Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.1.djvu/557

Cette page n’a pas encore été corrigée
1099
1100
MESSE, ADVERSAIRES CATHOLIQUES DE LA RÉFORME


présenter comme un sacrement. La messe y est écartée par simple prétention. Voir de même la Con/essio belgica (1561), xxi et xxxv, ibid., p. 240 et 247.

Une parfaite unité de tendances se manifeste donc à travers la diversité de ces formules, dont le seul intérêt est de montrer avec quelle résolution les Églises réformées, aussi bien que les Églises luthériennes, se sont systématiquement établies sur les positions doctrinales que leurs fondateurs respectifs avaient adoptées dès l’origine. A l’expression officielle de leur foi les unes et les autres ne se privent d’ailleurs pas, à de rares exceptions près, de mêler d’acrimonieuses critiques, où s’affirme la virulence de leurs préjugés confessionnels. La messe est un de ces points dont la Réforme ne sut jamais traiter avec mesure.

En laissant de côté ces violences, dent le moins qu’on puisse dire est qu’elles n’avancent pas la cause du nouvel Évangile et qui seraient plutôt un signe de sa faiblesse, il reste que le protestantisme a cru voir dans l’idée de l’oblation eucharistique un attentat à l’unique sacrifice du Christ, et dans la pratique de la messe une des formes les plus aiguës du pharisaïsme des œuvres. Voilà pourquoi tous ses postulats dogmatiques et toutes ses préventions ecclésiastiques devaient le dresser contre la doctrine catholique sur ce point. On a vu si la Réforme s’est dérobée à la logique de ses principes constitutifs. Mais ni l’intrépidité de son dogmatisme, ni l'àpreté de ses polémiques ne peuvent pallier l’amputation que cette opposition brutale au sacrifice de la messe faisait subir au passé chrétien.

II. RÉACTION DE LA THÉOLOGIE CATHOLIQUE.

Entre l’explosion de la Réforme et la xxiie session du concile de Trente, qui devait définir la doctrine catholique de la messe, près d’un demi-siècle s’est écoulé, pendant lequel les théologiens durent assurer à eux seuls la défense de la foi. Ils ne faillirent pas à ce devoir.

I. principaux témoins.

Toto jam decennio in.fl.niia pœne volumina ediderunt adversarii de sacrificiel, constatait déjà Mélanchthon dans son Apologie de la Confession d’Augsbourg, xxiv, 15. J.-T. Millier, Die symbolischen Bûcher, p. 251. S’il en était ainsi après dix ans, que ne faudra-t-il pas dire des trente qui ont suivi ? Il serait manifestement aussi inutile qu’impossible de prétendre établir la liste complète de ces infinila volumina. Qu’il suffise d’indiquer ceux qui furent les plus célèbres et qui peuvent, à distance, nous sembler les plus importants.

Apologistes du premier jour.

Parmi les défenseurs de la cause catholique, il faut faire une place

spéciale aux volontaires de la première heure, à qui revint l’honneur de soutenir le choc de l’assaut mené par les protestants contre le sacrifice de la messe.

On a vii, en effet, que, pour agiter plus efficacement l’opinion, Luther publia sur la question plusieurs pamphlets successifs, soit en latin, soit en allemand. Les réponses ne manquèrent pas du côté catholique et, naturellement, c’est surtout en Allemagne qu’il faut les chercher. A ces passes d’armes, avec les grands controversistes de l'époque dont les noms sont bien connus, de plus modestes champions ont tour à tour pris part. En publiant les œuvres de Luther, les éditeurs de Weimar ont pris soin de relever les principales tout au moins des ripostes dont elles furent l’objet. Le rappel de ces publications aujourd’hui bien oubliées aura tout au moins l’avantage de montrer ce que fut alors la vivacité de la lutte.

