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    1. MARONITE (ÉGLISE)##


MARONITE (ÉGLISE), PATRIARCHES, XVIII* SIÈCLE

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position et exhalé leur rancoeur dans une lettre collective adressée au peuple.’Abboud, ibid., p. 17-18. Or le synode du Liban avait prévu ces actes d’insubordination : Eeundem quoque exconvnuiiicationis sententiam Sancta Synodus pronuntiat in episcopos et métropolitaines, qui… conciliabulum advenus eum (patriarcham) congregare, vel ipsum quoquomodo inhonorare seu scriptis vel dictis, injurias quasdam contra eum promulgare, sub occasione quasi difjamatorum quorumdam rriminum… præsnmpserint. Sedes enim palriarchalis a nemine, pnvterquam a Romano Pontifier, judicari potest. Part. III, c. vi, n. 10. Le patriarche ne manqua pas de rappeler aux récalcitrants la menace synodale ; l’avertissement parut suffire pour les faire rentrer dans l’ordre..Mais, le 29 novembre de la même année, ils portèrent leur plainte devant la Propagande. Le cardinal Castelli, préfet de cette congrégation, leur répondit par un blâme. P.’Abboud, Biographie du patriarche, append., p. 67-70 ; cf. p. 18-20. Ils écrivirent de nouveau, mais cette fois directement au pape, le 25 septembre 1771. Quelques membres de la famille El-Khazen joignirent une lettre à la leur pour appuyer leurs doléances. Clément XIV répondit aux uns et aux autres en leur prodiguant de sages conseils et confia l’examen de l’affaire à la Propagande. Lettres Accepimus, 23 mai 1772, et Acceptis, même date, dans Jus pontifie, t. vii, p. 206-208. Loin d’adoucir les esprits, la réponse de Rome les aigrit plutôt. L’opposition s’avisa de mettre à profit l’irritante question de Hendiyé.

La congrégation du Sacré-Cœur venait de prendre, sous les auspices du patriarche, un nouvel essor. Estéphan était un ardent apôtre de la dévotion au Cœur de Jésus. Il avait déclaré fête de précepte, dans son patriarcat, le premier vendredi après l’octave de la Fête-Dieu, et exigé qu’il fût célébré avec autant de solennité que Pâques et l’Ascension. P.’Abboud, Relazioni, t. i, p. 199-205 de la partie arabe, et t. ii, p. 235-261. II estimait une gloire pour l’Église maronite, à l’exemple de Simon’Aouad, d’avoir une institution sous le vocable du Sacré-Cœur. Aussi fut-il heureux d’approuver, à son tour, la congrégation de Békorki, à laquelle il agrégea’même trois autres communautés de religieuses. P.’Abboud, Biographie de Hendiyé, p. 156-158 ; cf. p. 11-13. La protection déclarée de Jos. Estéphan exalta encore le prestige de la visionnaire, dont l’enthousiasme dévoyé ne connut désormais plus de limites. De graves rumeurs commençaient à circuler sur la personne de Hendiyé et sur sa communauté ; elles couraient la Montagne. Bientôt, aux réalités s’ajoutèrent les légendes, forgées par des esprits mécontents ou aigris. Parmi ceux qui menaient la cabale se trouvait le propre frère de Hendiyé, Nicolas’Ajeymi, jésuite, naguère père spirituel et économe du couvent de Békorki. D’abord, défenseur décidé de sa sœur, il fit volte-face quand on le congédia du monastère, et se montra d’une violence extrême. Dans la suite, il est vrai, on le vit se rétracter et reprendre son rôle d’apologiste. Il en fut de même du P. Arsène Diab, qui changea trois fois d’attitude, mais dont les propos corrosifs contribuèrent puissamment à la destruction de l’œuvre de Békorki.’Abboud, Biographie de Hendiyé, p. 159-174, 178-187, 193, 299.313. 315-317, et append. p. 47-49 ; Relazioni, t. i, p. 303-306 ; t. ii, p. 406 sq. et 450-451. Hendiyé était devenue, pour ses détracteurs, la synthèse de toutes les hypocrisies, l’objet de toutes les malédictions, le symbole de l’orgueil, une flamme allumée dans l’enfer.

