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    1. MIRACLE##


MIRACLE, DÉFINITION TRADITIONNELLE

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Joa., v, 20, 36 ; vii, 3, 21 ; ix, 3, 4 ; x, 25, 32, 37, 38 ; xi, 12 ; xv, 24, etc.

Après la Pentecôte, les apôtres, eux aussi, opèrent prodiges et miracles, -rspocTa 7rat cr/^etoc, Act., ii, 43 ; v, 12 ; vi, 8 ; viii, 6 ; xiv, 3, surtout des guérisons de malades et de possédés, v, 15 ; xiv, 7-9 ; xxviii, 8, 9. On oppose les csry.eïoi xal Suvâjjteiç [xsyâXaç des apôtres aux ^aytatç de Simon, viii, 13, cꝟ. 11, dans lesquelles cependant le peuple avait cru reconnaître

la grande puissance > de Dieu ». I.cs miracles. Suvâcisiç, de Paul sont également rapportés directement à Dieu, xix. 11.

On a déjà vii, cf. Jésus-Christ, col. 1191 sq., que les miracles accomplis par le Sauveur étaient en connexion implicite ou explicite avec la personne, l’enseignement et la mission du Christ. Les miracles accomplis par les apôtres sont présentés comme accomplis en vue d’attester la vérité de la prédication chrétienne. Marc, xyi, 20 ; Act., xiv, 3 ; cf. xix, 11. D’ailleurs, chaque fois que les Actes signalent les miracles et prodiges accomplis par les apôtres, ils affirment que ces prodiges alïermissaient les fidèles et facilitaient la prédication de l’Évangile. Act., ii, 43 ; v, 11, 13-14 ; vi, 7 ; viii, 6-12, 13.

Les livres inspirés rapportent à la puissance divine elle-même les miracles accomplis par le Christ et les apôtres. Le terme Sûvocluç est, à cet égard, caractéristique. En ce qui concerne les apôtres, c’est Dieu ou le Christ qui agit par eux. Marc, xvi, 20 ; Act., m, 6 ; ix, 34 ; xiv, 3 ; xix, 11. Quant aux miracles du Christ, nous avons fait observer ailleurs qu’il y a deux séries parallèles de textes, ceux où il apparaît que Jésus opère des miracles de sa propre autorité ; ceux où Jésus agit « par l’Esprit » ou « par le doigt de Dieu ». En ce qui concerne les guérisons de possédés, Jésus marque expressément qu’il agit, non par la vertu de Belzébub, mais par l’Esprit (de Dieu). Matth., xii, 25-28. Les deux points de vue s’harmonisent dans le dogme de l’union hypostatique : en Jésus, la divinité agit comme cause principale ; l’humanité comme cause instrumentale. Voir Jésus-Christ, col. 1195. En bref, les données de l’Écriture se résument en trois points : le miracle est un fait extraordinaire dépassant l’ordre habituel des phénomènes naturels ; il est en connexion avec un enseignement religieux dont il atteste la vérité ; il est l’œuvre de la toute-puissance divine, agissant soit immédiatement, soit médiatement.

Données de la Tradition.


1. Avant saint Augustin. —

Les écrivains ecclésiastiques des quatre premiers siècles, principalement les Pères apologistes, se contentent le plus souvent de rappeler que les miracles opérés par le Christ prouvent sa divinité. Quadratus, dans Eusèbe, H. E., t. IV, c. iii, P. G., t. xx, col. 308 ; Méliton, Fragm., vii, P. G., t. v, col. 1221 ; S. Éphrem, Hymni dispersi, xv, 1, éd. Lamy, t. iv, p. 730 ; S. Épiphane (à propos du miracle des noces de Cana), tJser., li, n. 30, P. G., t. xli, col. 941.

Parfois quelques précisions éclairent la notion du miracle. Origène considère les miracles du Christ comme un critère extérieur de la révélation, et, par le but religieux auquel ils tendent (salut des âmes, réforme des mœurs, culte divin), les différencie des prestiges magiques. Cont. Celsum, I, lxviii ; II, iv ; III, xxvii, P. G., t. xi, col. 788, 892, 953. Arnobe se contente de déclarer que les magiciens ne pourraient faire la millième partie de ce qu’a fait le Christ. Adv. nationes, I, xi.m, P. L., t. v, col. 779. Saint Grégoire de Nysse déclare que ces miracles portent la marque de la puissance divine. Oral, cal., n. 11-12, P. G., t. xlv, col. 44.

Saint Justin démontre l’origine divine des miracles de l’Évangile par les prophéties qu’ils accomplissent.

