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1019 MESSE DANS L'ÉGLISE LAT1NK, LES DÉFENSEURS DE PASCHASE

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t. V, c. xxxviii, t. r.xxii, col. 993 13 ; humanitus Christi iinum cum dcilule jacta nullo loco conlinetur, nullo lempore movetur, nulla forma seu sexii circumscribitur. lbid., c. xx, col. 891 B.

D’autre part sa conception sacramentaire l’oriente vers le symbolisme. C’est une erreur, à ses yeux, que de penser que les sacrements ne signifient rien de plus élevé en dehors d’eux. In cœlest. hier., c. ii, col. 171. C’est au nom de ce principe qu’il attaque probablement Paschase dans le passage suivant : Quid ergo ad hanc magni theologi Dionysii præclarissimam tubam respondenl, qui visibilem cucharistiam nihil aliud signifleare præter se ipsam volunt asserere, dum clarissime prœfata tuba clamet non Ma sacramenta visibilia colenda, neque pro veritate amplexanda, quia significaliva veritatis sunt. In cœlest. hier., c. i, col. 140 C.

Dans le même passage, il semble bien se rattacher à une conception symboliste de l’eucharistie. Quelle est, en effet, selon lui la signification de l’eucharistie visible que les prêtres célèbrent tous les jours ? Elle est typica similitudo spiritualis participationis Jesu, quem fideliter solo intellectu gustamus, hoc est, intelligimus. Ibid. Elle est donc, continue-t-il, le type de la participation de Jésus par la foi, en attendant la participation dans la contemplation.

La messe ainsi comprise est bien, comme Hincmar l’a remarqué, un pur mémorial du Christ, moyen de participation salutaire à Jésus par la foi comme le baptême, mais vide de la présence du vrai corps du Christ. Voir Gciselmann, op. cit., p. 134142. Par son spiritualisme néoplatonicien et son symbolisme, Scot Érigène mérite d'être compté parmi les adversaires les plus avancés du réalisme traditionnel exposé alors par Paschase.

e) Druthmar, moine tout d’abord de l’abbaye de Corbie, puis de Stavelot après 840, écrivit dans ce dernier couvent son Expositio in Matthœum. Le commentaire de l’institution de l’eucharistie y est « d’un symbolisme aigu » selon la juste expression de F. Vernet, art. Eucharistie, col. 1215 ; il suppose chez l’ancien moine de Corbie la même inspiration que chez Ratramne.

La cène y apparaît comme la consommation de l’ancienne alliance, le commencement d’une économie de grâces nouvelles, et d’un nouveau sacrifice. Exp. in Matth., P. L., t. evi, col. 1476. Ce sacrement est un acte symbolique, évocateur du don du Christ sur la croix et de son amour rédempteur, c’est le lien d’amour qui relie ceux qui restent à l’ami absent : Deus præcepit agi a nobis transferens spiritualiter corpus in panem, vinum in sanguinem, ut per hsec duo memoremus quee fecit pro nobis de corpore et sanguine suo, et non simus ingrati tam amanlissimæ charilali, col. 1476 et 1477. Ce qui s’est fait une fois doit être rappelé tous les jours en figure.

En quoi consiste cette figuration de la passion ? En ce que, d’abord, par leur nature le pain et le vin sont aptes à signifier les effets de la messe. Le viii, source de joie et de force, figure admirablement l’action divine du sang du Christ. Le pain, réconfort du cœur de l’homme, est bien fait pour être le symbole de l’amour divin, pour mettre sous nos yeux surtout ce pain spirituel de la divinité, source de vie et de mouvement pour tout homme, col. 1476. L’auteur pense ici non au corps du Christ, mais à la divinité omniprésente à toute créature.

