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MARSILE DE PADOUE, ŒUVRES


conditions, continue le même historien, il est difficile

de récuser le témoignage de deux mss. du xive siècle, qui assignent précisément à l’achèvement de ce traité une date comprise entre ces deux termes extrêmes : le livre fut achevé le 21 juin 1324, lit-on dans le inv 4>>4 de la bibliothèque impériale de Vienne et dans le ms. 141 de la bibliothèque du chapitre de Tortose. Cette date nous paraît extrêmement vraisemblable. N. Valois, loc. cit., p. 570. — On a objecté a cette conclusion que, dans le chapitre premier, Louis de Bavière est déjà qualifié de Romanorum Itnperalor : ce qui n’est vrai qu’à partir de 1328. Aussi a-t-on parfois supposé que l’ouvrage primitif fut un simple livret contenant tout juste les grandes lignes du système. L’auteur l’aurait repris dans la suite, sous la pression des événements, pour aboutir au traité actuel, qui serait postérieur au couronnement impérial. -M. Hitter, dans Theologisches Literaturblatt, 1871, t. ix, col. 558-560 ; opinion défendue encore par l’auteur dans Historische Zeitschrift, 1879, t. xi.n, p. 302-303. Reprenant toute la question sur un examen complet des manuscrits, J. Sullivan retient la date de 1324, mais en émettant l’hypothèse très plausible que le premier chapitre fut ajouté après le 17 janvier 1328 ou, tout au moins, que le terme imperator y fut substitué au mot rex qu’on trouve partout ailleurs. The english historical Review, 1905, t. xx, p. 299-300. Il n’y a donc aucune raison pour supposer l’existence de deux ouvrages successifs ou pour déplacer le Defensor, qui mérite de garder son rang à l’entrée de Marsile dans sa politique de sédition.

Conservé dans de nombreux mss., le Defensor pacis fut imprimé pour la première fois à Bàle, en 1522, par le protestant Valentin Curio, sous le pseudonyme de Licentius Evangelus, dont le texte a fait loi dans la suite. Il a trouvé place dans Goldast, Monarchia, 2’édit., Francfort, 1668, t. ii, p. 154-3-12. Une édition abrégée en vue des exercices académiques en a été donnée par R. Scholz, Leipzig et Berlin, Teubner, 1911, dans la Quellensammlung zur deutschen Geschichte dirigée par E. Brandenburg et G. Seeliger, t. ix. La direction des Monumenta Germanise en annonce une édition critique qui n’a pas encore paru. Un très court chapitre final, négligé par les différents éditeurs, a été publié d’après les mss. par K..Mùller, dans Gôtlingische gelehrte Anzeii/en, 1883, t. ii, p. 923925.

De translatione Imperii Romani.

Vers la fin

du Defensor, ii, 30,.Marsile a l’occasion de rencontrer le thème, alors classique, de la translation de l’Empire. Il y écarte en quelques mots l’idée que le pape et ses clercs l’auraient fait auctoritate propria. Puis il continue : Ilac enim translulione quantum de facto præcesserit dicturi sumus in altero quodam ab hoc tractatu seorsum. Goldast, p. 308.

Ce traité spécial fut rédigé par lui quelque temps après. Il accompagne généralement le Defensor dans les mss. et dans les éditions. On le trouve dans Goldast, qud., t. ii, p. 147-153, mais avec la date visiblement erronée de 1313. En réalité, cet opuscule fut écrit, non pas avant, mais après le Defensor, qui s’y trouve rappelé dès les premières lignes et plusieurs fois dans la saite. On a conjecturé qu’il fut écrit en Allemagne, à la demande spéciale de Louis de Bavière. S. Riezler, Die literarischen Widersacher der Pàpste, Leipzig, 1874, p. 173, suivi par N. Valois, p. 604. Cette hypothèse ne paraît guère fondée : puisqu’en écrivant son Defensor l’auteur promet déjà ce supplément, il est assez vraisemblable d’admettre qu’il l’ait donné sans rKard.

