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MARTIN K r. BIOGRAPHIE


Latran un grand concile, véritable representation.de l’épiscopat occidental, où fut condamnée l’hérésie monolhélite avec ses auteurs et fauteurs ; l’Eclhèse « impie » d’Héraclius, et le Type « très impie » de Constant II, le basileus régnant, étaient également anathématisés. Voir ci-dessous, col. 18f. Quelques précautions que l’on eût prises pour distinguer entre les souverains et leurs conseillers ecclésiastiques, à qui seuls était imputée la responsabilité des mesures impériales, il était inévitable que Constant II ne réagît très vivement contre une attitude aussi indépendante. La cour avait eu vent de la réunion du concile, et n’eut pas besoin d’attendre, pour en connaître les décisions, les lettres expédiées par le pape aussitôt après la clôture de l’assemblée. Jalïé, n. 2062. Dans les premiers jours de novembre, peut-être— le concile étant encore réuni, l’exarque Olympius arriva à Rome porteur d’instructions du 1 asileus, rédigées, semble-t-ii, à la suggestion du patriarche Paul. On lui prescrivait de faire pression sur les évêques et les clercs de l’Italie byzantine pour leur faire signer le Type. De Martin « jadis apocrisiaire dans la ville impériale » (on affectait de ne pas lui donner le titre de pape), l’exarque ne s’occuperait que pour le faire arrêter, si l’armée de Rome était disposée à laisser faire. Peutêtre y aurait-il lieu de ne rien brusquer, et de gagner peu à peu la confiance de l’armée, de même que lentement on détacherait du pape l’épiscopat italien. Mais Olympius se heurta à une résistance plus vive que celle que l’on avait supposée ; ne pouvant, continue le Liber pontiftealis, agir contre le pape à visage découvert, il tenta de le faire assassiner au cours de l’office de Noël ; la protection divine sauva Martin et il semble que l’exarque soit revenu lui aussi à de meilleurs sentiments, ou, peut-être, à une plus saine appréciation des choses. Il est certain, en tout cas, que de bonnes relations s’établirent entre lui et le pape, et celui-ci sera plus tard accusé d’avoir favorisé les desseins ambitieux d’Olympius. De toutes façons une trêve s’établit entre le pontife et le représentant de Ryzance.

Nous ignorons le détail des gestes de Martin durant le temps qui s’écoule entre la fin de 649 et le milieu de 653. Mais il reste une assez abondante correspondance de l’époque qui suivit immédiatement le concile. Il s’agissait de faire connaître à l’ensemble de la chrétienté la réprobation prononcée contre le monothélisme par l’Église romaine. Voir Jafié, n. 20582072. Mais une autre préoccupation se fait jour, en même temps, dans les lettres adressées aux Églises des patriarcats d’Antioche et de Jérusalem. Après avoir été ravagées par la grande invasion perse des années 614 et suivantes, ces régions avaient été conquises par les Arabes musulmans ; Damas avait été prise en 634, Antioche et Jérusalem en 638. Entre temps, et comme si ce n’était pas assez de l’invasion étrangère, les discordes religieuses étaient montées au diapason le plus élevé : entre les monothélites appuyés par l’autorité impériale et les dyothélites, animés par Sophrone, devenu finalement patriarche de Jérusalem, des luttes violentes avaient eu lieu. Tout ceci avait amené, dans la Syrie et la Palestine, une incroyable décadence du christianisme. Pour remédier à tous ces troubles, le Saint-Siège, puisque le patriarche Sophrone n’avait pas été remplacé sur le siège de la Ville sainte, avait désigné comme vicaire apostolique Etienne, évêque de Dora. Cette nomination avait dû être faite par l’un des prédécesseurs de Martin ; mais Etienne, loin de pouvoir rétablir le calme, avait suscité de nouvelles discussions. Les lettres pontificales l’instituant représentant du Saint-Siège avaient été interceptées. Finalement un certain Pantaléon l’avait expédié à Rome, sous le coup de

