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MARONITE (EGLISE), LES PERSECUTIONS

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tes fois appel. » Ristelhueber, op. cit., p. L28-130.

Toutefois, si, dans certaines circonstances, la protection de la France améliorait leur sort, elle ne pouvait les mettre à l’abri de toute persécution religieuse. Nous parlerons d’abord des maronites de Chypre. L’invasion de l’île par les Turcs (1570-1571) ruina leur colonie. Un certain nombre d’entre eux furent massacrés ; d’autres retournèrent au Liban ; un groupe accompagna les Vénitiens à Malte. Les quelques l’amilles qui restèrent à Chypre eurent à subir, outre le joug du conquérant, celui, non moins vexatoire, du Grec. Ristelhueber, op. cit., p. 309. Vers la fin du xvie siècle, les maronites étaient déjà réduits à près de 1 500 âmes, et dispersés dans 19 villages, nous le savons par les PP. Eliano et Dandini qui les visitèrent, le premier, en 1580 et le second en 1596. Voir Cheikho, La nation maronite et la Compagnie de Jésus aux AiP— et xvil’siècles. Beyrouth, 1923, p. 37 ; Dandini, op. cit., p. 23. En 1686, ils n’étaient plus qu’environ 150, éparpillés dans huit bourgades. Voir un mémoire adressé par eux, le 1 er juillet 1686, à l’ambassadeur de France à Constant inople, dans A. Rabbath, op. cil., t. ii, p. 101. La France dut intervenir plus d’une fois pour adoucir leurs souffrances et permettre à leurs chefs religieux de s’acquitter de leurs fonctions pastorales. Bulletin du Comité de l’Asie Française, janvier 1920. dans Ristelhueber, op. cit., p. 310-318 ; Rabbath, ibid., p. 98 sq. Actuellement, ils sont au nombre d’environ 3 000, distribués en cinq paroisses.

Si leurs frères du Liban se trouvaient, grâce à leurs montagnes et à leur organisation particulière, mieux favorisés, ils n’étaient pourtant pas soustraits aux atteintes de leurs ennemis religieux ; ils eurent même leurs martyrs. A la veille de la conquête ottomane, en 1515, le patriarche écrivait à Léon X : Sumus enim in in/idelium. et hareiicorum medio constitua, a quibus perseculionem patimur, bonis noslris expoliamur, ac ssepe numéro flagellis cwdimur. Labié, Concilia, t. xiv, col. 355. Cf. col. 352-353, une autre lettre du même patriarche au même pape, 8 mars 151-1. Ces plaintes furent souvent répétées par les patriarches des temps postérieurs. Il serait trop long de’décrire ici les persécutions subies par les maronites durant cette période. Nous nous contenterons d’ajouter aux documents cités au cours de cette étude quelques témoignages contemporains. Lue note arabe écrite sur un ms. syriaque, conservé à la Bibliothèque nationale de Paris sous le n° 270, nous apprend qu’en 1897 des Grecs (= 1586 de J.-C.) une persécution sévissait au nord du Liban, particulièrement à Ehden. L’auteur de cette note lui-même fut obligé « te s’enfuir à Damas (fol. 154 v°). — Même témoignage dans une lettre écrite le 25 décembre 1596 à Clément VIII par le futur patriarche’Amira, Anaïssi, Collect., p. 92, et dans une lettre de 1603 du patriarche P.isi au cardinal Aldobrandini. ibid., p. 103. En 1609, une supplique présentée à Paul V pour demander la confirmation du patriarche Jean Makhlouf, attribue le retard de l’élection aux difficultés suscitées par les Turcs, Ibid., p. 105. — Un mineur observantin, le P. Boucher, qui visita Qannoùbîn en 1612, raconte ce qui suit : « Les Grecs les (les maronites) molestent s toute heure. Le RR. Patriarche me disl à Canubi (Qannoùbîn) lorsque j’y estois, que depuis trois ans les Grecs par leurs impostures luy avoient fait couster plus de 2 000 sekins, qu’il avoit esté condamné de payer au grand Turc pour satisfaction de déseobeyssances, dont il avoit esté faussement accusé par ces sehismatiques imposteur., . Et puis quand le :, Crées les ont escorchez, les Turcs qui demeurent à Tripoli les vont manger et ronger jusques aux os, de sorte que les pauvres gens sont tousiours travaillez, ou par les faux amis, ou par les vrays ennemys. Le

