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1799

MIRACLE, NOTION

1800

c. m. De Fide, et can. 3. Denz.-Bannw., n. 1624, 1790, 1813. Ce canon nous intéresse immédiatement, car il trace au théologien la marche à suivre dans l’exposé de la doctrine catholique du miracle :

Si quis dixerit niiracula Si quelqu’un dit que les nulla fieri posse, proindeque miracles ne sauraient aucuomnes de iis narrationes, nement être possibles ; et etiam in sucra Scriptura conqu’en conséquence les récits tentas, iuter tabulas vel qu’on en fait, même s’ils sont mythos ablegandas esse ; aut consignés dans la sainte niiracula certo cognosci mm- Écriture, doivent être reléquam posse ; nec iis divinam gués parmi les fables et les religionis christianæ origimythes ; ou que les miracles nem rite probari posse, a. s. ne peuvent être connus avec Cf. Syllabus Pii IX.prop. 7 ; certitude, et que l’origine Denz.-Bannw., n. 1707. divine de la religion chré tienne peut trouver en eux

une démonstration probante,

qu’il soit anathème.

De cette déclaration, on doit rapprocher le passage suivant du serment antimoderniste de Pie X :

Externa revelationis arJ’admets et reconnais gumenta hoc est facta divina comme des signes très cerin primisque niiracula et tains de l’origine divine de la prophetias admitto et agnosreligion chrétienne les arguco tanquam signa certissima ments externes de la révédivinitus ortse christiana> lation, et principalement les religionis, eademque teneo miracles et les prophéties ; je aetatum omnium atque homiles considère comme étant num, etiam hujus temporis, très appropriés à l’intelliintelligentise esse maxime acgence des hommes de tous commodata. Denz.-Bannw., les temps, et même de l’épon. 2145. que actuelle.

D’où la division de cette étude : I. Notion. II. Possibilité (col. 1812). III. Constatation (col. 1838). IV. Valeur probante (col. 1850).

I. Notion.

Données du magistère.

On ne s’étonnera pas que nous demandions d’abord à l’argument d’autorité les premières précisions relatives à la notion catholique du miracle. La constitution Dei Filius n’a pas défini le miracle ; mais elle a indiqué quelques-uns des éléments qu’il suppose.]

ri fidei nostræ obsePour que l’hommage de

quium rationi consentaneum notre foi fût d’accord avec la

esset, voluit Deus cum interraison, Dieu a voulu ajouter

nis Spiritus sancti auxiliis aux secours intérieurs do

externa jungi revelationis l’Esprit-Saint des arguments

suæ argumenta, facta sciextérieurs de sa révélation,

sicet divina atque imprimis c’est-à-dire des faits divins,

niiracula et prophetias, quæ et notamment les miracles

cum Dei omnipotentiam et et les prophéties, qui, parce

infinitam scientiam Iuculenqu’ils manifestent excelle ter commonstrent, diviiuv ment la lou ! e-puissance de

revelationis signa sunt c’erDieu et sa science infinie,

lissimæt omnium intelligensont de la révélation divine

tise accommodata. des signes très certains et

C. III, De fide. Denz.- appropriés à l’intelligence de

Bannw., n. 17 !)i>. tous.

Dans ces textes le magistère propose quatre élé" mcuts du miracle : 1. Les miracles ont pour cause Dieu, car ils sont des facta divina, manifestant par leur origine la toute-puissance et l’infinie sagesse de Dieu : par là se trouvent éliminés tous les faits simplement merveilleux, angéliques ou diaboliques. — 2. Les miracles tranchent par leur caractère même sur les effets proport ion nés aux causes naturelles qui les produisent : « Pour être « les preuves extérieures et des signes certains de la révélation, il faut que leur caractère divin suit incontestable ; or, pour cela, il ne sullil pss qu’ils aient été produits par Dieu, il faut encore qu’ils se délacheiil comme des faits manifestement divins, dans la trame des phénomènes naturels, qui seuls