C’est en 1520 que parut le premier manifeste de Luther contre la messe, sous la forme d’un sermon en langue allemande intitulé : « Du Nouveau Testament, c’est-à-dire de la sainte messe. » L’année suivante,

Jean Cochlée en entreprenait déjà la réfutation, dans un grand traité qui ne put voir le jour qu’en 1523 : Glos und Comment… ufj CLIIII Articklen gezogen uss einem Sermon Doc. Mur. Lutcrss von der heiligen Mess und neuem Testament. Dès le mois de septembre de la même année, l’auteur y ajoutait un petit supplément : Glos und Comment auf den XIII Arlickel von rechtem Mess. Malgré les promesses du titre, plusieurs des articles extraits de Luther n’y sont, paraît-il, pas glosés, pour faire court, et le ton de la controverse, suivant les habitudes de l'époque, y est violent jusqu'à la grossièreté. Édit. de Weimar, t. vi, p. 351-352.

A l’adresse du public lettré, Luther publiait en même temps son De captivilale babylonica (1520), qui provoqua, en France, la Determinatio theologicse facultatis Parisiensis (avril 1521) et, en Angleterre, la fameuse Asserlio septem sacramentorum (1521), qui valut à Henri VIII le titre de Dejensor fidei. Luther ayant riposté dans son opuscule Contra Henricum regem Angliæ (1522) s’attira l’intervention d’un plus sérieux adversaire, John Fisher, évêque de Rochester, qui lui opposait en 1523 son Asserlionis lutheranse con/ulatio. En Allemagne, Jean Cochlée méditait un grand ouvrage sur l’eucharistie, qui devait compter trois livres, mais ne put jamais voir le jour. Il fut tardivement et imparfaitement remplacé par Henri Helmesius, Captivitas babylonica Martini Lutheri ex ipsissimis sacræ Scripturæ sententiis plane dissoluta (Cologne, 1557). Édit. de Weimar, t. vi, p. 494-495. Sans être l’unique objet de ces divers traités, la question de la messe y occupe une grande place, tant chez Luther que chez ses contradicteurs.

Pour le De abroganda missa privata (1522), la première réfutation vint de France. Josse Clichtoue le vise principalement dans le second livre de son Anlilulherus (1524), intitulé : Contra abrogalionem missie quam inducere molitur Lulhcrus. Édit. de Weimar, t. viii, p. 409.

En Allemagne, c’est seulement un peu plus tard que Jean Mensing lançait coup sur coup contre ce traité, en allemand d’abord, puis en latin, les quatre opuscules suivants : Von dem Testament Christi, puis Von dem Opfjer Christi (1526) ; De sacerdolio Ecclesiw Christi catholicœ… adversus Martini Lutheri doymata, praisertim libello suo infando « De abroganda missa » malesuado demone prodita, et Examen scripturarum atque argumentorum quæ adversus sacerdotium Ecclesia ; libello « De abroganda missa » per Martinum Lulherum sunt adducta (1527). Dédaigné par Luther, cet obscur adversaire fut combattu par Jean Fritzhans de Magdebourg : Was die Mesz sey (1527). A l’adaptation allemande du même libelle : Vom Missbrauch der Messe (1522) le dominicain Jean Dietenberger opposait une réponse, composée dès 1524, mais qui ne devait paraître qu’en 1525 : Wider das unchristlich buch Mari. Luth, von dem missbrauch der Mess. Édit. de Weimar, t. viii, p. 477-479.

Contre la Formula missas et communionis (1523), c’est d’abord Jérôme Emser qui partit en guerre avec sa brochure Missa ; christianorum contra Lutheranam missandi formulant asserlio, 1524, où les allégations de Luther sont relevées et accompagnées pas à pas de gloses critiques. La même année, l’auteur publiait également une Canonis Missa ; contra H. Zwinylium de/ensio. Une seconde édition parut à Cologne en 1532, qui réunissait en un seul volume les deux opuscules. Sur les pas de Jérôme Emser, mais en réalité sous une forme très personnelle, Josse Clichtoue consacrait à la réfutation de la messe luthérienne le premier livre de son Propugnaculum Ecclesise adversus Lutheranos (1526). L’ouvrage se fait remarquer par la solidité du fond et l'élégance de la forme. Auprès des controversistes postérieurs, voir Renz, op. cit., p. 54,