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MARONITE (ÉGLISE), PREMIÈRES ORIGIM->

titué par un vaste édifice, entouré de plus de trois cents cellules et possédait en objets d’or, d’argent et en pierreries des richesses condisérables. Livre de l’avertissement, et de la révision (Kitâb al-Tanbîh WalJschrdf), édit. de M. J. De Gœje, Leyde, 1894, p. 153, dans Bibliotheca Geographorum arabicorum, viii. C’est de là que les moines maronites rayonnaient dans toutes les directions. Les documents historiques nous apprennent que ce couvent était déjà en pleine activité dans les premières années du vi° siècle. Un mémoire adressé, en 517, au pape Hormisdas par les moines de la Syrie seconde porte en tête la signature d’Alexandre, archimandrite de Saint-Maron. Mansi, Concil., t. viii, col. 425-429. Ce mémoire nous montre la violence de la persécution déchaînée contre eux par les monophysites et l’importance de leur organisation, puisque trois cent cinquante moines furent massacrés et divers couvents brûlés. D’autre part, la place où figure la signature d’Alexandre indique bien la prééminence de son monastère sur les autres. Le pape répondit à cette adresse le 10 février 518. Ibid., col. 429 et surtout col. 1023-1030. Les mêmes moines firent également aux évêques de la Syrie seconde le récit de cette sanglante persécution subie pour la cause de la foi. Ici encore, Alexandre, archimandrite de Saint-Maron, signe le premier parmi les archimandrites des autres monastères de la région d’Apamée. Ibid., col. 1130-1138.

Au concile de Constantinople tenu en 536 sous le patriarche Menas, le monastère de Saint-Maron était représenté par le moine et apocrisiaire Paul. Celui-ci signe avant les autres moines de la Syrie seconde, Mansi, ibid., col. 911 ; et, dans le procès-verbal des sessions, son nom précède constamment celui de ces derniers. Cf. col. 881, 929, 940, 953. De plus, à certains endroits, sa signature nous informe expressément du rang qu’occupait alors son monastère : IlaijXoç… à7toxpi.aiàpiDÇ |i.ovyj ; toù (xaxapiou Màpuvoç tt)ç è^ap^oua^ç tôv èv ffl Seuxépa Zupîa eùaywv

p.ovaar/)picov Col. 995, 1022. Le monastère de

Saint-Maron était donc à la tête des couvents de la province, 1' « exarque » des monastères de la Syrie seconde, tout comme l'était celui de Saint-Dalmate par rapport aux couvents de Constantinople. Or, le terme « exarque » veut dire chef de fédération monastique. Voir Pargoire au mot Archimandrite dans le Dictionnaire d’archéologie chrétienne, t. i, col. 2741 et 2746 ; H. Lammens, op. cit., t. ii, p. 91. Aussi, dans les controverses doctrinales, les représentants du couvent de Saint-Maron parlaient-ils au nom du parti orthodoxe de leur région. Voir deux lettres écrites vers la fin du vie siècle, l’une par les maronites aux jacobites, l’autre par ces derniers aux premiers, conservées au British Muséum de Londres, Add. 12 155, fol. 103, traduites en français par F. Nau dans le Bulletin de l’Association de Saint-Louis des maronites, Paris, 1903, p. 313 sq. et 367 sq. Cf. aussi le compte rendu d’une conférence contradictoire entre les moines maronites et le patriarche et un évêque jacobites, tenue à Damas, en 659, devant Moawiah, dans le ms. syriaque de Londres, Add. 17 216, fol. 12. Le texte syriaque en a été publié avec une traduction française par F. Nau, Opuscules maronites, I r « part., p. 36 ; IIe part., p. 6, Paris, 1899-1900. Cf. plus loin, col. 7.

Les moines des couvents de la Syrie seconde, for- ! mes en corps monastique sous la direction du grand monastère maronite, pouvaient donc être appelés, à juste titre, disciples de Saint-Maron. C’est pourquoi, l'Église maronite vénère le 31 juillet, comme ses enfants, les 350 moines massacrés par les monophysites et dont on a parlé ci-dessus. Cette tradition de l'Église maronite ne saurait être infirmée par les mots grecs qui figurent dans les signatures des moines,

apposées sur les lettres citées plus haut, le grec ayant été, à cette époque, la langue officielle des moines maronites. S. Vailhé, L'Église maronite, du y » au Lve siècle, dans les Échos d’Orient, 1906, t. ix, p. 261. Du reste, les représentants du monastère de Saint-Maron eux-mêmes portent des titres grecs.