diverses accusations. Jaffé, n. 2068. C’était l’anarchie dans tout le patriarcal de Jérusalem. Au concile du Latran Etienne de Dora avait été réhabilité, mais il y avait intérêt à confier à un personnage moins compromis la mission de représenter là-bas le Saint-Siège. Martin I er s’adressa à Jean, évêque de Philadelphie (sous la métropole de Bosra). 1 ne lettre pontificale le constitua vicaire apostolique en Orient : il y remplirait le rôle du pape lui-même dans toutes les fonctions et offices ecclésiastiques, mais principalement en rétablissant la hiérarchie dans toute l’étendue des patriarcats de Jérusalem et d’Antioche : Ut eu quar désuni corrigas et constituas perumnem civitatem eorum qux sedi tum Jerosolymitunie tum Antiochenw subsunt episcopos et presbyleros et diaconos. Ce rôle, Martin le lui confiait « en vertu de l’autorité apostolique qui nous a été donnée par le Seigneur par l’intermédiaire de saint Pierre, ex apostolica auctorilate quee data est nobis a Domino per Petrum sanctissimum. » Le pape ne se dissimule pas qu’il y aura des résistances de la part de ceux qui ont mérité d’être déposés, pour cause d’hérésie, mais il compte que Jean finira par en triompher. Les ecclésiastiques qui ont signé les formulaires monothélites pourront être rétablis s’ils viennent à résipiscence ; quant à ceux qui se sont introduits sur les sièges épiscopaux sans mission régulière, il y a lieu de distinguer le cas des intrus qui se sont installés du vivant de Sophrone et malgré lui, et de ceux qui ont été élus pendant la vacance du patriarcat, soit avant, soit après Sophrone. Les premiers ne sauraient être reconnus, les seconds, au contraire, pourront, moyennant les garanties convenables, être reçus à la communion de l’Église romaine. Pour Macédonius, patriarche (melkite) d’Antioche, il n’y a à s’inquiéter ni de ses lettres, ni de ses protestations. Élevé à cette dignité en terre étrangère (Macédonius avait été élu et consacré à Constantinople) et par des hérétiques, il ne saurait être considéré par le Saint-Siège comme titulaire régulier du siège d’Antioche. De même en est-il de Pierre, élevé dans des conditions analogues au siège patriarcal d’Alexandrie. Jaffé, n. 2064 ; voir le texte de cette lettre très importante pour l’histoire de la juridiction pontificale en Orient, dans P. L., t. Lxxxvii, col. 154-163. Le même courrier emportait une série de lettres analogues adressées à divers évêques ou archimandrites d’Orient, et leur signifiant la désignation de Jean de Philadelphie comme vicaire du Saint-Siège. Jaffé, n. 2065-2069 ; non moins importante était la missive adressée aux deux Églises de Jérusalem et d’Antioche pour leur signaler l’hérésie monothélite et les avertir des pouvoirs conférés au représentant du pape. Jaffé, n. 2070. On notera cette sollicitude du Saint-Siège à rétablir, dans les difficiles conjonctures que traversait l’Orient, la paix religieuse en même temps que l’orthodoxie.

A Constantinople il n’y avait plus rien à faire, tant que le monothélisme y serait officiellement patronné par le basileus. Maison pouvait essayer quelque chose à Thessalonique, moins immédiatement soumis à l’arbitraire impérial et relevant toujours, en théorie, du patriarcat romain. L’archevêque Jean, qui avait souscrit et l’Ecthèse et le Type, avait tenté néanmoins de se maintenir en communion avec Rome. Des négociations avaient eu lieu, où les envoyés du Saint-Siège, s’étaient laissé berner. Martin les désavoua, condamna et déposa l’archevêque Paul. Une lettre pontificale lui communiqua cette sentence, tandis qu’une autre en avertissait les habitants de Thessalonique. En attendant que l’évêque fût revenu à résipiscence ou qu’il eût été pourvu d’un successeur, les prêtres et diacres pourvoiraient à l’administration des sacrements, synaxis minislerium perficiant vobis qui ibi sunt presbyteri et diaconi. Jaffé, n. 2071 et 2072. On voit