Les extravagances de cette pauvre fille, les étranges pratiques de son couvent servaient d’armes contre. Joseph Estéphan. On le rendit responsable des méfaits de Békorki ; on le vilipenda, on en lit un complice d’actes criminels. On voulait arriver à lui ôter toul

crédit et à le pousser à l’écart. pantelant et déshonoré. Voir sa lettre au préiel de la Propagande, dans P. ' l> boud, Relazioni, t. ii, p. 482-41)1. Devant l’énormité des calomnies, le peuple maronite restait consterné. Les dénonciations pleuvaient à la curie romaine. Il fallut bien que le Saint-Siège intervînt de nouveau. Deux missions pontificales furent députées en Syrie coup sur coup. Vint d’abord le P. Valeriano di Pralo, custode de Terre-Sainte. Arrivé à Harisa le 20 juillet 1773, il avait déjà terminé son enquête le 10 septembre, Relation dans’Abboud, op. cit., t. i, p. 217-232. N’ayant pu se faire lui-même une idée juste de la situation, il épousa l’opinion des opposants, mais quitta le Liban sans avoir rien réglé. Voir les plaintes formulées par le patriarche, dans’Abboud, Biographie du patriarche, append., p. 73-76 ; et comparer la relation du P.. Valeriano avec une lettre adressée à la Propagande, le 10 septembre 1773, par neuf évêques et une déclaration signée par eux, dans’Abboud, Relazioni, t. i, p. 217-232 ; t. ii, p. 351-355 ; Biographie du patriarche, p. 35-37.

D’accord avec une partie des évêques et la plupart des notables, Estéphan dépêcha à Rome, au mois d’août 1774, muni des documents nécessaires, l’archevêque de Damas, Arsène’Abd’oul-Ahad (Dominique). P.’Abboud, Relazioni, t. ii, p. 382-383 ; Biographie du patriarche, p. 41 ; append. p. 75. Malheureusement, les cardinaux de la Propagande avaient déjà statué sur la question lorsque le messager patriarcal arriva à Rome. Il n’y arriva, en effet, que vers la fin de l’année 1774, et la décision était rendue depuis le 8 juillet. La S. Congrégation, il est vrai, révisa l’affaire plus tard, le 22 mars 1777, mais sans apporter à ses solutions de bien substantielles retouches. C’est que les ennemis du patriarche avaient acquis, dans les milieux de la curie, une telle influence qu’en 1777 Mgr Arsène qui était à Rome depuis trois ans n’avait pas encore pu obtenir une audience du pape et exposer lui-même le but de sa mission. Lettre de Jos. Estéphan à Pie VI, 29 juin 1777, dans P.’Abboud, Biographie du patriarche, p. 61-63 ; cf. p. 58 ; Relazioni, 1. 1, p. 217 sq. et 277 sq.

La Propagande confia l’exécution des décrets du 8 juillet 1774 à un autre franciscain, Fr. Pietro Craveri da Moretta. Celui-ci arriva au Kasrawân vers la fin de janvier 1775 ; il fixa sa résidence au couvent de Harisa. Il serait trop long d’exposer en détail la manière dont il s’acquitta de sa mission. Il nous suffira de dire que, s’étant trouvé en face d’un patriarche profondément versé dans la connaissance du droit canonique et d’une remarquable ténacité pour la défense de ses prérogatives, il se mit à la tête de l’opposition. Il prit une attitude si violente que les ennemis d’Estéphan se croyaient toul permis. Par exemple, fort de l’appui du délégué, un évêque alla jusqu’à insulter publiquement le patriarche, le traitant de païen, de publicain, dans une lettre pastorale qu’il fit lire le jour de Pâques 1775, à la cathédrale de Beyrouth. P.’Abboud, Biographie du patriarche, p. 54. La conduite de Fr. P. da Moretta indigna le supérieur du couvent franciscain de Harisa, où le délègue séjournait ; il la qualifie en termes durs dans un rapport qu’il rédigea en 1779 et que l’on conserve aux archives du couvent. Cité par’Abboud, Biographie du patriarche, p. 53-54. Le supérieur de Harisa parlait avec d’autant plus d’autorité qu’il voyait de ses yeux la plupart des faits qu’il relate. Harisa, en elle !, se trouve à proximité de Békorki et de Ghosta. Voir une relation et diverses lettres du patriarche Estéphan à Louis XVI, au cardinal de Bernis, au préfet de la Propagande ; une lettre du patriarche melkite catholique a la Propagande, 20 juillet 1782 ; une lettre des Khazen au roi de fiance, dans I’.’Abboud, Relazioni, t. ii, p. 344-394, 196 199, et, dans la partie arabe,