Grâce à ces documents, nous pouvons établir l'époque de la fondation de notre monastère. Il convient de la placer au ve siècle, quelques années après la construction de l'église dédiée au patron des maronites. En effet, le prestige de ses moines et le rang qu’il tenait parmi les couvents de la région ne peuvent être attribués à un monastère de date récente. D’ailleurs, un historien arabe, Abou'1-Fida († 1331), raconte que l’empereur Marcien fit agrandir ce monastère la deuxième année de son règne, c’est-à-dire, en 452. Cité parle P. Lammens, op. cit., t. ii, p. 90 ; et un historien byzantin, Procope de Césarée, nous informe que Justinien le Grand en fit restaurer les murailles, renversées, sans doute, par les monophj-sites. De sedific, t. V, c. ix.

Le monastère de Saint-Maron faisait l'édification de toute la contrée, comme en témoigne une anecdote que l’on trouvera dans Nau, Opuscules mar., IIe part., p. 20-25. Sa renommée donnait un prestige considérable à ses moines ; et ceux-ci, hautement recommandables par leur science et par leurs vertus, attiraient les fidèles ; de tous côtés, ils accouraient vers eux. Cette popularité déplaisait non seulement aux ennemis de l’orthodoxie, mais encore à ceux de la foi chrétienne. Aussi, tôt ou tard, ce foyer de vertu et de discipline devait-il tomber sous leurs coups. A quelle époque remonte sa destruction ? Nous n’avons pas de documents nous permettant de le préciser. Sa ruine, cependant, ne dut pas avoir lieu avant la fin du ixe siècle. D’après une note ajoutée au fol. 126b d’un ms. syriaque du British Muséum, exécuté l’an 892 des Grecs (= 581 de J.-C), le monastère de Saint-Maron existait encore au milieu du vin 8 siècle. Cette note nous apprend, en effet, que ce manuscrit « entra dans la bibliothèque de SaintMaron l’an 1056° (= 715 de J.-C). Cf. W. Wright, Catalogue of syriac Mss. in the British Muséum, p. 450-454. Bien plus, notre monastère se trouvait en pleine activité vers la fin de ce même siècle, ainsi qu’il ressort d’une lettre écrite à ses moines, en 791, par le patriarche nestorien Timothée I er : cette lettre (43), conservée au couvent chaldéen de Saint-Hormisdas près d’Alqosch (diocèse de Mossoul) et dont une copie se trouve à la Vaticane, est citée par Clément J. David, Recueil, p. 200 et 205. Il était encore florissant au temps de Tell-Mahré, patriarche jacobite d’Antioche (| 845), puisque, à cette époque, on continuait de prendre les évêques maronites parmi ses moines. « Ils (les maronites) ordonnent un patriarche et des évêques de leur couvent ». Dans Michel le Syrien, t. ii, p. 511. Par contre, il était déjà détruit avant le milieu du xe siècle. L’historien arabe, Ma’soudi († 956), nous dit qu’il « fut dévasté, ainsi que les cellules qui l’environnaient, par suite des incursions réitérées des Arabes et de la violence du Sultan ». Op. cit., p. 153-154. Quel était ce sultan ? Certainement, un contemporain de Mas’oudi et que tout le monde connaissait. Mas’oudi, en effet, l’ayant désigné par l’article déterminatif, ne sentait plus le besoin de le nommer. Du reste, il paraît avoir connu lui-même ce monastère : cela ressort de la description vivante qu’il lui consacre. En outre, nous pouvons citer à l’appui de cette thèse deux autres documents. Le premier est une note écrite sur le ms.. syriaque de Londres, cité plus haut. Cette note a été exécutée, dit Wright, op. cit., p. 454, par une main du ixe -xe siècle. Elle nous informe que ce ms. qui avait appartenu au