bouquet sacre, Paris. 1620, p. 597-598. Le

1° juin 1655, le patriarche Jean Safràouî écrivait à Alexandre VII que les maronites, en proie à des tracasseries de toute sorte, étaient sacchegiati dalli nemici délia jede. Anaïssi, Colleclio, p. 117. En 1659, la

main de l’ennemi avait tellement pesé sur eux qu’ils ne trouvaient plus de refuge que dans la fuite. Us avaient été, en effet, dépouillés de leurs biens, et l’on commençait à leur arracher leurs enfants pour les vendre comme esclaves. Le patriarche, qui se privait de tout pour les racheter, n’était guère épargne ; il se vit obligé de s’enfuir [jour échapper au poignard des assassins. Anaïssi, Ibid., p. 126. — Kn 1696, le cardinal secrétaire d’État demandait au nonce de Paris de faire intervenir le roi en faveur des maronites qui gémissaient sous le poids de la tyrannie pour la cause de la foi. Ibid., p. 132-133. — Un exemple des dernières années du xvii° siècle illustre d’une manière tragique la barbarie de certains pachas de Tripoli. Il s’agit des tortures infligées au cheikh Vounès, chef de la famille maronite Rezq. Véritable martyr, dans toute la force du terme, il fut empalé pour la cause de la religion. Voir le récit de son supplice dans de la Roque, op. cit., t. ii, Paris, 1722, p. 275-276, 279-280. « Ce n’était malheureusement pas un fait isolé. Le Liban tout entier gémissait sous les exactions des Turcs. Leurs violences ne connaissaient plus de bornes. Ils avaient ruiné des villages, dispersé au loin les habitants exilés, jeté des pères de famille en prison, pendu des femmes aux arbres par les seins. Sans respect pour la dignité sacerdotale, n’avaient —ils pas également outragé le patriarche et les évêques ! Afin d’échapper à de nouveaux affronts, ceux-ci « travestis en séculiers », avaient dû fuir dans les rochers abandonnés de la haute montagne. » Ristelhueber, qui se réfère à une lettre du patriarche au roi, 20 mars 1700, conservée aux Archives nationales de Paris, op. cit., p. 205. Cf. aussi Douaïhi, Annales, an. 1634, 1640, fol. 105 v°100 r° et 108 v° ; Fr. E. Roger, La Terre sainte, Paris, 1664, p. 495-497 ; une relation des missions de la Compagnie de Jésus en Syrie, en 1Ç54 et 1655, dans A. Rabbath, op. cit., t. ii, p. 245, 246 ; une relation écrite, en 1654, par le P. Poirresson, supérieur des jésuites de Perse et ce Syrie, parmi les mss. de la Bibliothèque nationale de Paris, coll. Moreau, n. 842 ; une lettre du patriarche Douaïhi au pape, . Il septembre 1685, dans Anaïssi, Collect., p. 130, 131 ; diverses lettres écrites, en 1697 et 1701, par Louis XIV, le marquis de Torcy et Pontchartrain, dans de la Roque, op. cit., t. ii, p. 290 sq.

En considération de toutes ces soulfrances endurées pour la cause de la foi, Alexandre VII disait des maronites : Veluti rosas esse inter orientolium infidelium. hærelicorum et schismaticorum spinas, gratia JJei //orentes. Cité par Assémani, Bibl. juris, 1. 1, p. xvii-xviii.

Le xviiie et le xix° siècles réservaient encore aux maronites de cruelles persécutions de la part de leurs ennemis traditionnels. Le 1 er août 1704, leurs évêques et notables se plaignent amèrement à Clément XL Anaïssi, Colleclio, p. 134. — A l’issue du synode libanais de 1736, l’ablégat pontifical, J.-S. Assémani écrivait, le 15 octobre de la même année, en îles termes plus pathétiques encore, au cardinal Fleury. Texte dans A. Rabbath, op. cit., t. i, p. 182 ; cf. lielazione, p. 15.

Celte énumération de témoignages, d’ailleurs bien incomplète, suffit à montrer quelle lut la triste situation des maronites durant de longs siècles. On peut dire qu’ils vécurent dans un état presque toujours pre ;  ; ure i n butte i la perse, utian religieuse, jusque la seconde moitié du xi.v siècle, trois victimes des massacres de 1860 viennent d’être béatifiées, le 10 octobre 1926. Pie XI fil joindre leur cause a celle