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MONOPHYSITE (EGLISE COPTE), LITTERATURE THEOLOGIQUE


conservèrent des relations de fraternité avec leurs collègues syriens du patriarcat d’Antioche, et leur envoyèrent régulièrement leurs lettres synodiques ou enthronistiques, à leur avènement. Les patriarches d’Antioche leur rendaient la même politesse. Mais cela n’allait pas plus loin. Chaque Église a conservé ses coutumes particulières, quelquefois même ses croyances divergentes, sans jamais rompre officiellement les rapports d’amitié depuis la fameuse union de 616, dont nous avons parlé plus haut. C’est ainsi qu’au xine siècle, lors de la controverse sur la nécessité de la confession, controverse dont il sera question plus loin, Michel le Syrien, patriarche d’Antioche, prit nettement parti pour la doctrine traditionnelle contre l’abus qui s’était introduit dans l’Église copte. Mais il n’excommunia pas pour cela les adversaires de la confession. Cf. Renaudot, op. cit., p. 408-410, 437-438. Voir aussi du même, Historia patriarcharum Alexandrinorum, p. 152, 180, 196, 234, 262, 269-270, 282, 291, 355, 365, 446 ; et l’article Michel le Syrien, t. x, col. 1715, 1718 sq.

Ces relations fraternelles avec l’Église syrienne avaient leur racine dans le souvenir des luttes communes soutenues, au début du schisme monophysite, contre les chalcédoniens. et des services réciproques qu’on s’était rendus. Les Égyptiens avaient conservé vivace la mémoire de Sévère d’Antioche, et célébraient par une fête, portée au 2 du mois Paophi.son arrivée dans leur pays. Les mêmes liens ne les unissaient pas aux Arméniens. Avec ceux-ci les relations furent tardives et très intermittentes. Cf. Renaudot, Historia patriarcharum, p. 460-465, 505-507, 579. Le passage suivant de la Lampe des ténèbres d’Abou’I-Barakât, c. i, en marque assez exactement le caractère : « Quant à la secte des Arméniens, dit le théologien copte, ils disent, à ce qu’on raconte d’eux, que le corps du Christ est subtil, plus subtil que tous les corps humains (allusion au julianisme des Arméniens : cf. art. Monophysisme, col. 2236). Et quand on les réfute sur ce point en alléguant ce que contiennent les livres révélés de son égalité avec les corps humains en tout, sauf le péché, ils s’excusent de ne l’avoir dit que parce qu’il n’a pas été formé d’une semence virile. Ils s’accordent avec les jacobites pour mentionner une seule nature, une seule volonté. Ils ont des usages de leur invention qu’ils sont seuls à avoir. Mais les jacobites ne leur refusent pas chez eux l’eucharistie à cause de ces usages. » L. Villecourt-E. Tisserant, Livre de la Lampe des ténèbres par Abou’l-Barakât connu sous le nom d’Ibn Kabar. Texte arabe édité et traduit dans la Patrologia orientalis, t. xx <1928), p. 681.

III. Littérature théologique.

La littérature théologique de l’Église copte est encore très imparfaitement connue. On est arrivé, sans doute, à dresser le "catalogue à peu près complet de ce que les manuscrits coptes et arabes nous ont conservé ; mais une petite partie seulement des écrits signalés a été éditée jusqu’à ce jour, et rendue accessible par des traductions. Cette littérature est, du reste, beaucoup moins riche que celle de l’Église syrienne jacobite, ou celle de l’Église arménienne pour ce qui regarde les œuvres originales. Les coptes n’ont jamais été des spéculatifs. Anastase le Sinaïte accusait les Égyptiens de son temps d’être incapables de distinguer entre aXXoç et SXko, en théologie trinitaire et en christologie, Hodegos, P. G., t. lxxxix, col. 257. Ils ont surtout produit des écrits historiques et canoniques, des compilations liturgico-canoniques, mais peu ou point d’ouvrages dogmatiques originaux. II faut reconnaître, à leur décharge, que la dure servitude qu’ils ont subie durant tant de siècles, n’a pu qu’entraver chez eux la culture intellectuelle.

