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MONOPHYSITE (ÉGLISE COPTE), HISTOIRE


tioche. On eut de part et d’autre double hiérarchie. Pierre IV d’Alexandrie déposa Paul d’Antioche, qui avait appuyé la candidature de son rival, Théodore, et eut pour lui le vieux Jacques Baradée († 30 juillet 578). Son successeur, Damien 578-604). se posa en pape des Églises monophysites, et profita de la tolérance de l’empereur.Maurice pour les reconstituer. Il fit élire Pierre de Callinique au siège d’Antioche et l’ordonna lui-même à Alexandrie (582). Cependant l’union entre les deux patriarches ne dura pas longtemps. Damien ayant composé un ouvrage de controverse contre les trithéites, Pierre trouva à redire à son orthodoxie et l’accusa d’introduire en Dieu, en dehors des trois personnes, un quatrième élément : une substance commune aux trois : d’où le nom de tétradisme. Voir article Monophysisme, col. 2248. Le schisme canonique entre les deux patriarcats monophysites qui venait de s’éteindre par la mort de Théodore d’Alexandrie (t après 580) et celle de Paul de Beith Oukamé d’Antioche († 584), faisait place à un schisme d’ordre doctrinal entre Damien et Pierre de Callinique (587). Il ne se termina que sous le règne d’Héraclius en 616, presque à la veille de l’invasion de l’Egypte par les Perses. Le concile qui scella l’union se tint à Alexandrie. Les deux patriarches, Anastase d’Alexandrie et Athanase d’Antioche, n’y parurent point, mais se tenaient dans les environs. Quand l’accord fut conclu, accord plus apparent que réel, ils se rencontrèrent au couvent de Csesaria la patricienne, où ils promulguèrent sous le nom de aovoSoxôv le pacte de conciliation. Le tétradisme de Damien et le trithéisme de Pierre de Callinique étaient condamnés ; mais on faisait le silence sur la personne des patriarches. Cet accord si imparfait suscita même, semble-t-il, un nouveau schisme en Egypte, où un parti de damianites intransigeants ayant à sa tête le moine syrien, Jean de Beith Aphtonia, refusa d’adhérer au pacte d’union et se constituta en groupe séparé. Cf. J. Maspéro, op. cit., p. 318-337.

L’arrivée des Perses en Egypte (618-619) assoupit pour un instant ces querelles, semant là comme ailleurs la mort et les ruines. Les innombrables monastères établis dans les environs d’Alexandrie furent pillés et détruits, et de nombreux moines furent massacrés. Le patriarche Andronic, successeur d’Anastase, fut témoin de ces désastres (616-622). Son successeur, Benjamin, s’enfuit dans la Haute-Egypte, après le départ des Perses, dès l’arrivée de Cyrus, nommé par Héraclius au siège d’Alexandrie (631). Pendant son absence, le clergé monophysite d’Alexandrie et plusieurs milliers de ses fidèles firent leur union avec Cyrus sur la base des formules cyrilliennes, en y ajoutant la confession de l’unique activité ou opération théandrique du Christ (633). Cf. Mansi, op. cit., t. xi, col. 563. Cette union bâtarde n’eut qu’un succès éphémère et plus apparent que réel. Bientôt les Arabes de Mahomet arrivèrent (639), et eurent vite fait de conquérir tout le pays, avec la connivence des habitants, qui crurent trouver en eux des libérateurs. Amrou, le lieutenant d’Omar, ne rencontra de résistance sérieuse que devant Alexandrie, dont il s’empara en 641.

2° La domination arabe (641-1517). — Les vainqueurs témoignèrent d’abord aux coptes une certaine bienveillance. Tout en les accablant d’impôts et de servitudes, ils leur laissèrent la possession de leurs biens et le libre exercice de leur religion. On leur livra les églises et les monastères et en particulier le kaisarion, basilique patriarcale d’Alexandrie. Le patriarche Benjamin put sortir de sa retraite de la Thébalde (644) i contraire, les melkltes, comme on les appelait, furent traités plus durement, llsn’étaient qu’une

minorité : 200 000 environ contre 6 millions de Coptes.