Les éléments du pain et du vin remplissent leur fonction sacramentelle, dès qu’ils sont entrés sur l’autel en relation avec le corps et le sang du Christ : ceci se fait par un acte spirituel qui transfère le pain au corps et le vin au sang du Christ. S’agit-il de conversion substantielle ? Il ne paraît pas ; il s’agit plutôt d’une relation très intime établie entre le pain

et le corps du Christ ; hoc est corpus meum id est in sacramento. Ainsi Druthmar ne parlera-t-il pas d’une manducation du corps du Christ, mais d’une participation toute spirituelle qui établit une inhabitation mystique du fidèle dans le Christ-Dieu : Qui manducat carnem… hoc est qui manet in me et ego in eo. Cum

    1. VIDEBITIS FILIUM HOMINIS ASCENDENTEM UBI ERAT##


VIDEBITIS FILIUM HOMINIS ASCENDENTEM UBI ERAT,

lune intelligetis non de carne corporis dixisse, quia caro homini ad manducandum nihil prodest. Munet quis in Deo cujus membrum est, manet Ipse in nobis cum sumus templum ejus. Qui perseveruveril hic saluus erit. Exp. in Joan., P. L., t. evi, col. 1517 C. C’est ainsi, sans doute, par cette communion mystique à la divinité, que le nouveau sacrifice n’est point une ligure vide, mais une réalité pleine de grâce.

Cette conception du nouveau sacrifice institué par le Christ est certes loin du réalisme traditionnel ; son spiritualisme exagéré éclate lorsque le moine de Stavelot, se taisant sur la présence du corps du Christ à l’autel, parle du pain spirituel comme de la divinité dans laquelle hommes et créatures se meuvent et vivent, ou de la communion comme d’une inhabitation de la divinité (et non du corps du Christ) en nous.

Une telle conception a des airs de parenté avec celle de Ratramne et s’explique sans doute par le même milieu, les mêmes influences, le même scrupule exagéré de ne point matérialiser l’eucharistie.

2° Réplique de Paschase, Hincmar, Adrevald, Haijmon d’Alberstadt. — On se divisait donc vers le milieu du ix c siècle sur la question de l’identité du corps eucharistique avec le corps historique, et cette division entraînait deux conceptions différentes de la messe.

En face de la déviation symboliste-dynamiste, Paschase, Hincmar et Adrevald de Fleury vont défendre la tradition intégrale.

1. Paschase, dans YExposilum in Matthœum xxti, avait déjà devant les yeux ses adversaires : Audiant qui volunt extenuare hoc verbum corporis quod non sii vera caro Christi, volentes plaudere quasi quædam virlus sit carnis. P. L., t. cxx, col. 1356.

Sur la fin de sa vie, il reprenait sa thèse pour la préciser et la défendre dans sa lettre à Frudegarde, qui était hésitant. La raison de ce trouble, c'était, pour Frudegarde du moins, l’autorité de saint Augustin et particulièrement le texte du De doctrina christiana que l’on objectait à la thèse de Paschase.

L’abbé de Corbie, sans rien abandonner de sa doctrine, la formula plus nettement encore et l’appuya sur l'Écriture, sur l’autorité des Pères aussi bien d’Augustin que d’Ambroise, enfin sur la raison.

La thèse est formulée en fonction de l’erreur : Le Christ est sur l’autel, non in figura, sed in re et in proprietale atque in natura, quæ vita naturaliter ut Deus exislit, et ideo non virlus tantum, sed proprielas naiuræ jure creditur. Episl., col. 1362 AB.

Il la fonde sur l'Écriture qu’il ne permet point que l’on minimise. Le Maître n’a pas dit : Hoc est vel in hoc mysterio est quædam virtus vel figura corporis mei, sed non ficte : Hoc est corpus meum. Col. 1357 A. Pour fortifier Frudegarde, il demande à saint Augustin des textes qui éclaireront les expressions plus ou moins obscures échappées à la plume du grand évêque. Si Paschase ne fut pas toujours heureux dans son choix, et s’il lui arriva de citer comme texte de saint Augustin des extraits d’un auteur inconnu du viiie ou ixe siècle, il faut reconnaître qu’il employa légitimement dans son argumentation un texte très réaliste que l’on trouve dans plusieurs commentaires de.psaumes de saint Augustin : Hoc, inquit, postea biberunt in calice credenles, quod fuderunt in cruce sœvienles. Col. 1354 Be. A la lumière de ces textes il fit de la Lettre à Boni face et du De doctrina christiana, une exégèse conforme au