La littérature ecclésiastique des coptes — la seule littérature ou à peu près qu’ils aient eue — se divise en deux branches bien distinctes : il y a la littérature copte proprement dite, écrite dans l’ancienne langue du pays, et la littérature copto-arabe comprenant les ouvrages écrits en langue arabe. Disons un mot de chacune d’elles.

La littérature copte proprement dite.

 Ce qu’on

appelle la langue copte, n’est pas autre chose que l’ancien idiome des Égyptiens, celui des hiéroglyphes, dans sa forme populaire, écrit d’après un alphabet nouveau (qui est l’alphabet grec augmenté de six ou sept signes empruntés à l’écriture primitive) et mélangé d’une forte dose de mots grecs pour exprimer tout ce qui a trait à la religion chrétienne. Par un phénomène curieux, en effet, les Égyptiens, en se faisant chrétiens, expulsèrent de leur langue l’ancien vocabulaire religieux de leurs ancêtres païens, et adoptèrent d’emblée la terminologie religieuse de ceux qui leur prêchèrent l’Évangile. De là cette proportion relativement considérable de mots grecs dans la langue copte.

En celle-ci, comme en toute langue, on trouve plusieurs dialectes, dont les deux principaux sont le sahidique et le bohaïrique. Le sahidique (de l’arabe Essa’id = te haut), appelé autrefois dialecte thébain, est le parler de la Haute-Egypte ayant pour centre la ville de Thèbes. Ce dialecte a presque complètement disparu à partir du viie siècle, et a été supplanté comme langue liturgique commune, par le bohaïrique ou dialecte de la Basse-Egypte et de la région du Delta (de Bohaïreh = région du Lac), le memphitique des anciens. C’est en bohaïrique que sont écrits les livres liturgiques de l’Église copte. Il faut signaler aussi l’akhmimique, ou dialecte primitif de la région d’Akhmim, plus tard remplacé par le sahidique. C’est en akhmimique que sont écrits les plus anciens manuscrits coptes que l’on possède. Viennent ensuite les manuscrits sahidiques. Les plus récents sont en bohaïrique.

De la masse littéraire qui nous est parvenue en langue copte, la théologie proprement dite a bien peu de chose à tirer. Cette masse, en effet, consiste principalement en traductions : 1° traductions de l’Écriture sainte et des apocryphes de l’Ancien et du Nouveau Testament, souvent fortement retouchés et amplifiés par l’imagination copte, une des moins équilibrées de l’Orient ; 2° traductions d’oeuvres patristiques. Il reste peu de chose des Pères anténicéens, sans doute parce que la littérature chrétienne primitive avait perdu beaucoup de son intérêt lorsque commença à se former (entre le m et le ive siècle) la littérature copte chrétienne ; mais le fonds postnicéen est considérable et à peu près inexploré. C’est dire son importance pour une édition critique des œuvres des Pères grecs. Il faut noter que de nombreux morceaux sont apocryphes. Les Pères les mieux représentés sont : saint Jean Chrysostome, saint Cyrille d’Alexandrie, saint Grégoire de Nazianze, saint Éphrem, saint Basile, saint Athanase, saint Épiphane, Théophile d’Alexandrie, Sévérien de Gabala, Eusèbe de Césarée, etc. Pour la période postchalcédonienne, ont trouve fort peu de chose : quelques sermons de Sévère d’Antioche, un panégyrique de saint Georges, de Théodose de Jérusalem, et c’est à peu près tout ; 3° traductions de documents canonico-liturgiques habituellement remaniés et fortement interpolés : Didachè, Constitutions apostoliques, Constitution de l’Église égyptienne, recension abrégée de vin » livre des Constitutions apostoliques, canons des apôtres, canons d’Hippolyte (que les Coptes, passés maîtres en l’art d’estropier les noms propres, appellent Aboulidès), canons de saint Atha-