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MIGNE, LES PATROLOGIES

lique. Il choisit pour cela des fragments de cent dix-sept auteurs. Malheureusement, après avoir donné quelques ouvrages de Tertullien, Origène, Eusèbe de Césarée et saint Augustin, il passe immédiatement à Montaigne. Quelques auteurs bien choisis, allant du ve au xvie siècle, auraient permis de suivre tous les progrès de la polémique chrétienne. C’est avec raison qu’une place importante a été faite aux apologistes modernes, tels que Wiseman, Milner, Chassey, etc… ; Migne fait même appel au témoignage de protestants, tels que Leibniz, Jacquelot, Saurin, Keith, et à celui de philosophes antichrétiens, comme J.-J. Rousseau. Le t. xviii contient avec des tables très soignées, un traité, Révision des Démonstrations évangéliques, par les éditeurs, comprenant les doctrines hérétiques des auteurs non orthodoxes dont on s’est servi, et, de l’abbé Chassay, un Tableau des apologistes chrétiens depuis la Renaissance jusqu’à la Restauration, indiquant le degré de confiance dont ils jouissent auprès des critiques accrédités, en spécifiant leurs ouvrages.

d) En 1844, commençait une nouvelle publication, celle des Orateurs sacrés, en deux séries, dont il suffit de donner le titre, pour en faire saisir l’importance, au point de vue de l’histoire de la prédication en France, du xvie au xixe siècle. La première série comprend 66 volumes : Collection intégrale et universelle des Orateurs sacrés du premier et du second ordre, et collection intégrale ou choisie de ceux du troisième ordre, publiés selon l’ordre chronologique, afin de présenter, comme sous un coup d’œil, l’histoire de la prédication en France, pendant plus de trois siècles, avec ses commencements, ses progrès, son apogée, sa décadence et sa renaissance. La seconde série, de 33 volumes, parut de 1856 à 1866. Elle renferme : 1o  les œuvres oratoires des prédicateurs qui ont le plus illustré la chaire française depuis 1789 jusqu’à nos jours ; 2o  les plus remarquables mandements ou discours de la plupart de nos seigneurs archevêques ou évêques de France, de Savoie et de Belgique ; 3o  les sermons de vingt-cinq des prédicateurs contemporains les plus distingués ; 4o  la collection des meilleurs prônistes anciens et modernes ; 5o  une série d’ouvrages sur les règles de la bonne prédication. La collection complète devait comprendre cent deux volumes ; le 100e était sous presse, quand se produisit l’incendie de 1868.

e) En même temps que la première série des Orateurs sacrés, paraissait la première des Encyclopédies théologiques, ainsi annoncée : Première encyclopédie théologique ou série de Dictionnaires sur toutes les parties de la science religieuse, offrant en français et par ordre alphabétique, la plus claire, la plus facile, la plus commode, la plus variée et la plus complète des théologies, 50 tomes en 52 volumes, 1844-1852. De 1851 à 1859, parut une Nouvelle encyclopédie théologique de 52 tomes en 53 volumes, et de 1855 à 1859 une Troisième et dernière encyclopédie théologique, en 66 volumes ; soit, en tout, 171 volumes de Dictionnaires sur toutes les branches des sciences tant humaines que divines. D’anciens ouvrages sont reproduits dans cette collection, mis au courant des découvertes et des résultats récents de la science, par des notes ou appendices : c’est le cas du Dictionnaire de théologie dogmatique de Bergier, mis en rapport avec les progrès des sciences actuelles, par l’abbé Pierrot. Mais la plus grande partie est due à des auteurs contemporains. C’est la partie la plus neuve de l’œuvre de Migne ; mais c’est aussi celle qui a le plus perdu de sa valeur : des travaux de ce genre ont fréquemment besoin d’être révisés et mis à jour. Certains de ces dictionnaires peuvent cependant rendre encore de grands services, tel le Dictionnaire des Apocryphes de l’Ancien Testament et du Nouveau Testament, t. xxiii et xxiv de la Troisième Encyclopédie.

