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    1. MESSE AU CONCILE DE TRENTE##


MESSE AU CONCILE DE TRENTE, HISTOIRE DU DÉCRET 1114

1° Première délibération (décembre 1551-janvier 1552). — En attendant l'édition de la Gôrresgesell schaft, qui n’a pas encore paru pour cette partie du concile, on peut se faire une suffisante idée de la première élaboration de notre décret par les extraits qu’en donne A. Theiner, ibid., p. 602-647. Voir Renz, p. 117-139.

1. Consultations des théologiens.

Il appartenait aux théologiens, ici comme toujours, d’assurer le premier travail de préparation.

a) Méthode de travail. — Suivant la procédure adoptée pour les sacrements, dix articles, empruntés aux divers réformateurs, avec références à l’appui, furent soumis aux consulteurs. qui devaient discuter la question de savoir s’ils étaient hérétiques et méritaient d'être condamnés. Le général des augustins, Jérôme Séripando, avait travaillé personnellement à la constitution de ces dossiers ; mais les précédents seraient dus, en majeure partie, aux deux jésuites Salmeron et Lainez. Et. Ehses, dans Conc. Trid., t. v. p. 835, n. 3. On peut croire que celui qui concerne le sacrifice de la messe, bien qu’il ait été utilisé beaucoup plus tard, eut la même origine.

De ces dix articles, les trois premiers contenaient la négation du sacrifice eucharistique comme contraire à l’institution du Christ et injurieux pour le sacrifice de la croix, la messe n'étant et ne devant être que la simple commémoraison de ce dernier, et l’immolation du Christ ne signifiant pas autre chose que le fait qu’il nous est donné en nourriture. A (moi s’ajoutait (art. 4) la réprobation du canon de la messe. Les art. 5 et 6 visaient pour la condamner l’application de la messe aux vivants et aux morts. Enfin les quatre derniers se référaient aux principales revendications pratiques de la Réforme : protestation contre les messes privées, contre l’usage de prononcer à voix basse les paroles de la consécration et de célébrer en langue latine ou en l’honneur des saints, contre le cérémonial liturgique. Comme sources, on renvoyait principalement au traité du Luther, De captivilate babylonica, aux I.oci communes et à l’Apoloyia de Mélanchthon, à l’Institution chrétienne et au De cœna Domini de Calvin, avec mention supplémentaire de quelques réformateurs de second plan. Du reste, ces articles visent seulement à reproduire la pensée générale des auteurs en question.

Les théologiens en discutèrent du 7 au 29 décembre, sauf une interruption à Noël. Il y eut « vingt-quatre séances, auxquelles prirent part environ soixantedix théologiens. » Lepin, p. 294. Mais vingt-six seulement s’expliquèrent sur la question du sacrifice eucharistique, quelques-uns faisant porter leurs observations sur l’ensemble, d’autres uniquement sur tel ou tel des articles proposés à leur examen. La plupart ont l’air de choisir à leur gré l’objet de leurs réponses.

D’après les instructions données en septembre par les légats au sujet du sacrement de l’eucharistie, Theiner, t. i, p. 489, et qui furent renouvelées en la circonstance, l’ordre suivant était établi : en premier lieu les théologiens envoyés par le pape, ensuite ceux qu’avait choisis l’empereur, puis les clercs séculiers suivant leur promotion, et enfin les réguliers d’après leur famille religieuse. C’est ainsi qu’on entendit tout d’abord le jésuite Lainez qui venait au nom de Jules III ; puis les théologiens impériaux, pour la plupart non moins illustres, savoir : le doyen de Louvain, Ruard Tapper, le dominicain Melchior Cano, les mineurs Alphonse de Castro et Jean de Ortega, le séculier Jean Arze. Un autre groupe de lovaniens représentait en même temps l’empereur et la reine Marie de Hongrie. Les cardinaux et aussi les princes électeurs avaient leurs délégués, parmi lesquels figurait la gloire de l'Église de Cologne :

Jean Gropper. A la fin prirent rang les religieux, ainsi classés : prêcheurs, mineurs de l’Observance, mineurs conventuels, augustins, carmes.