L’ouvrage se compose de douze petits chapitres, qui exposent la manière dont l’Empire e-, t passé des Romains aux Grecs, des Grecs aux Francs, puis des

Francs aux Germains. « C’est une imitation, a-t-on avancé, N. Valois, p. 604, ou, pour mieux’dire, une reproduction du traité composé sur le même sujet vers le commencement du XIVe siècle par Landolfo Colonna. » Voir ici t. viii, col. 2557-2558. Seulement celui-ci présentait ces diverses translations comme étant l’exercice des prérogatives souveraines du Saint-Siège. -Marsile écrit justement pour le réfuter sur ce point. Ejus scripluræ in quibusdam noslra sententia dissOnat, præsertim in quibus jura lœsit imperii secundum sententiam propriam absque demonstratione su/ficienti. Goldast, p. 148. Il emprunte donc à son prédécesseur son dossier de faits ou de légendes, souvent même son texte, mais en supprimant ou corrigeant ses interprétations favorables à la papauté. Four lui, la translation de l’Empire fut toujours le fait des circonstances, quand elle ne donne pas lieu d’affirmer, au contraire, la subordination du pape à l’empereur. « En somme, ouvrage de polémique, dont le mérite n’est, certes, pas celui de l’originalité », N. Valois, p. 605, mais qui reflète, en les appliquant à ce cas particulier, toutes les idées générales de l’auteur.

Defensor minor.

 A ces deux ouvrages depuis

longtemps connus les recherches de l’érudition moderne ont permis d’en ajouter un troisième non moins important : savoir le Defensor minor, qui, non seulement abrège le grand traité de même titre, mais le complète sur bien des points.

Il est contenu dans le ms.— Canon. Mise. 188 de la Bodléienne, fol. 70 v°-80 r°, où il a été découvert par N. Valois, Comptes rendus de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 1903, p. 601, puis, indépendamment de l’érudit français, par J. Sullivan, The english historical Review, 1905, p. 300 sq., qui n’en utilise d’ailleurs que le dernier chapitre. Pour l’étude intégrale et l’analyse de son contenu, voir N. Valois, Hist. litt. de la France, t. xxxiii, p. 606-616. Ce traité est encore inédit. Aucun doute n’existe sur son authenticité. Car, non seulement l’auteur renvoie de façon continue au Defensor pacis, mais il précise en terminant le rapport des deux œuvres : De quibus omnibus, supposilis vel probatis, et commemorata et etiam explicata sunt plura in hoc tractatu, ex majori Pacis defensore pro necessitate tant séquentiel quant dedùcta. Propter quod Defensor minor deinceps vocabitur tracta tus iste. — « Il est évident qu’à un moment qu’il reste à préciser, Marsile de Padoue éprouva le besoin de compléter son grand ouvrage par un certain nombre d’éclaircissements sur plusieurs points particuliers. Ces points sont les suivants : la juridiction ecclésiastique ; la pénitence, les indulgences, les croisades et les pèlerinages ; les vœux ; l’excommunication et l’interdit ; la primauté du pape ; le pouvoir législateur suprême du peuple romain et de son prince ; le concile général ; le mariage et le divorce. » N. Valois, loc. cit., p. 607. On voit par cet aperçu qu’après le domaine de la politique les vues novatrices de Marsile ont gagné de plus en plus celui de la théologie.

Le Defensor minor est reporté par J. Sullivan, loc. cit., p. 305, à cause uniquement de son dernier chapitre que nous allons retrouver, à l’année 1342. Avec plus de raison, X. Valois, p. 615-616, fait observer que tout le contenu du livre suppose la pleine puissance intellectuelle et politique de son auteur. Il en fixe, en conséquence, la composition en 1328.

4° De jurisdictione Imperatoris in causa matrimoniali

— « A quelques années de là, continue le même historien, Louis de Bavière, convoitant pour son fils Louis, margrave de Brandebourg, l’héritage du Tyrol. lui fit épouser la comtesse Marguerite à la Grande Bouche, dont le mariage avec Jean, fils du roi de Bohème, avait dû être préalablement annulé ou plutôi considéré— comme nul (10 février 1342). Ce fut l’ocra-