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rable. Le P. Michaëlis en fut nommé prieur, en 161C, lorsqu’il revenait à Paris, après avoir tenu, à Saint-Maximin, le premier chapitre de sa congrégation et fait nommer le P. Girardel pour son successeur au vicariat général. Il ne put achever le temps de son priorat ; il mourut le 5 mai 1618, montrant jusqu’à la fin le zèle le plus tenace pour l’étude, la liturgie, les saintes observances. Il laissa à ses fils comme testament ces paroles, qui résument si bien sa vie, sa pensée, son œuvre tout entière : Seroire Deo assidue ; servare constitutiones exacte ; solitudinem cellæ et claustri custodire.

II. Conséquences doctrinales de la réforme du P. Michaëlis. — Le simple retour à la plus stricte observance des constitutions dominicaines ne pouvait manquer d’avoir d’importantes conséquences, même dans l’ordre doctrinal, étant donnée la place de choix, réservée à l’étude dans la législation dominicaine : « C’est une chose assez connue, remarque judicieusement le Père Souèges qui a vécu avec les disciples immédiats du réformateur, qu’il n’y a point de province, dans tout l’ordre, où on étudie mieux que dans les réformées ; car… comme on y inspire un désir plus ardent de l’observance générale des règles et que celle des étudians porte de lire ou de méditer continuellement dedans et dehors le couvent, et d’apprendre par cœur tout ce qu’on pourra, pour mieux exercer la mémoire, c’est une chose toute évidente que dans l’ordre de saint Dominique, estre véritablement réformé, ou pour parler plus clairement, grand observateur de ses règles, et estre sçavant, sont comme deux termes synonimes, qui signifient la mesme chose. »

Le P. Michaëlis est lui-même une illustration vivante de cette remarque. Echard souligne l’excellence de son savoir théologique : Scholasticæ polemicœque atque etiam affectivæ theologiæ præstantia sublimioribus sui sévi doctoribus conspicuus, et il ajoute qu’il était redouté des hérétiques. Dans toutes les discussions publiques avec les ministres calvinistes, il l’emportait de beaucoup par sa science des Écritures, sa vaste érudition, sa connaissance des langues hébraïque et grecque ; aussi les huguenots de Montpellier, avec lesquels il disputa souvent et toujours avec avantage durant les années 1595-1598, essayèrent-ils, mais en vain, de le faire disparaître. Ajoutons qu’il fut un orateur puissant.

Pourtant, le principal titre de gloire du P. Michaëlis est d’avoir été, par sa réforme même, le chef d’un mouvement doctrinal, qui a donné à l’ordre de saint Dominique, quelques-uns de ses plus grands philosophes et théologiens. Qu’il suffise de les nommer ; on trouvera pour chacun d’eux des notices plus détaillées dans ce dictionnaire.

Jean-Baptiste Gonet (1616 env.-1681), fils du couvent de Bézicrs, donné aux réformés en 1603, et relevé de ses ruines dans les années qui suivirent. Ardent défenseur du thomisme contre les attaques de ses adversaires, Gonet est surtout célèbre par son Clypeus theologiæ thomisticse contra novos ejus impugnatores, et son Manuale thomistarum. Voir ici, t. vi, col. 1487-1489.

Vincent Baron (1604-1674) du couvent réformé de Toulouse, lui aussi célèbre défenseur du thomisme en un temps où l’on voulait l’assimiler au jansénisme et l’englober dans la même réprobation. Assistant au chapitre général de 1655, il y entendit Alexandre VII exhorter les théologiens à lutter contre les nouveaux principes de morale relâchée, introduits par certains auteurs : ce fut sans doute ce qui engagea le P. Baron à travailler aux ouvrages que, de 1660 à 1675 surtout, il composa sur cette matière et dont on trouvera la liste complète ici, t. ii, col. 425.

