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    1. MARONITE (ÉGLISE)##


MARONITE (ÉGLISE), PATRIARCHES, XX* SIÈCLE

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Orienlalium dignitas Ecclesiarum du 30 novembre 1894, par laquelle Léon XIII prenait d’énergiques mesures pour sauvegarder, devant l’envahissement du

latinisme, les vieux rites orientaux. Avant de promulguer cette constitution. Léon XIII avait convoqué à Rome les patriarches d’Orient pour y prendre part aux conférences tenues au Vatican en 1894. Hadj n’avait pu y assister. Mais afin de témoigner de son estime et de sa reconnaissance à l’égard des missionnaires latins, il écrivit au pape pour louer leur dévouement. Et joignant les actes aux paroles.il leur confia l’éducation complète des jeunes maronites. « Dans l’Église, répétait-il, il n’y a ni grecs, ni latins, ni arméniens, ni maronites, mais des chrétiens soumis au vicaire du Christ. » Le pape et la Propagande tinrent à lui écrire pour le féliciter de cette attitude. Voir sa lettre pastorale du 15 mai 1895, dans laquelle il publie la traduction arabe de la constitution Orientalium, et de deux lettres à lui adressées par Léon XIII et la Propagande, dans Ghabriel, op. cit., p. 808-828.

La formation du clergé occupait une place de choix dans la sollicitude de —Mgr Hadj. Quatre séminaires nationaux existaient au Liban, mais soumis à des droits de patronage qui pourraient entraver l’action du patriarche dans l’organisation des études, de la discipline et du temporel. Hadj voulut un séminaire ne relevant que de l’autorité patriarcale. A cet effet, il constitua un patrimoine en biens-fonds, dont les revenus suffiraient à en assurer l’entretien. Mais pour créer l’élite ecclésiastique dont rêvait Jean Hadj, il importait d’établir, hors du Liban, des centres maronites qui permissent à des étudiants de choix de se former aux grandes écoles. Le patriarche en voulut à Rome et à Paris. Pour réaliser son rêve, il lui fallait un négociateur dans lequel s’associaient l’intelligence, l’habileté, la finesse et la ténacité. Il le trouva en la personne de son vicaire, le futur patriarche Élie Hoyek. Celui-ci, muni des pouvoirs et des instructions nécessaires, se mit aussitôt à l’œuvre. En 1891, le collège maronite de Rome était officiellement rétabli. Rref Sapienter olim, 30 novembre 1891, dans Lconis XIII acta, t. xi, p. 377-378. Le nouveau collège canoniquement érigé, il fallait lui procurer des ressources. Mgr Hoyek fit appel notamment à la charité française ; il n’hésita pas à frapper à la porte du sultan de Constantinople, et obtint de lui 500 livres turques or. De la capitale ottomane, il rentra au Liban pour exposer au patriarche les résultats de sa mission. En 1893, il se rendit à Jérusalem, accompagné d’autres prélats, pour représenter l’Église maronite au congrès eucharistique. De là, il poursuivit son voyage avec eux jusqu’à Rome afin de prendre part au jubilé épiscopal de Léon XIII et d’achever l’œuvre du collège. Aux fonds réunis par ses soins, aux offrandes faites par les maronites.il ajouta un don de 150 000 francs que lui remit le pape. Il put alors acheter un vaste immeuble, Via di Porta Pinciana, et installer dans une partie le collège maronite. Plus tard, on édifia de nouvelles constructions, et le collège y fut transféré et définitivement établi. Cf. Debs, op. cit., t. viii, p. 759-762.

En même temps qu’il recueillait des fonds pour le collège de Rome, Mgr Hoyek traitait auprès du gouvernement français en vue de la concession d’une église et de l’établissement d’une procure à Paris. Il sollicita aussi l’attribution de bourses permettant à quelques jeunes clercs de sa nation d’étudier en France, foutes ces négociations lui réussirent à souhait. Le gouvernement de la République ouvrit aux maronites la chapelle de.Marie de Médicis, au Petit Luxembourg ; le patriarche put nommer un procureur ; huit bourses furent accordées à des étudiants. — Jean Hadj voulut aussi un centre maronite en Palestine. Mgr Hoyek fut chargé de réaliser le désir du patriarche ;

et, en 1895, une procure était créée à Jérusalem. Désormais, les maronites avaient dans la Ville sainte une église et une maison. CI. Debs, ibitl.

