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MÉTHODISME

à l’enseignement, à la sympathie. On n’insiste plus tant sur le devoir de sauver sa propre âme que sur le devoir de se rendre utile comme disciple et soldat du Christ.

Par contre, certains veulent revenir à l’enseignement pur et simple de Wesley, et, dans la préface d’une brochure éditée en 1920, le Rev. Dinsdale T. Young félicite l’auteur de son courage et ajoute : « D’aucuns semblent s’imaginer qu’ils peuvent continuer avec succès l’œuvre d’évangélisation de John Wesley sans avoir sa théologie. Je suis tout à fait persuadé que c’est là un vain rêve. La chrétienté organisée est aujourd’hui d’une faiblesse déplorable, et un retour a l’enseignement nettement évangélique est le seul espoir qui lui reste ». Messages hat made the revival, p. 5. Voici douze points mis dans les projets des xxix et xxxviii articles, préparés en 1806 et qu’on voudrait conserver : La parole infaillible. — L’origine de l’homme et son état primitif. — La chute de l’homme. — La corruption totale de la nature humaine. — La rédemption universelle et la grâce prévenante. — La rédemption par le sang du Christ. — Le repentir et la prédication de la loi. — Le salut par la foi. — La nouvelle naissance. — L’assurance. — La santification totale et la perfection chrétienne. — Une seule épreuve et deux alternatives : le ciel et l’enfer.

L’avenir dira si le méthodisme saura suivre ces sages conseils et se préserver d’un modernisme dissolvant de toute doctrine définie.

Les méthodistes contemporains constatent, avec tristesse, que beaucoup de leurs prédicateurs ont perdu la conviction qui faisait le succès des revivals primitifs. Comme un archevêque disait à l’acteur Betterton : « Comment se fait-il que vous, acteurs, vous produisiez plus d’effet par vos fables que mon clergé avec ses vérités ? » Betterton répondit : « N’en déplaise à votre Grâce, c’est que votre clergé publie la vérité comme si elle était une fiction, tandis que nous autres, acteurs, nous débitons des fables comme si elles étaient la vérité. »

Certains méthodistes préfèrent la théorie de Darwin aux récits de la Genèse, mettent au point de départ de l’humanité non une déchéance, mais le détint d’une évolution vers un progrès indéfini. C’est donc abandonner un point essentiel du protestantisme, point que les catholicisme tenait comme exagéré.

On peut leur appliquer ce que G. Goyau dit des protestants modernes en général : « Les idées de libre examen, de religion personnelle et d’évolutionnisme dogmatique sont devenues, pour beaucoup d’adeptes de la Réforme, comme des catégories de la pensée, et l’intérêt véritable ne consiste plus à savoir quels sont les dogmes qu’ils croient, mais quelles sont les émotions religieuses qu ils ressentent, et quels sont les points de vue qu’ils aiment. » L’Allemagne religieuse. Le protestantisme, Paris, 1908, p. xi.

IV. Organisation. — Si Wesley ne fut pas original en malien : de doctrine, il ne le fut même pas en fait d’organisation.

« Le grand succès de Wesley comme organisateur

est dû au moins autant à sa réceptivité pour accepter les suggestions des autres et à son adresse pour les adapter qu’à la fertilité de ses propres ressources. Il est remarquable qu’il n’y a guère dans tout son système admirablement agencé un seul détail dont il faut l’appeler l’inventeur. » J. H. Overton, John Wesley, p. 121.

Dès que Wesley avait prêché, les hommes régénérés à la suite de sa parole ou désireux de bénéficier de la nouvelle naissance étalent aussitôt enrôlés dans un groupement destiné à soutenir, encourager, alimenter leur ferveur religieuse. Les disciples forment les United societies qui sont considérées comme appartenant à l’Église établie. Ces sociétés peuvent comprendre des Select societies ou Select bands, groupant ceux qui font profession d’avoir atteint la perfection chrétienne absolue, et des Penitent societies poulies régénérés retombés dans le péché ; mais ces groupements ne subsistèrent pas longtemps.

Les Band meetings sont des assemblées hebdomadaires avec prières, cantiques, lectures, exhortations pieuses, confession publique de chacun des assistants à commencer par le chef. Chacun expose l’état de sa conscience depuis la dernière réunion, tentations rencontrées, chutes ou victoires, progrès faits dans la vertu, moyens employés ?

Ceci est véritablement admirable, mais ne peut être pratiqué que par une élite. Dès que le méthodisme est devenu une Église, et donc s’est ouvert à tous, cela devait forcément dégénérer.

D’ailleurs, dès le début, les adversaires y voient des foyers de débauche et d’immoralité. Cependant l’on avait pris certaines précautions pour éviter les abus : les réunions sont de 5 à 10 membres triés sur le volet, les sexes sont séparés, les gens mariés sont séparés des jeunes gens, il faut pour pénétrer un billet d’admission renouvelé chaque trimestre. Le niveau moral est d’abord très élevé ; voici les pratiques recommandées : ni vente ni achat le dimanche, pas de liqueur, ni de jouissances inutiles, comme le tabac, n’avoir qu’une parole, ne rien mettre en gage, pas d’ornements superflus, ne pas dire du mal des autres, faire l’aumône, réprimander les coupables avec douceur, donner le bon exemple : aller à l’église et à la sainte table chaque dimanche, assister à toutes les réunions publiques des bands, écouter le prêtre chaque matin si possible, prier chaque soir en famille, lire l’Écriture et la méditer chaque fois qu’on le peut, jeûner et faire abstinence chaque vendredi.

Les Select bands disparurent à cause de l’antinomisme de ces prétendus saints qui se croyaient dispensés des devoirs élémentaires de la vie chrétienne. Certains passaient leur temps à faire des miracles et à annoncer la fin du monde pour le lendemain.

La Classe groupe douze membres payant un penny par semaine ; un collecteur apporte chaque semaine les cotisations aux administrateurs. Plusieurs classes forment une société, les sociétés sont réunies en districts, les districts en provinces ou nations. Dans chaque société il peut y avoir une ou plusieurs Bands, mais ces organismes ne sont pas essentiels.

Weslcy possédait une autorité absolue qu’il exerçait sans morgue ni dureté. Dès que le nombre des convertis se fut accru, il dut s’adjoindre des Class-leaders ; le chef dos douze membres est imposé, non élu, il doit voir chaque membre au moins une fois par semaine, s’enquérir de l’état de son âme, traiter avec le ministre, le mettre au courant des cas de maladie ou d’inconduite, transmettre les cotisations.

Comme il y a peu de clergymen ralliés à Wesley, il faut leur adjoindre des Lay assistants ou helpers, qui doivent prêcher tous les jours matin et soir, assembler chaque semaine les Bands, visiter les classes une fois par trimestre, réunir les chefs des Bands et des classes chaque semaine. A la tête de chaque district il y a un prédicateur itinérant. Aux Conférences annuelles de 1711 à 1791, l’autorité de Wesley fut toujours décisive. Il voulait qu’on assistât aux offices anglicans, tout en y adjoignant deux fêles spéciales, les Love-feasts ou agapes, et les Watch-nights ou vigiles. Quoiqu’il ail accepté, contraint par la nécessité, de faire des ordinations, geste qui équivalait à la rupture, il voulut mourir dans l’Église de son baptême.