Ceux-ci n’eurent pas longtemps à se louer de la domination des infidèles. Une douzaine d’années s’étaient à peine écoulées depuis la conquête, que commencèrent les exactions et les vexations de toutes sortes. On s’en prit d’abord aux moines. Ils durent porter au poignet un anneau en fer sur lequel étaient gravés leur nom, leur âge et le nom de leur monastère. Les désobéissants furent sévèrement punis, et sous Yezid I er (679-682) on en massacra un grand nombre. Des simples chrétiens on exigea d’abord un papier d’identité sous peine d’amende ; puis, en l’an 119 de l’Hégire, on les obligea à avoir sur la main, comme marque distinctive, un lion tatoué. Les contrevenants avaient la main coupée. Les chrétiens se virent exclus, au début du vine siècle, de toutes les fonctions administratives, et l’arabe remplaça le copte dans la rédaction des états et registres civils. On les pressura d’impôts et de contributions. Des lois d’exception furent portées de temps à autre pour les amener à l’apostasie. Et cela dura sous les diverses dynasties qui, de 640 à 1517, se disputèrent la possession de l’Egypte. La persécution violente alterna avec les périodes de répit. Le sort des chrétiens sous les empereurs romains des trois premiers siècles : tel fut le lot des malheureux chrétiens d’Egypte pendant cette longue période. La persécution fut particulièrement atroce au début du xie siècle sous le farouche sultan Hakem. Non seulement il expulsa les coptes de toutes les fonctions publiques, mais il confisqua les biens-fonds des églises et des couvents, fit disparaître les croix des églises tandis qu’il obligeait chaque chrétien à en porter au cou une du poids de cinq livres. Il interdit le vin sous des peines très sévères et fit briser tous les tonneaux, de sorte que les chrétiens ne trouvaient plus la matière du sacrifice de la messe. Sous la dynastie des Ayoubites fondée par Saladin (1169-1250), les chrétiens jouirent d’une tranquillité relative ; mais la persécution reprit de plus belle sous les Mamelouks. Les mesures de rigueur de Hakem furent renouvelées et aggravées.

Durant toute cette période, l’Église copte végéta misérablement. Si elle eut quelques rares martyrs, les apostasies furent très nombreuses. La simonie, favorisée par les lourdes contributions exigées par les infidèles, fut sa grande misère morale. Il faut y ajouter l’ignorance du clergé, qui dépassa parfois les limites de la vraisemblance. Ne vit-on pas, au xiie siècle, un patriarche absolument illettré ? Quand il fut élu, Michel V, 71° patriarche (1145-1146), était simple moine : il ne savait ni lire ni écrire, et on dut lui faire apprendre par cœur le texte de la messe et du rituel. Il fît plusieurs ordinations, et mourut au bout de six mois, empoisonné par les moines, qu’il avait voulu réformer. Cf. Renaudot, Historia palriarcharum Alexandrinorum, Paris, 1713, p. 514-516.

Les Croisades fournirent aux Coptes l’occasion d’entrer en relations avec les Latins catholiques. Loin d’amener un rapprochement, ces relations ne suscitèrent que des polémiques. Les coptes ne pardonnèrent pas aux latins de les avoir expulsés des Lieux saints de Palestine et de les empêcher de faire le pèlerinage de Jérusalem. Quelques traités polémiques, visant la foi, la discipline et les usages liturgiques, furent composés contre eux. Cf. Renaudot, op. cit., p. 478-480. Inutile de parler du semblant d’union qui eut lieu au moment du concile de Florence. La lettre du patriarche Jean XI au pape Eugène IV (1439-1440) donna de vains espoirs, et le Décret pour les jacobites resta à peu près lettre morte en Egypte. Cf. Mal, Scriptorum veterum nova collectio, t. v. p. 175 ; .1. Falvre, art. Alexandrie, dans le Dictionnaire