Vincent Contenson ou Contensous (1641-1674),

gagné à l’ordre par les prédications du P. Baron, et du même couvent de Toulouse ; auteur de la Theologia mentis et cordis, exposé simple et clair de la plus pure doctrine thomiste (speculationes) accompagné de considérations (reflexiones) utiles à la vie spirituelle comme à la prédication. Ici t. iii, col. 1631-1633.

Antonin Béginald (1605 env.-1676), « le fléau des adversaires de saint Thomas », qui fit profession, au couvent réformé d’Avignon, entre les mains du P. Guillaume Courtet, un autre fils du P. Michaëlis, plus tard missionnaire au Japon et martyr en 1637. Béginald se distingua d’abord à l’Université de Toulouse et prit part aux polémiques qui s’élevèrent entre l’Université et le jésuite français Annat, sur les questions qui avaient fait l’objet, un demi-siècle auparavant, de la Congrégation De auxiliis. A cette occasion, il composa plusieurs ouvrages de controverse. Plus tard, il est à Borne (1652), où il a été appelé par le maître général de l’Ordre, pour l’examen des cinq fameuses propositions de l’Augustinus, qui furent condamnées en 1653, par Innocent X. S’il n’a pas à intervenir directement, du moins trace-t-il nettement la ligne de démarcation entre la doctrine de Jansénius et celle de saint Thomas. Son ouvrage principal est le Doctrinæ D. Thomse Aquinatis tria principia cum suis consequentiis, synthèse puissante de la doctrine thomiste ramenée à ses principes, que l’auteur n’eut malheureusement pas le temps de terminer. Cf. Echard, t. ii, p. 663.

Antonin Massoulié (1632-1706), du couvent de Toulouse, homme éminent en doctrine et d’une vaste érudition, dont on connaît assez le rôle dans les grandes controverses qui agitaient l’Église de son temps. Il est successivement consulté par les pontifes Innocent XI, Alexandre VIII, Innocent XII, Clément XI, sur les questions du quiétisme molinosien, du semiquiétisme français, et au sujet de la célèbre discussion sur les Bites chinois. Voir ci-dessus, col. 278.

Antoine Goudin (1639-1695), « l’un des professeurs de philosophie et de théologie les plus remarquables de la seconde moitié du xvii » siècle », fils du couvent de Limoges, relevé de ses ruines par les réformés. Son traité de philosophie, Philosophia fuxta inconcussa tutissimaque divi Thomæ dogmata lom. I V comprehensa, qui a eu déjà de nombreuses rééditions, mériterait, étant données ses qualités de simplicité et de clarté, surtout en ce qui concerne la « Logique », d’être remis en chantier, et pourrait redevenir le manuel classique des étudiants de philosophie (quelques années auparavant, un autre religieux du couvent réformé de Toulouse, le P. Baymond Mailhat, avait composé une Summa philosophiæ, 1652, en 4 tomes, qui n’eut pas moins de 18 éditions). De Goudin, . nous avons aussi des Traités de théologie, qui n’ont pas paru du vivant de l’auteur et ont pu être revisés, avant d’être livrés à la publication. Voir ici, t. vi, col. 1508-1516.

Enfin mentionnons, comme se rattachant au même mouvement de réforme du P. Michaëlis, des théologiens, comme le P. Girardel (1575-1633), second vicaire général de la Congrégation occitaine réformée, t. vi, col. 1376 ; le P. Chalvet (1605-1683) célèbre par son Theologus Ecclesiastes, in XI tomos distinctus, ouvrage considérable, destiné aux prédicateurs, immense commentaire de la Somme de saint Thomas par un tissu de passages empruntés aux Pères, aux philosophes, voire même aux poètes ; cf. Echard, t.n, p. 698 ; le P. Penon (1623-1699), poeta et orator a natura, utraque ratione semper theologus, Echard, t. ii, p. 748’; les PP. Antonin Cloche (1628-1720) qui fut maître général de son ordre, 1686-1720 ; Jean-Baptiste Maderan (tl709) avec son Clypeus doctrinæ moralis thomisticæ lomus V ; et Joseph Mayol († 1704) Summa moralis.