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1127 ME^SE AU CONCILE DE TRENTE, LE DÉCRET : TENEUR DOGMATIQUE 1128

tantes, apparaissent quelques suggestions appropriées aux controverses de l'époque. On se demande, p. 918, s’il ne vaudrait pas mieux réduire le nombre des messes pour ne pas les avilir et s’il n’y aurait pas lieu de prévoir, à la messe solennelle dans les couvents ou les cathédrales, que quelques-uns des ministres communiassent toujours avec le célébrant.

De ces matériaux réunis pêle-mêle par les commissaires fut composé un projet en neuf canons, qui fut soumis à l’examen des Pères le 10 septembre, p. 926928, à la suite du projet sur la réforme générale des clercs. On y censurait le marchandage des honoraires, l’inane simulacrum des « messes sèches », la célébration de plusieurs messes par jour, la substitution de messes votives à la liturgie régulière. En revanche, on y prescrivait la création par les évêques de fondations pour les défunts. La messe ne devait être célébrée que dans un lieu saint, avec des ornements et des vases sacrés en bon état. On ordonnait aux prêtres d’avoir à l’autel une tenue décente, de ne prononcer les paroles liturgiques ni trop haut ni trop bas, et on leur interdisait de faire appel à la musique profane. Défense spéciale était faite d’admettre à l'église les excommuniés ou les pécheurs publics.

La discussion de ce projet commença dès le 10, concurremment avec celle du décret de réforme. Ce dernier semble avoir absorbé toute l’attention des Pères, qui se contentent sur l’autre de quelques rares réflexions, la plupart approbatives. Seul l'évêque de Veglia avait l’air de regretter qu’on eût si peu retenu des remarques faites par les commissaires et prenait la défense des « messes sèches », lorsqu’elles sont inspirées par la dévotion. P. 932-933. Le vœu le plus intéressant, parce qu’il devait aboutir, fut relatif à la forme du décret. Dès le 10, p. 928, l’archevêque de Grenade souhaitait qu’on le ramenât à « un seul canon général ». Cette idée fut défendue également le lendemain par l'évêque de Ségovie, qui remit à cette fin un modèle, p. 932, dont le décret officiel semble s'être beaucoup inspiré. L'évêque de Veglia proposa, lui aussi, p. 933, un semblable contre-projet. Cependant l'évêque de Funfkirchen tenait à ce que les canons restassent distincts. P. 935. Mais les avis furent tellement nombreux et concordants en vue d’une simplification plus synthétisée que l’assemblée résolut d’en tenir compte. Le carme Diego de Léon ne fut pas suivi, quand il demandait, p. 938, de supprimer toute cette question des abus.

En conséquence, le 14 septembre, p. 940, un nouveau texte fut rédigé, qui reçut des approbations à peu près unanimes et devint, à quelques légères modifications près, le décret définitif. Les jours qui suivirent furent occupés par la difficile question du calice, et tout fut enfin terminé pour la xxir session, qui devait avoir lieu le 17.

5. La XXII' session. — Sous la présidence des cinq légats pontificaux, l’archevêque d’Otrante donna lecture du décret, suivi des canons, p. 959-962, et les secrétaires recueillirent le vote individuel des prélats. Jusqu’en ce moment solennel se manifestèrent les oppositions dont nous avons rencontré la trace tout le cours des débats. L’archevêque de Grenade avait, paraît-il, résolu tout d’abord de ne pas se rendre à la session ; mais il y fut mandé d’office par les légats. P. 963, n. 5. A l’appel de son nom, il remit un papier où il s'élevait encore une fois contre le canon 2 relatif à l’ordination des apôtres, et contre la mention introduite au chapitre premier de l’oblation de la cène. Cette même double protestation fut également formulée par les évêques de Veglia et de Ségovie. Les trois évêques d’Orense, d’Ostuni et de Lucques bornèrent leurs réserves au canon 2. Enfin une objection spéciale fut adressée par le seul évêque de Ségovie

au canon 3, qui définit que la messe peut s’appliquer pro peccalis, pœnis, salis/aclionibus et aliis necessitatibus. Pareille extension lui paraissait aussi dangereuse que peu justifiée.

