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MITIGATION DES PEINES DE LA VIE FUTURE


P. L., t. xli, col. 738, que le triomphe de la miséricorde n’est point en faveur de ceux qui ont déjà passé au jugement de Dieu. - On ne peut tirer aucun argument de I Reg., ii, 6, le schéôl hébreu désignant le séjour post-terrestre des bons comme des mauvais. A plus forte raison, Rom., iv, 17, est tout à fait en dehors de la question : il n’y est question que de rendre aux morts la vie corporelle, sans préjuger de l’état de leurs âmes.

Seul le récit de II Mach., xii, 43 sq., pourrait faire quelque difficulté. Ce texte possède une autorité incontestable quand il s’agit de rappeler qu’il ne faut jamais désespérer de la miséricorde divine à l’égard des pécheurs au moment de leur mort. Mais il ne faudrait pas en tirer de conclusion exagérée. L’auteur n’a jamais entendu affirmer que Dieu, grâce au secours des prières offertes par les vivants, allège les souffrances des pécheurs damnés. Mourir « après avoir péché » n’est pas nécessairement mourir « avec le péché » ; entre la faute et le jugement, il y a place pour le repentir, et le repentir est d’autant plus à présumer ici que la mort est intervenue dans un combat soutenu pour la cause de Dieu. Il est vrai que le texte rappelle que, sous la tunique des morts, on trouva des objets idolâtriques que la Loi interdisait aux Juifs ; mais il indique aussi expressément, à la décharge des coupables, qu’ils avaient été tués dans un combat livré pour la gloire du Seigneur ; et ce seul fait donne à penser que la miséricorde de Dieu avait pu s’exercer en leur faveur d’une manière plus pressante.

II. MlTIGATION DES PEINES DU PURGATOIRE.

1 "L’opinion de saint Thomas appliquée au purgatoire. D’après l’opinion autorisée de saint Thomas et de ses commentateurs, Dieu punit toujours avec miséricorde, n’infligeant pas au coupable toute la peine qu’il aurait méritée. Voir ci-dessus, col. 2005.

La mitigation véritable au purgatoire.

 Alors

que les peines éternelles sont, tout au moins dans leur intensité substantielle, très certainement fixes et sans mitigation possible, les peines temporaires du purgatoire semblent admettre une mitigation progressive qui rapproche toujours davantage de Dieu les membres de l’Église souffrante. Peu d’auteurs abordent ce sujet :

Sainte Catherine de Gènes n’en dit qu’un mot dans son Traité du purgatoire. Parlant de la joie qui accompagne chez les âmes du purgatoire la profonde, tristesse qui les accable, la sainte s’exprime ainsi : Je ne crois pas qu’on puisse trouver un contentement égal à celui des âmes du purgatoire, à moins que ce ne soit le contentement des bienheureux dans le ciel. Le contentement grandit chaque jour à mesure que Dieu pénètre dans cette âme, et il y pénètre à mesure que les obstacles qui s’y opposaient s’éoanouissent. » Cité par le P. Faber, Tout pour Jésus, c. ix, S 4.

Parmi les grands théologiens, Suarez a traité la question e.r projesso, In 1 II dm part. Sum. theol. S. Thom ; e.., disp. XI. VI, sect. iv, n. 7, ed.it. Vives, t. xxii, p. 922-923.

1. Exposé du problème par Suarez - « La peine du purgatoire diminue-t-elle par une rémission progressive ou bien demeure- !-elle toujours aussi intense jusqu’à la lin… La première opinion semble suggérée par certaines apparitions : dans la vie de Malachie, saint Bernard rapporte que sa sieur, une fois morte, lui apparut plusieurs fois, lui manifestant, dans son vêtement, tels signes extérieurs qui marquaient bien que, grâce aux prières de son saint frère, ses souffrances diminuaient d" jour en jour jusqu’à ce qu’elles cessèrent