La complexité des affaires pour lesquelles Mgr Hadj travaillait à obtenir des solutions rapides ne détourna point son attention de la défense des droits du siège patriarcal. Il savait faire entendre sa voix dans tous les milieux. A Rome, notamment, on faisait le plus grand cas de ses suggestions.

On comprend quel coup la disparition d’un tel prélat porta à la nation maronite. Après huit ans d’une activité non moins féconde qu’intense, Hadj mourait, le 24 décembre 1898, à l’âge de quatre-vingt-deux ans. Les manifestations provoquées par sa dernière maladie, puis par sa mort, les regrets unanimes de toutes les classes de la société, les hommages rendus à sa mémoire par les autorités religieuses et civiles de la Syrie, attestent suffisamment quelle place il occupait. Il s’inscrit parmi les pontifes dont le souvenir reste immortel et constamment béni.

Le 6 janvier 1899, Mgr Élie Hoyek, archevêque d’Arka, fut proclamé patriarche d’Antioche. Au consistoire du 19 juin de la même année, Léon XIII ratifia le choix des évêques et accorda le pallium à l’élu, représenté par Mgr Paul Basbous. Leonis XIII acta, t. xix, p. 88-90 ; Anaïssi, Bull., p. 540-548.

Né à Helta (Liban), le 4 décembre 1843, le jeune Élie entra, en 1859, au séminaire oriental de Ghazir, fondé par les jésuites ; puis, en 1860, il alla au collège de la Propagande, à Rome.’où ses études furent couronnées par le doctorat en théologie. En 1870, il reçut la prêtrise et retourna au Liban. Grâce à sa vertu et à sa science, et par ses allures graves et austères, sa renommée ne tarda pas à se répandre en Orient. D’abord professeur de théologie, il fut ensuite, pendant 17 ans, secrétaire du chef de l’Église maronite, et, pendant 9 ans, archevêque et vicaire patriarcal. Dans l’exercice de ces fondions, il donna toujours les preuves d’un esprit vigoureux, avisé et pénétré de toute la grandeur de sa tâche et de sa responsabilité, d’un solide bon sens, d’une sagesse éclairée, d’un caractère résolu et loyal, d’un cœur soucieux d’union, et, par-dessus tout, d’u’ne piété sincère et confiante. Aussi son élection au siège d’Antioche fut-elle accueillie par des témoignages de satisfaction générale.

Entretenir la piété, accroître l’instruction, sauvegarder la foi, veiller au maintien des traditions maronil es, fortifier le prestige de la dignité patriarcale, tel était le programme de gouvernement de Mgr Hoyek : il voulait continuer et développer l’œuvre de ses prédécesseurs, comme il le dit lui-même dans sa première lettre pastorale de 1899.

L’un de ses premiers actes fut d’élever à Dîmân, pour l’été, comme l’avait fait Hadj à Békorki, pour l’hiver, un imposant palais. Il choisit pour cette construction une colline d’où l’œil embrasse toute la vallée de la Qadtcha, refuge d’une longue suite de patriarches en temps de persécution. La première pierre fut posée le 29 septembre 1899, et, en souvenir du passé, l’endroit reçut le nom de Neo Qannoûbtn. C’est là que la cour patriarcale se transporte chaque année, pour y passer la saison chaude. La grandeur de cette construction n’étonne pas ceux qui connaissent les mœurs du pays. La résidence patriarcale est la maison maronite par excellence. Le patriarche y accorde aux étrangers, comme à ses enfants, la plus large hospitalité. Les personnes qu’il accueille à sa table se comptent, à certains jours, par centaines. Aussi la gestion du domaine temporel a-t-elle toujours sa part dans les préoccupations du chef de l’Église maronite.. Il lui faut, du reste, prélever sur ses revenus les sommes