod. Theodos., XVI, v, 40. Cette loi prononce contre les montanistes la confiscation des biens, l’inaptitude à faire aucun contrat, l’annulation des testaments, l’incapacité de recevoir des dons ou legs, la confiscation même des propriétés où ont été tenues des réunions hérétiques. De telles prescriptions équivalaient à la mort civile. Il est du moins probable qu’elle ne frappèrent pas de nombreuses victimes.

Sur les destinées du montanisme en Orient, nous sommes fort mal renseignés : quelques lignes de Firrailien de Césarée en Cappadocc, un nom dans les actes de saint Pionius de Sinyrne, martyr de la persécution de Dèce, voilà tout ce que nous savons de son histoire pendant le iiie siècle. « Ceux-là même qu’on appelle cataphrygiens, écrit Firmilien, et qui essayent d’utiliser frauduleusement de nouvelles prophéties, ne peuvent posséder ni le l’ère ni leFils, parce qu’ils n’ont pas non plus le Saint-Esprit. Si nous leur demandons quel Christ ils prêchent, ils répondent que c’est celui qui a envoyé l’Esprit qui’a parlé par Montan et Prise ;, . Comme nous constatons que ce n’est pas l’Esprit de vérité, mais l’esprit de mensonge qui habitait en eux, nous connaissons par là que ceux qui défendent leur fausse prophétie contre la foi du Christ ne peuvent posséder le Christ. Telles sont les vues d’ensemble que nous avons arrêtées il y a déjà longtemps à [conium, ville de Phrygie où nous nous (’lions réunis… » Dans s. Cyprien, Epist, lxxv, 7 ; trad. p. de Labriolle, op. cit., p. 484. Le concile d’Iconium, dont il est ici question, a pu se tenir vers 2150 el régler la question générale du baptême des hérétiques : on a d’ailleurs des raisons de croire qu’il s’est occupé spécialement des montanistes dont le nombre pouvait encore être grand en Lycaonie, en Phrygie et dans toute la région. La même lettre de Firmilien raconte assez, longuement l’histoire d’une prophétesse, qui, peu de temps après la mort d’Alexandre Sévère 235, eut raina des multitudes vers.lé

usalem en se donnant comme inspirée par l’Esprit-Saint, E/>ist., i.xxv, 10. La plupart des critiques rattachent cet incident à l’histoire du montanisme. P. de Labriolle, op. cit., p. 487, estime au contraire qu’il est sans aucun rapport avec l’hérésie phrygienne, et il peut avoir tout à fait raison.

Nous n’avons pas beaucoup plus de renseignements sur la vie du montanisme oriental au cours du ive siècle. Les écrivains de ce temps parlent assez souvent, il est vrai, des phrygiens, mais il est difficile de savoir s’ils les connaissent d’expérience ou s’ils se bornent à citer le nom d’une secte dont ils ont vaguement entendu parler. Dans quelques cas pourtant, on est fixé sur la valeur du témoignage. Si Dydime insiste longuement sur le montanisme, De Triait., III, xli, s’il a peut-être consacré à sa réfutation la AixXev.ç publiée en 1905 par G. P’icker, c’est sans doute parce qu’il y voyait une secte dangereuse pour l’orthodoxie, et encore pleine de vie à son époque. De même saint Jérôme parle des montanistes d’après son expérience personnelle : il les a rencontrés à Rome, Epist., xli, et peut-être en Galatie, Di Galal. comment., ii, 2. Saint Épiphane est lui aussi un témoin oculaire, bien que ses affirmations aient ici, comme souvent ailleurs, besoin d’un sérieux contrôle : il signale l’existence des sectaires en Cappadocc, en Galatie, en Phrygie, et surtout en Cilicie et à Constantinople, Hæres., xlviii, 14 ; il rattache à l’hérésie phrygienne les Tascodrugites, les Quintilliens, les Pépuziens, les Ai totyrites, les Priscilliens et les Quartodécimans : ces généalogies semblent d’ailleurs créées pour les besoins de la cause, et l’on ne doit pas y attacher grande importance.

En cette fin du ive siècle, la secte était devenue une Église organisée, qui n’avait à peu près rien gardé des enthousiasmes primitifs, et qui, sur bien des points, se rapprochait du novatianisme. Elle avait sa hiérarchie, ses jeûnes, ses usages liturgiques ; et les catholiques la tenaient en général pour une hérésie dont le baptême n’était pas valide.

Sur la hiérarchie montaniste, nous sommes rensei-. gnés surtout par saint Jérôme, qui écrit à sainte Marcelle, Epist., xli, 3 : Apud nos apostolorum locum episcopi taxent ; apud eos episcopus lertius est. Habent enun primos de Pepuza Phryt, iæ palriarchas, secundos quos uppellant xoivojvoùç, atqueita in lertium psene ultimum ç/rodum episcopi devolvuntur. La même hiérarchie existait encore à l’époque de Justinien, Cod. Justin., 1. v, 20, édit. Krùger, p. 58 : îSixcôç Se biA toïç àioaioi.ç MùVTavLCTTotïç 0eo-7ÛÇo(i, îv ciore (nrjSéva aoy^copetaOoa tcôv xaXoup-svcov aù-rcôv Trarpiap^cov xal xoivcovcov /) ZTCiaxônoiv ïj 7rpso60TÉpcov ï ( Siaxôvcov v^ aXXcov xXv ; pixûv. .. Cette loi est datée du 10 des calendes de décembre 530. tue inscription, récemment découverte près de Philadelphie de Lydie, nous fait connaître le nom d’un de ces xotvcovoî montanistes en 511-515 : il s’agit d’un certain Prayllios, qui est qualifié de ayio^ et porte le titre de xoivcovàç xarà tÔ7tov. H. Grégoire. Du nouveau sur lu hiérarchie de lu secte montaniste, d’après une inscription grecque trouvée /très de Philadelphie en Lydie, dans les Comptes rendus de l’Acad. des Inscr. et Bel.-l.et., 1° mai 1925. Nous ignorons d’ailleurs la fonction propre des cornons dont parlent ces textes. La hiérarchie montaniste. au témoignage de saint Épiphane, Hseres., XXIX, 2. comprenait des

femmes, parmi les évoques et les prêtres : P. « le Labriolle, il est vrai, » />. cit.. p. 510-5Il révoque en doute l’autorité de ce témoignage, mais il semble pouvoir être retenu, étant donnée la place que les femmes avaient traditionnellement occupée dans la secte depuis les jours de Montan et de ses prophètes : es.

Les jeûnes montanistes sont encore connus grâce à saint Jérôme, qui, Epist., xi.i, 3, attribue aux sectaires