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sont conçues et présentées d’un point de vue essentiellement oriental et antiromain ; mais on y trouve, du moins, une grande clarté d’expression, et cette qualité, assez, rare dans la foule des controversistes grecs, confère au petit recueil d’Elie Miniatis une incontestable supériorité sur des ouvrages de bien plus considérable étendue. Visiblement préoccupé de fournir un manuel de facile consultation, l’auteur a même pris soin de diviser chaque chapitre en paragraphes numérotés. A signaler notamment, au n° 2 du chapitre sur la primauté du pape (celle des cinq divergences qui est de beaucoup la plus longuement traitée), éd. d’Athènes, 1811, p. 81-82, un énoncé de la doctrine grecque sur le gouvernement ecclésiastique qui a l’avantage de préciser nettement les positions de part et d’autre. Sur bien des points, l’enseignement catholique est souvent mal compris ou déformé. On s’étonne, par exemple, qu’un esprit aussi lucide ait pu prendre le nombre « d’années ou de jours d’indulgence » pour le délai fixé à l’entrée des âmes en paradis (n° 7 du dernier chapitre, éd. d’Athènes, 1811, p. 133). Vers la fin de sa relation historique, au n° 38 (p. 59), Miniatis résume les origines du schisme en ces termes qui révèlent bien toute sa pensée : « Tout ce grand mal a été causé au début par les passions humaines, une des deux factions [ignatienne et photienne ] voulant abattre l’autre. Elles appelèrent au secours l’Église occidentale, qui en prit occasion pour s’efforcer d’étendre sur l’Orient cette même autorité qu’elle revendique jusqu’aujourd’hui. Le mal s’accrut avec l’affaire des Bulgares, et, comme il arrive dans la discorde de deux partis, où chacun reproche à l’autre le moindre défaut, il s’ensuivit la logomachie sur les dogmes, ëxÇi yjxoXoûôyjos xai r) rapl 80yu.dcTCûv Xoyoj. a.yia.. C’est celle-ci qui fit le grand schisme entre Orientaux et Occidentaux, séparant complètement l’une de l’autre les deux Églises. » Pour ce qui est des divergences, l’auteur avoue (p. 78) qu’au début il n’y en avait qu’une seule de quelque importance, le Filioque ; mais maintenant, ajoute-t-il (p. 79). la plus grave pratiquement est celle de l’autorité du pape.

Signalons une réfutation catholique de la IIÉTpa axavSâXou. Cette réfutation, dont l’auteur est Marco Antonio Gregorina, chanoine de Cattaro, fut imprimée à Naples, en 1764, bien qu’elle ne porte aucune indication de lieu ni de date : Panoplia per i Greci in cui si dà un saggio del libro mss. intitolato Pietra dello scandalo. H. Pernot, Bibliographie ionienne, Paris, 1910, n° 377, p. 117.

2. AtSa/al. — Le second ouvrage d’Élie Miniatis, posthume comme le précédent, est le recueil de ses prédications : AiSa^al stç tyjv àyîav xal (i.EyâX7)v T£aaapaxoaT’/)v xal etç aXXaç xupiaxàç toù èvLauToû xal È7tiaY)[i.ouç éoprâç, p-exà xal tivwv TOXV7)yupt.xà>v X6ycov, nombreuses éditions : Venise, 1727 (Lcgrand-Pernot-Petit, Bibliogr. hell, xviii » s., t.i, p. 205-206, 268-269), L755, 1763, 1772, 1778, 1781, 1793, 1800, 1801, 1849 ; II. Pernot, Bibl. ion., passim. (Quelques discours italiens avaient été publiés dès 1717 à Venise : Due prediche sacree quattro orazioni ritrovate sole délie molle già Julie anche in lingua italiana dal ju’Monsignor i’.lia Mignati…, I.cgrand-Pcrnot-Petit, op. rit., p. 1 10-143.)