complètement. (Une première fois, en effet, elle lui

apparut avec un vêlement noir et hors de l’église ; une seconde fois, avec un vêtement rouge, et en (leva du seuil de l’église ; une troisième fois, avec un

vêtement blanc et près de l’autel avec les autres saints. C’était là le signe de la délivrance.) On lit de semblables choses dans Bède et dans Denys le Chartreux, Dialogue du jugement particulier, a. 31. « L’opinion contraire se fonde sur la raison. Une chose est détruite selon le mode qui l’a engendrée. Or, la peine du purgatoire n’a pas progressé insensiblement, mais commencé dans toute son intensité, atteignant du premier coup tout le degTé qu’elle devait avoir. Donc, elle doit persévérer dans le même degré jusqu’à ce qu’elle cesse tout à fait. Si on objecte qu’au début la culpabilité existant dans sa plénitude, il fallait que la peine fût infligée dans toute son intensité, mais qu’ensuite la culpabilité diminuant, la peine doit également recevoir quelque atténuation, on répondra que c’est là une illusion. Dès le début, en effet, la culpabilité de l’àme impliquait une peine d’une durée déterminée ; la diminution de culpabilité grâce à la satisfaction déjà subie ne vise donc qu’à diminuer la durée, non l’intensité de la peine. Autrement, il faudrait dire que la même peine suffit à acquitter deux dettes simultanément. Donc, par les suffrages et les indulgences des vivants, la peine du purgatoire est diminuée quant à la durée, mais non pas adoucie dans son intensité. »

2. Solution de Suarez.

Deux aspects de la question : peine du dam c’est-à-dire de la tristesse ressentie par les âmes du purgatoire à cause du retardement de la gloire ; peine du sens.

a) « En ce qui concerne le dam, il semble bien quila tristesse des âmes du purgatoire diminue au fur et à mesure de leur expiation. L’objet de cette tristesse ne devient-il pas moindre progressivement ? Le délai de la gloire leur apparaît moins grand et de plus en plus la béatitude se rapproche d’elles : une telle perspective ne peut pas ne pas leur apporter quelque consolation. Aussi, les suffrages des vivants, diminuant beaucoup la durée de ce délai, apportent une grande consolation aux saintes âmes soutirantes, lorsqu’elles connaissent ces suffrages et leur elîet à leur endroit. Telle semble être la signification des révélations rapportées ci-dessus, et qui sont suffisant ment expliquées de cette manière.

b) Quant à la peine du sens, il semble plus probable qu’elle ne comporte aucune diminution progressive, surtout si on la considère en soi, abstraction faite d’une rémission extrinsèque par le moyen des suffrages de l’Église. La raison, en effet, qu’on a apportée tout à l’heure paraît démonstrative. Quelle cause assignerait-on à cette diminution, à cette rémission progressive, puisque toute la peine, prise dans sa durée totale, n’est que le juste châtiment de tel péché, et que ce péché en réclame l’accomplissement intégral ? « On pourrait peut-être imaginer qu’au purgatoire, à des péchés différents correspondent des peines différentes ou tout au moins des degrés différents de la même peine du feu. et qu’ainsi la peine due pour un péché, une fois subie, fait place à une peine moins intense due à un autre péché. De la sorte on expliquerait que parfois il put y avoir diminution de souffrance. Quoi qu’il en soit, ce mode de mitigation ne paraît pas s’imposer. Il semble plus probable qu’à la multitude des jiéchés commis et insuffisamment réparés sur la terre corresponde une dette unique, laquelle exige telle peine déterminée pendant telle durée, et que cette peine s’accomplit avec la même intensité de souffrance pendant toute la durée qu’elle comporte. Toutefois, il se pourrait, que <lans certains cas (interdiim ) la peine du sens même reçoive une diminution

dans son intensité grftce, aux suffrages de l’Eglise. Il nous paraît plus probable que c’est plutôt une diminution dans la durée qu’apportent ces suffrages, et