Apol., i, 30, P. G., t. vi, col. 376. Tirtullien rapproche pareillement les miracles des prophéties, opposant par là aux Juifs un argument ad hominem. Adu. Judo-os, c. ix, P. L., t. ii, col. 616. Dans ses controverses contre les païens, Tertullien recourt au témoignage des miracles, et prouve que les miracles de l’Évangile sont discernables des faux miracles, en raison de leur conformité avec les miracles de l’Ancien Testament, car Dieu a préludé par les prophéties aux œuvres merveilleuses de son Christ. Adv. Marcionem, III, m : IV, xxxix, P. L., t. ii, col.’.i’24, 455.

2. Saint Augustin. —

Saint Augustin paraît bien être le premier qui ait donné une définition expresse du miracle. Mais la notion qu’il se fait du miracle dépasse sa définition.

Le terme miracle est tout d’abord employé par Augustin dans un sens très large, et il s’applique tant aux miracles proprement dits, qu’aux prodiges réels ou apparents opérés par les anges, les démons, les magiciens ou attribués aux fausses divinités du paganisme ; bien plus on peut appeler miracles les phénomènes, naturels ou non, présentant quelque aspect merveilleux. Ce sont les miracula quotidiana du cours naturel des événements, et auxquels conviennent également quantité d’autres expressions, synonymes de miracle, et qu’emploie couramment Augustin : signa, prodigia, virtutes signorum, monstra, magnolia, mirabilia, ostenta, mira, portenta. Sur tous ces points, voir Van Hove, La doctrine du miracle chez saint Thomas, Paris, 1927, p. 27-28. Néanmoins, Augustin fait une place spéciale au miracle proprement dit. Sa définition : miraculum voco quidquid arduum est aut insolitum supra spem vel facultatem mirantis apparet, De utilitate credendi, xvi, 34, P. L., t. xlii, col. 90, paraît sans doute inclure les phénomènes simplement merveilleux ; mais le point de vue extérieur de l’étrangeté, seul signalé ici, se complète en réalité, dans la pensée d’Augustin, du point de vue objectif de l’intervention spéciale de Dieu. Cf. De Gen. ad lilteram, IX, xv ; xviii ; t. xxxiv, col. 403 ; Enar. in Jca., tract, vm, 1-3, 9 ; ix, 1 ; xvii, 1 ; xxiv, 1 ; xci, t. xxxv, col. 1450, 1456, 1458, 1527, 1592, 1860-1862 ; Enar. in ps., ps. xc, 6 ; xciii, 8 ; ex, 4 ; cxxx, 6, t. xxxvii, col. 1164, 1199, 1465, 1707 ; Serm., cxxvi, 3-4 ; cclxii, 1 ; ccxlvii, 2, t. xxxviii, col. 699, 1139, 1158 ; De cii : Dei, X, xii : XII, xxvii ; XXI, viii, 2-3 ; XXII, vin-x, t.xii, col. 291, £76, 721, 7C8-772 ; Contra Fauslum, XXVI, m ; XXIX, iv : De Trinitate, III, iv-vi, t. xlii, col. 481-490, 874-875.

Pour être fixé sur la pensée complète d’Augustin, il faut donc « tenir courte tant du point de vue objectif de l’intervention spéciale de Dieu que du point de vue plus extérieur de l’étrarjeté. La définition du miracle donnée par saint Augustin ne comjrerd doncpas tous les éléments qui font, chez le mime auteur, partie de la véritable notion du fait miraculeux. Il faut donc soigneusement distinguer ici notion et définition. » Van Hove, op. cit., p. 31. Trop d’auteurs en sont restés à la définition, par exemple : J. Martin, Saint Augustin, Paris, 1907, p. 326 ; R. Seeberg. art. Wunder, dans Prot. Realencyklopàdie, t. xxi, p. 560, et surtout A. Sabatier, Esquisse d’une philosophie de la religion, Paris, s. d., p. 75, et jadis Kout te ville, La religion chrétienne prouvée par les faits, Amsterdam, 1744, t. ii, 1, I, c. vi, p. 37-38. Cf. J. Grange, Le miracle d’après S. Augustin, Brignais, 1912.

Il reste néanmoins vrai que, pour Augustin, il n’est pas absolument nécessaire que le miracle soit un fait proprement divin : n’importe quel fait extraordinaire, en relation voulue par Dieu avec les circonstances religieuses, suffit à provoquer chez l’homme l’attention en faveur de la vérité. No.us retrouvons peut-être ici un vestige du point de vue d’Origène. Augustin