f) Pour illustrer ces collections relatives à la science religieuse, Migne fit entrer dans ses publications un Cours complet d’histoire ecclésiastique, en 27 volumes. Les dix-sept premiers volumes sont l’œuvre de Henrion. et vont de la période des origines jusqu’au pontificat de Pie IX. Après la mort de Henrion, en 1862, l’abbé Vervoost continua la publication, à partir de 1849.

g) Enfin aux collections de quelque importance se rattache la Summa aurea de laudibus B. Mariæ virginis, en 13 volumes, dont la publication commença en 1866. Ce recueil comprend les écrits importants sur la Mère du Sauveur, qui n’avaient pas leur place dans les Patrologies, comme ceux d’Albert le Grand, de Canisius, de Suarez, de Trombelli, de Benoît XIV et de Malou.

Ainsi, en quelques années, de 1838 à 1844, Migne avait commencé, sinon terminé, la publication de collections qui devaient contenir ensemble près de quatre cents volumes, sans compter les éditions d’intérêt moindre, dont nous parlerons plus loin (cf. œuvres diverses). Entre temps, il avait dressé le plan de ce qui devait être son œuvre la plus importante à tous égards et la meilleure, sa Patrologie, dont les premiers volumes devaient paraître en 1844. Une première publication patristique, en dehors de la Patrologie, avait déjà paru en 1842, concernant les ouvrages de saint Augustin et de saint J. Chrysostome : Sancti Aurelii Augustini Hipponensis episcopi opera omnia post Lovaniensium theologorum recensionem castigala denuo ad manuscriptos codices gallicanos, vaticanos, belgicos… necnon ad editiones antiquiores et castigatiores, opera et studio monachorum ordinis sancti Benedictie congregatione S. Mauri, editio novissima, emendata et auctior, accurante M***, Il volumes divisés en 16 tomes. L’édition de saint Jean Chrysostome, 10 volumes divisés en 13 tomes, porte un titre identique : Sancti Joannis Chrysostomi archiepiscopi Constantinopolitani opera omnia… Cette édition ne comprend que la traduction latine. L’éditeur utilise le texte des bénédictins, en tenant compte des critiques qui avaient été faites, mettant les notes au bas des pages, donnant, en quelques endroits, un ordre nouveau aux matières contenues dans les anciens volumes.

2. Les Patrologies. — a) But et plan de l’éditeur. — Pourquoi une nouvelle édition des Pères de l’Église ? Dans un prospectus de 1864, Migne répond à cette question : « Le prix démesuré et toujours croissant des anciennes éditions, le besoin de plus en plus sérieux de recourir aux sources, surtout dans les investigations religieuses, le réveil de la science ecclésiastique et la restauration catholique du passé, rendent indispensable une nouvelle édition des Pères. » Ann. de philos. chrét., t. lxix, p. 78. Il veut donc mettre à la disposition des travailleurs l’ensemble des documents qui constituent la tradition catholique, œuvres des écrivains ecclésiastiques des douze premiers siècles.

Pour atteindre ce but, il réunira dans une première collection les écrivains latins et, dans une seconde, les écrivains grecs. Bonnetty a critiqué cette division, laissant supposer qu’il y a deux traditions, celle de l’Église latine et celle de l’Église grecque. Il aurait préféré une division fondée sur le lieu où ces écrivains ont écrit et enseigné, et non sur la langue qui nous a conservé leur enseignement. Cf. Ann. de philos. chrét., t. xxxiii, p. 395-396. Le plan adopté par Migne se justifie très bien : c’est celui qui est adopté actuellement pour les publications patristiques de Berlin et de Vienne, la première consacrée aux écrivains grecs, la seconde aux écrivains latins.

L’ordre suivi sera l’ordre chronologique. Aux œuvres des Pères, l’éditeur ajoutera les travaux, les disserta-