tombent sous notre expérience ordinaire ; et, pour se détacher dans cette trame comme des faits divins, il est nécessaire qu’ils se subst it uent à d’autres faits qui auraient dû naturellement se produire, et qu’ils manifestent ainsi 1 intervention de la toute-puissance de Dieu qui seule est supérieure à toutes les forces de la nature. Vacant, Eludes théologiques sur les Constitutions du concile du Vatican, Paris, 1895, t. ii, l>. 12. 3. Les miracles (entendus ici par le concile comme signes de la vérité de la révélation) sont un moyen dont Dieu se sert pour manifester la révélation : o Par le contraste qu’il y a entre ce fait divin et les faits naturels dans la trame desquels le miracle s’intercale, (le miracle) appelle notre attention, il devient aux mains de Dieu un signe pour nous manifester ce qu’il lui plaît, c’est-à-dire ce qu’il veut nous révéler, que ce soit une chose d’intérêt particulier, comme la sainteté d’un personnage ou une révélation privée, ou que ce soit une chose d’intérêt général, comme la révélation chrétienne. » Id., p. 43. — 4. Lue dernière condition du miracle, qui se rattache à son caractère de signe reconnaissable pour tous, c’est qu’il soit sensible sous quelque rapport. Externa argumenta, dit le concile. Cette condition est absolument requise pour que le miracle soit une preuve extérieure, certaine et appropriée à l’intelligence de tous.

Deux remarques s’imposent. 1. Le concile n’a en vue ici que les miracles destinés par Dieu à prouver la crédibilité de la révélation ; c’est pourquoi il ne s’occupe pas des faits divins, requérant la toute-puissance de Dieu, comme l’incarnation et la transsubstantiation, mais qui ne sont pas des moyens sensibles employés pour manifester la vérité révélée. — 2. Le concile distingue ici miracle et prophétie, marquant par là qu’il réserve le terme miracle pour désigner exclusivement les faits divins et préternaturels qui appartiennent à l’ordre physique ou matériel.

Données de l’Écriture sainte. En parlant des miracles accomplis en faveur de la révélation, le concile du Vatican relève les miracles de Moïse, des prophètes, mais surtout de Notre-Seigneur Jésus-Christ et des apôtres. Id., ibid., Denz.-Bannw., n. 1790. Il nous suffira de considérer ici les termes dont l’Écriture s’est servie pour désigner les miracles accomplis par le Christ et les apôtres. Nous pourrons en tirer quelques éléments destinés à fixer la notion du miracle.

Que Jésus ait accompli un très grand nombre de miracles, l’Évangile l’atteste sans qu’aucun doute demeure possible. Voir Jésus-Christ, t. vii, col. 1189. Les noms dont se servent les écrivains sacrés pour désigner ces miracles marquent bien leur caractère exceptionnel, surnaturel. Ce sont des prodiges, répara : encore que ce nom soit commun aux miracles de Jésus et aux prodiges des faux prophètes, Matth., xxiv, 24 ; Marc, xiii, 22 ; cependant, pour désigner spécialement les miracles du Sauveur, le mol est accompagné d’autres qualificatifs qui excluent l’idée d’un pur prodige, uniquement destiné à éblouir les foules : Matth., et Marc, toc. cit. ; cf. Joa., iv, 48. Ce sont des faits merveilleux, Oa>j(j.âo-’.a, Mal th.. xxi, 15 ; des faits étranges, 7rapâSo^a, Luc, v, 26. Les miracles reçoivent aussi le nom de 8jvô.[iziç. forces, parce qu’ils manifestent une puissance supérieure à la puissance des hommes ; Matth., xi. 20, 21, 23 ; xiii, 54, 58 ; xiv, 2 ; Marc, vi, 2, 5, 14 ; ix, 39 (Vulg.. 38) ; Luc, x, 13 ; xix, 37. Ce sont aussi des signes, arjizloi, à cause de leur relation avec la vocation messianique de Jésus, qui se trouve être par eux contresignée. C’est surtout en saint Jean qu’on trouve celle expression, il, 11, 18, 23 ; iii, 2 ; iv, 48, 54 ; vi. 2. 1 I, 26, 30 ; vu, 31 ; i, 11’. ; x, 41 ; xi, 17 ; xii, 18, 37 : xx, 30, bien qu’on la rencontre déjà assez fréquemment chez les Synoptiques : Matth., xii, 38, 39 ; xvi, l, l ; xxiv, 24 ; Marc, viii, 11. 12 ; xiii, 22 ; xvi, 17, 20 : I.uc, xi, 10, 20..’M ; iii, S. Saint Jean emploie aussi une autre expression, qui lui est propre, £pya, les œuvres.