Celte di rnière édition (1849) publiée par les soins de l’archimandrite Anthime Mazarakès, se présente comme la plus complète de toutes, parce qu’elle renferme un certain nombre de discours ou de fragments en italien, inconnus des précédentes éditions ; nous dirons pourtanl toul à l’heure que sur un point doctrinal Important, elle est bien inférieure à ses devancières. Elle a été réimprimée à Venise en 1859, d’après Pernol, Bibl. ionienne, n° 2030. On le voit, les sermons de Miniatis, après avoir été très remarqués de son vivant,

ont eu un véritable succès de librairie. La clarté de la composition, la bonne ordonnance des divisions et des développements, malgré quelques comparaisons un peu forcées et certaines allusions mythologiques d’un goût douteux, laissent deviner que le prédicateur grec a utilement fréquenté l’Italien Segneri et nos grands orateurs français. On y trouve, entre autres, sur la confession et ses qualités, l’examen de con science, la sincérité et l’intégrité, la contrition, le ferme propos, des notions précises qui manquent trop gêné ralement aux sermonnaires grecs ; de même, sur la préparation à la communion, sur ce qu’il convient de demander dans la prière, etc. Pour employer un mot très aimé des Grecs, ce sont vraiment des Xôyoi ijur/coçeXeïç. Mais ce qui a, en outre, beaucoup contribué à leur vogue, c’est la langue originale et savoureuse en laquelle ils ont été écrits et prononcés. Triomphant des préjugés courants chez ses compatriotes, Miniatis n’a pas craint d’abandonner la langue artificielle, intermédiaire entre le grec ancien et l’idiome communément parlé de nos jours, et d’adapter à la chaire la langue du peuple. Cette langue, il la manie d’ailleurs avec une réelle maîtrise ; et Krumbacher, bon juge en l’espèce, n’hésite pas à écrire que « Mèniatès a utilisé d’une manière géniale l’idiome populaire pour son éloquente et entraînante prédication. » Das Problem. der neugr. Schriftsprache, Munich, 1902, p. 211, note 86. Le recueil entier ou, du moins, un certain nombre de sermons ont eu les honneurs de traductions roumaine (Bucarest, 1742 ; cf. I. Binau et N. Hodos, Bibliografia romaneasca veche, t. ii, Bucarest, 1910, p. 57-00), russe (Pétrograd, 1775 ; cf. M. Jugie, Theologia dogmatica christianorum orientalium dissidenlium, t. i, Paris, 1926, p. C01) et sans doute d’autres encore.

Un point qui mérite d’être spécialement relevé dans les sermons d’Élie Miniatis, c’est la doctrine de l’immaculée conception de la sainte Vierge, qu’il formule très nettement et à plusieurs reprises. Le fait a été signalé par S. Pétridès, L’immaculée conception et les Grecs modernes, dans les Échos d’Orient, t. viii, 1905, p. 265-266, puis ici par M. Jugie, art. Immaculke-Conception, t. vii, col. 968. Mais l’un et l’autre n’ont cité et utilisé que l’édition de 1819, et, chese plus grave dans le cas présent, sans en avoir lu les préfaces qui présentent cette édition comme volontairement lacuncuse sur ce sujet. En effet, dès l’avant-propos (p. 8’), l’archimandrite Mazarakès relève comme une erreur de jeunesse à corriger dans les premiers discours de Miniatis l’affirmation Ôti tj ©sotôxoç auveXyjçGy) xal èyevv7)07) aveu toû TcporoxTopixoû porcou. Plus loin (p. xe’-xÇ’) nous trouvons la lettre de l’éditeur, datée du 8 septembre 1848, proposant au patriarche œcuménique les corrections, c’est-à-dire les suppressions, à opérer, avec la réponse approbalive d’Anthime IV, en date du Il février 1819.

De fait, en comparant les passages de l’édition de IN I’.) cités par S. Pétridès et M. Jugie avec les passages correspondants d’une édition antérieure, celle de 1804 par exemple, il est facile de constater les suppressions opérées. Ajoutons, qu’elles ont été opérées assez maladroitement pour laisser encore toute sa valeur à l’argumentation catholique de l’immaculée conception Si le « correcteur » a enlevé une page entière, très explicite il est vrai, au premier sermon pour la Nativité de la Vierge (comparer édition de 1801, p. 337338, avec édition de 1849, p. 248), il y demeure encore assez d’idées et d’expressions pour conclure à l’affirmation (lu privilège mariai Dans le 2° sermon pour l’Annonciation (p. 257, col. l) dans le 2e’pour la Présentation (p. 271, col. 2), l’édition de 1849 a brutaleini’i I supprimé la formule 81/coç (SÛ7tou 7rp07W(Topt.xoû uTatou-aiot ; (comparer édit, de 1804, p. 33’.). col 2