Bonne note fut prise de ces diverses protestations, qui figurent encore aux Actes du concile, p. 963-965. Mais le décret, auquel l’immense majorité des Pères était favorable sans restrictions, n’en resta pas moins acquis.

En même temps fut promulgué le décret sur les abus en matière de messe. Texte p. 962-963. Une seule remarque fut formulée à son endroit par l'évêque de Lavello, p. 464, qui demandait qu’on y exprimât formellement le droit pour les évêques d’accorder la permission de l’autel portatif. Il ne fut d’ailleurs pas tenu compte de cette observation et le texte préparé par la commission fut adopté tel quel. Un décret de réforme et un autre destiné à réserver au Souverain Pontife la difficile question du calice achevèrent les travaux de la xxiie session.

II. doctrine du décret.

Autant fut longue la préparation du décret sur le sacrifice de la messe, autant est relativement simple la doctrine dont il contient la définition.

Partie dogmatique.

Son premier et principal

objet est d’affirmer, à rencontre du protestantisme, la foi catholique au sacrifice des autels. Ce qui devait amener secondairement quelques explications apologétiques en réponse aux plus graves des critiques adressées à l'Église par les réformateurs.

1. Protocole.

Comme dans tous les documents de ce genre, quelques phrases protocolaires tendent à énoncer l’intention qui préside à ce décret.

a) Prologue. — Elle ressort en premier lieu des lignes succinctes qui lui servent de préface.

Sacrosancta œcumenica et Le saint concile œcumé generalis Trirlentina synonique et général, régulière dus, in Spiritu Sancto legiment réuni à 'trente dans

time congregata, priPsidenl’Esprit-Saint, sous la prési tibusin ea eisdem Apostolicæ dence des mêmes légats du

Sedis legatis, ut vêtus absoSiège Apostolique, pour que

luta atque omni ex parte l’ancienne toi et doctrine au

perl’ecta de magno euchasujet du grand mystère de

ristiïe mysterio in sancta l’eucharistie soit retenue au

catholica Ecclesia fides atque sein de la sainte Église catho doctrina retineatur et in sua lique dans toute sa plénitude

puritate, propulsatis erroriet son absolue perfection,

bus atque hæresibus, conpour qu’elle y soit maintenue

servetur, de ea quatenus dans sa pureté à rencontre

verum et singulare sacrifides erreurs et des hérésies,

cium est.SpiritusSanctiillus- [la voulant aussi envisager]

tratione edocta, hoec quæ en tant que véritable et sin sequuntur docet, déclarât et gulier sacrifice, instruit par

fidelibus populis prædicanda les lumières de l’Esprit-Saint,

decernit. enseigne [sur ce point], pu- '

Cavallera, Thésaurus, n. blie et ordonne de prêcher

1800. aux peuples fidèles ce qui suit.

Ce prologue, qui reproduit textuellement le projet du 5 septembre, a surtout pour but de rattacher le présent décret à celui de la xiii" session. La notion du mystère eucharistique ne serait évidemment pas complète si, après le sacrement, on n’y considérait encore le sacrifice. Sur ce point, en effet, il y a aussi « une foi et une doctrine » qu’il s’agit de maintenir intactes, « des erreurs et des hérésies » auxquelles il importe de barrer le chemin. Le concile se contente ici de cette lointaine allusion à la Réforme. C’est à l'Église qu’il va maintenant s’adresser, au nom du Saint-Esprit dont il détient l’autorité et reçoit les lumières.

Fort de ce mandat surnaturel, le concile se propose d' « enseigner » (docet) et de « publier » (déclarât) ce qu’un chrétien fidèle doit tenir au sujet de l’eucharistie envisagée comme sacrifice. Ces paroles doivent