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MÉTHODE D’OLYMPE

fragments, Eusèbe parlait de Méthode comme d’un vivant : Quomodo ausus est Methodius nunc contra Origenem scribere qui hæc et hæc de Origenis locutus est dogmatibus. Cité par S. Jérôme, Cont. Rufin., I, xi, P. L., t. xxiii, col. 423. Ainsi l’on a tout dit sur Méthode quand. on a affirmé qu’il fut évêque d’Olympe de Lycie dans la seconde moitié du iiie siècle, et qu’il mourut martyr à la fin de la grande persécution, donc vers 311-312 (la mention de Chalcis de Grèce, comme lieu du martyre, doit reposer sur une confusion).

Cette ignorance où demeura la postérité sur le compte du personnage ne doit pas faire oublier que Méthode fut un écrivain fécond et même un penseur vigoureux. De bonne heure, avons-nous dit, son œuvre écrite circula. L’Adamantius s’en est certainement inspiré. Eusèbe a transcrit, dans la Préparation évangélique, en le donnant comme d’un Maxime, « homme distingué en la diatribe chrétienne », un passage considérable de Méthode, Præp. evang., VII, xxii, P. G., t. xxi, col. 569-584 ; Épiphane cite Méthode avec éloge et reproduit un long morceau de son œuvre dans le chapitre du Panarion consacré aux erreurs d’Origène. Hæres., lxiv, 12-62, édit. K. Holl (du Corpus de Berlin), t. ii, p. 421-499 (seule édition utilisable dans la circonstance, parce qu’elle rétablit l’ordre du discours, fort malencontreusement bouleversé dans les anciennes éditions, par suite d’une interversion des cahiers du manuscrit). Saint Jérôme dresse dans le De viris, 83, le catalogue suivant des œuvres de Méthode : Nitidi compositique sermonis adversus Porphyrium confecit libros, et Symposium decem virginum, de resurrectione opus egregium contra Origenem, et adversus eumdem de Pythonissa, et de αὐτεξουσίῳ, in Genesim quoque et in Cantica canticorum commentarios, et multa alia quæ vulgo lectitantur. Les érudits des âges suivants conservent le souvenir du vieil évêque d’Olympe, voir les divers témoignages assemblés dans l’édit. de Nath. Bonwetsch (du Corpus de Berlin), Leipzig, 1917, p. ix-xvii. Photius possède et analyse longuement quatre ouvrages de notre auteur : le De resurrectione, cod. 234, le De creatis, cod. 235, le Περὶ αὐτεξουσίου, cod. 236, le Banquet, cod. 237, P. G., t. ciii, col. 1109-1180. Au xie siècle, un Slave découvre tout un corpus des œuvres de Méthode, qu’il traduit en slavon, et préserve ainsi de la destruction une partie importante des écrits de l’évêque d’Olympe. Les auteurs de Chaînes sur l’Octateuque, les Psaumes, Job, les Petits prophètes, utilisent encore ses explications, tandis que le florilège connu sous le nom de Sacra parallela, comme aussi divers florilèges syriaques, conservent quelques fragments d’une œuvre qui continuait donc à être lue. Voir pour le détail N. Bonwetsch, op. cit., p. xix-xxviii.

II. L’œuvre littéraire. — C’est à l’aide de toutes ces indications que la critique moderne a pu, tout récemment, reconstituer d’une manière suffisamment complète le catalogue des œuvres de Méthode et en retrouver, soit en grec, soit en diverses traductions, des morceaux considérables.