Une sage précaution leur prescrivait à tous la brièveté. Theiner, t. i, p. 603. Il semble que cette règle ait été suffisamment observée. Au surplus, ils avaient mission d’apprécier les dix articles à eux soumis d’après les sources de la foi : Écriture, tradition, conciles, souverains pontifes et Pères, consentement de l'Église catholique. Ce qui leur interdisait d’entrer dans les questions d'école pour s’en tenir aux points reconnus par tous comme certains.

b) Aperçu des opinions. — Avec une méthode ainsi déterminée, il ne pouvait être question que de variétés individuelles dans la manière de présenter les doctrines communes de l'Église.

On y entendit, comme il était naturel, de longues démonstrations pour établir la réalité du sacrifice de la messe : Lainez donna le ton à cet égard dans la séance du 7 décembre, Theiner, p. 603-606 ; Melchior Cano développa toute une grande thèse suivant les cadres de l'École : videtur quod non, puis respondeo dicendum, suivi d’une réponse méthodique aux objections alignées en premier lieu. A noter au pastage que, pour Alphonse de Castro, ibid., p. 609, la négation du sacrifice eucharistique serait une erreur d'Érasme aussi bien que de Luther. Les éléments de cette démonstration sont surtout demandés à l'Écriture. Cependant le dominicain Rarthélemy Miranda rappelle à ce propos, p. 633, l’autorité prépondérante de la tradition, et le mineur Jean Mahusius en appelle assez heureusement aux besoins religieux de l’humanité, p. 614 : Si enim missa non esset sacrificium, christiani non haberent sacrificium et essent cunctis genlibus injeliciorcs, cum nulla unquam gens fuerit quee illud non habuerit.

La question de la valeur du sacrifice de la messe semble aussi avoir particulièrement retenu l’attention. C’est à elle qu’est principalement consacrée la déposition du lovanien Josse de Ravenstein, dans J. Le Plat, Mon. ad hist. conc. Trid., t. iv. p. 350-359, qui lui reconnaît une efficacité ex opère operato, c’està dire ex rei oblalte pretio et gratia, p. 356, mais per modum impetralionis, sans qu’il y ait en sa faveur cette promesse infaillible qui est accordée aux sacrements. Dans le même sens, voir le mineur Jean Antoine Delphin, dans A. Theiner, p. 631. Le dominicain Ambroise Pélargo avait noté sur ce point, ibid., p. 621 : Applicatur autem non omnibus sed disposais, et Melchior Cano précisé, p. 609, qu’il s’agit d’une participalio finita, limitée, soit par la volonté divine, soit par nos propres dispositions.

Au bout de ces trois semaines, beaucoup de théologiens avaient encore à prendre la parole. Mais la date envisagée pour la future session approchait. C’est pourquoi les présidents du concile décidèrent d’arrêter là ces consultations, qu’ils estimaient largement suffisantes pour éclairer la religion de l’auguste assemblée, et c’est ainsi qu’une trentaine de consulteurs furent privés de dire leur mot dans ce débat. Theiner, p. 634.

Sur les points essentiels les avis avaient été parfaitement uniformes, lui effet, tous étaient unanimes à conclure que les dix articles protestants méritaient d'être condamnés, et c’est ce que le concile avait surtout besoin de savoir. La discussion la plus rigoureuse à cet égard fut sans doute celle du lovanien Ruard Tapper, dans Le Plat, op. cit., p. 337-350. Il y eut le même ensemble chez le plus grand nombre des théologiens pour les qualifier tous indistinctement d’hérétiques. D’aucuns pourtant firent quelques réserves, sur la question, par exemple, de la langue liturgique ou sur telles formules de détail qui étaient