Catalogue. — Voici d’abord le catalogue, tel que l’établit le plus récent éditeur, N. Bonwetsch : 1. Le Banquet, signalé par saint Jérôme, analysé par Photius, conservé intégralement en grec, mais, chose curieuse, inconnu du traducteur slavon. — 2. De autexusio (Du libre arbitre), signalé par Jérôme, analysé par Photius, conservé au complet en slavon, ce qui permet de mettre en place les nombreux fragments grecs, et quelques fragments arméniens. — 3. De la vie et de sa pratique raisonnable, exclusivement conservé par le slavon. — 4. Aglaophon ou De la résurrection, attesté par Jérôme, analysé par Photius, intégralement conservé par le slavon, qui permet de raccorder la très longue citation d’Épiphane (préalablement remise en ordre) et les autres fragments grecs. — 5. De la distinction des aliments et la cendre de la vache rousse, exclusivement en slavon. — 6. De la lèpre, en slavon, fragments grecs conservés sous le nom de Méthode par le ms. Coisl. 294. — 7. De la sangsue, exclusivement en slavon. — Tous les traités qui précèdent peuvent être restitués dans leur ensemble. Par contre il ne reste que des fragments des œuvres suivantes : 8. De la création, analysé par Photius, et vraisemblablement identique au dialogue intitulé Xénon, dont parle Socrate, H. E., VI, xiii, P. G., t. lxvii, col. 704. — 9. Contre Porphyre, attesté par Jérôme, et auquel A. Jahn a rapporté cinq fragments signalés comme étant de Méthode par divers mss. — 10. Commentaire sur Job, dont la Chaîne de Nicétas d’Héraclée sur Job a conservé 25 morceaux. — 11. Sur les martyrs, un discours, semble-t-il, dont l’Eranistes de Théodoret et les Sacra parallela ont conservé une demi-douzaine de lignes.

L’authenticité de ces divers ouvrages est solidement garantie tant par les témoignages, soit des auteurs, soit des mss., que par les nombreux points de contact qu’il est facile de constater entre eux, et qui ont été mis en bonne lumière par le récent éditeur.

Les principaux ouvrages. — Des principaux d’entre ces ouvrages nous allons donner une analyse sommaire en soulignant les diverses particularités doctrinales.

1. Le Banquet (Symposion). — Comme le célèbre dialogue platonicien, dont il emprunte le titre et jusqu’à un certain point la mise en scène, le Banquet traite de l’amour, mais non point de l’amour profane, de celui au contraire qu’inspire le Christ aux vierges qui se sont consacrées à lui. Le sous-titre, De la chasteté, περὶ ἀγνείας, en indique très clairement l’objet : c’est la louange de la virginité célébrée par dix vierges qui se sont réunies pour un pieux banquet dans les jardins d’Arètè (la vertu). L’une après l’autre chacune de ces épouses du Christ exalte la beauté, la grandeur, la difficulté aussi de la parfaite chasteté ; celle qui en a le mieux parlé, Thècle, est couronnée par Arètè, et entonne en l’honneur du Christ un hymne en 24 strophes, dont ses compagnes reprennent en chœur le refrain : « Je me consacre à toi, divin époux, le flambeau allumé dans la main, je cours à ta rencontre. »

Ces développements sur un même thème n’iraient pas sans de fastidieuses répétitions si l’auteur n’avait découvert un moyen de varier ses effets. Au fait, seul ou à peu près, le premier discours, celui de Marcella, roule exclusivement sur la virginité et sur la révélation que le Christ a faite de ses avantages. Le deuxième, tenu par Théophile, est consacré à montrer que, n’en déplaise à certains hérétiques, le mariage, disons plus exactement l’œuvre de chair, a sa grandeur, sa beauté, sa nécessité relative ; tout cela dit avec un réalisme un peu cru dont certaines expressions détonent dans la bouche d’une vierge ; visiblement pour Méthode la vertu n’est pas l’ignorance. Le discours de la troisième vierge, Thalie, s’écarte plus encore du thème proposé, puisque, prenant comme point de départ la comparaison entre l’union d’Adam et d’Ève et celle du Christ avec l’Église (sacramentum hoc magnum est), il se lance en des développements sur l’union dans le Christ entre la nature divine et la nature humaine qui font plus d’honneur à l’ingéniosité de Thalie qu’à sa science théologique. Voir Symp., iii, 3-7, Bonwetsch, p. 29-34 ; P. G., t. xviii, col. 64-71. Combélis, en 1672, faisait déjà remarquer avec beaucoup de raison le « nestorianisme » très apparent et l’ « arianisme » à peine larvé de plusieurs de ces formules, dont il y aurait lieu de reprendre l’étude ; c’est à elles, sans doute, que pensait Photius, quand