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MARONITE (ÉGLISE), PATRIARCHES, Xl ! Ie SIÈCLE

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ficum, 1° septembre 1741 (confirmation du synode) ; Quam de pnvclura. Il septembre 1741 (à Assémani). dans ÉU-Év. Asscinani, loc. cit., p. 120-122 ; Apostolicse seroitutis omis, 16 février 1712, dans R. De Martinls, Benedicti XIV acta sive nondum sive sparsim édita nunc primum collecta, t. i, Naples, 1894, p. 103-105 ; Super ad sedandas, 16 mars 1743, dans R. De Martinis, Jus pontifie., t. iii, p. 104-105.

Les synodes antérieurs à celui du Mont-Liban se caractérisaient d’une façon générale par un acheminement vers l’adoption des usages et des lois de l’Église romaine. Le synode du Mont-Liban consacre la plupart des résultats acquis, rétablit cependant sur divers articles la discipline ancienne, reproduit différentes dispositions du concile de Trente et donne à l’Église maronite un statut complet et définitif. Le rédacteur de ce texte synodal ne se contenta pas de libeller les lois ; il voulut faire de son travail un chef-d’œuvre de science et d’érudition, à tel point que plusieurs conciles modernes de l’Orient catholique y ont puisé largement. On peut dire qu’en élaborant cette vaste législation, Assémani a bien mérité de son Église et de son pays.

Au point de vue strictement juridique, seule la traduction latine du synode, ayant été confirmée in forma specifica, a force de loi pontificale. C’est pourtant le texte arabe qui a réglé la pratique de l’Église maronite jusque vers la fin du xixe siècle. En effet, de la traduction latine il n’existait qu’un exemplaire manuscrit, celui des archives de la Propagande. La première édition imprimée en fut donnée à Rome en 1820. Décret de la S. C. de la Propagande, 8 septembre 1820, en tête de cette édition. Mais le texte arabe ava.t été publié en 1788, à l’imprimerie du couvent de Saint-Jean-Baptiste de Choua’r (Liban), aux frais de l’illustre maronite, le cheikh Ghandour Saïd Kl-Khouiï, consul de France à Beyrouth. L’envoi au patriarche et aux évêques de vingt exemplaires de l’édition romaine ne changea rien à la situation ; car les prélats maronites de cette époque, sauf deux, n’avaient aucune connaissance de la langue latine. Au reste, il ne venait à l’idée de personne que le texte approuvé à Rome fût différent de l’arabe signé par les Pères du concile. Voir un mémoire concernant le texte arabe, par le patriarche Mas’ad (1854-1890), dans P.’Abboud, Biographie du patriarche Joseph Estéphan (en arabe), Beyrouth, 1911, append., p. 134145. Aussi, dans la pratique, on n’eut entre les mains qu’un texte conforme à l’original arabe jusqu’au jour où Mgr Joseph Xajm, archevêque maronite, fit paraître, en 1900, une traduction de l’édition romaine. Cette remarque ne sera pas sans intérêt pour celui qui voudrait comprendre certaines controverses juridiques soulevées au cours du xviii° et du xixe siècle. Dans la discussion, les patriarches maronites se fondaient sur le texte arabe, qui dilîère parfois notablement du texte latin, seul reconnu à Rome.

L’élection du successeur de Joseph Dergham El-Khazen donna lieu à des luttes qui désolèrent le clergé aussi bien que le peuple. On élut, en effet, deux patriarches, soutenus chacun par des partisans irréductibles : événement sans exemple dans les annales maronites. Les électeurs présents aux funérailles du défunt patriarche élurent, à la majorité, dès le lendemain de l’inhumation de ce dernier, sans attendre, ni même prévenir les absents, l’archevêque de Damas, Simon’Aouad. Mais celui-ci n’ayant point accepté, ils portèrent leur choix sur Elias Mohasseb, archevêque d’Arka. Cette seconde élection s’accomplit le surlendemain (15 mai) de la mort de Joseph El-Khazen. Voir une note écrite par le nouvel élu, Elias Mohasseb, sur un rituel d’ordinations, et citée par P. Chebli dans la revue Al-Machriq, 1899, t. ii, p. 642. L’archevêque de Chypre et celui de Tyr étaient absents : ils sacrèrent, avec l’assistance d’un prélat de rit syrien, deux nou I veaux eveques afin de pouvoir procéder à l’élection d’un autre patriarche. Les voix se portèrent sur

> l’archevêque de Chypre, Tobie El-Khazen. Les électeurs de Mohasseb se prévalaient de leur nombre. Les autres, se fondant sur la nullité d’une élection faite au mépris de la loi, prétendaient que le droit d’élire leur était dévolu. On raisonnait mal de part et d’autre. En tout cas, les deux compétiteurs se mirent aussitôt. au grand scandale du public, à exercer la juridiction patriarcale. Puis, d’accord avec leurs électeurs respectifs, ils envoyèrent en cour de Rome des procureurs dûment accrédités, porteurs des lettres synodales habituelles. Le Saint-Siège se trouvait donc saisi de deux élections contestées. Des trois mesures suggérées au souverain pontife, l’annulation par voie administrative des actes des deux assemblées avec ordre de procéder à. une nouvelle élection, la convocation des deux élus à Rome et l’obligation pour celui dont l’élection n’aurait pas été jugée légitime de s’y fixer, enfin la solution de l’affaire judiciario ordine, c’est à la dernière que Benoît XIV donna la préférence. A cet effet, il confia à une congrégation spéciale de cardinaux le mandat d’examiner les procès-verbaux des deux élections, d’entendre les représentants des parties en cause et d’étudier les documents qu’ils fourniraient. Les dubia s’établirent sous cette forme : I. An ulla electio sustineatur ? Et quatenus neutra ; II. An sit danda sanalio, et cui ? Et quatenus non sit danda ; III. Quomodo providendum ? La réponse devait

i être prononcée en présence du souverain pontife lui-même. L’instruction de l’affaire une fois terminée, la congrégation tint séance devant le pape, le 15 février 1743 ; elle proposa, à l’unanimité des voix, la solution suivante :

Plene auditis viris missis a pra ; fatis electis, et defensoribus, ac recognitis omnibus scripturis, pro utraque parte productis, communi voto censuit, attentis peculiaribus, ac gravibus nullitatibus, in dictis electionibus repertis, neutram electionem, seu postulationem sustineri, nec esse locum sanationi alicujus, nec non, cassata utraque electione, j seu postulatione, per Sanctissimum Dominum Nostrum esse, juxta sacros canones, et stylum inconcussum Sedis Apostolicse in sirmlibus casibus, providendam ex integro pra> fatam Ecclesiam patriarchalem de persona sibi bene visa, et quatenus eam providerit in aliquem episcopùm, provisionem fieri, præcedente solutione vinculi cum ejus Ecclesia, eaque omnia Congregatio submisit judicio Sanctitatis Suae.

Le pape approuva cette résolution dont l’intérêt, pour nous, réside surtout dans les motifs juridiques qui l’ont inspirée. Le cas était sans précédent dans l’histoire maronite et aucun texte législatif ne prévoyait cette éventualité. En outre, l’assemblée tenue, le 4 juillet 1631, chez le cardinal Pamphili (le futur Innocent X) et dont Benoît XIV lui-même nous rapporte les conclusions, avait déclaré que les lois générales de l’Église n’atteignaient pas les Orientaux nisi in tribus casibus : primo, in materia dogmatum fldei ; secundo, si Papa explicite in suis constitutionibus jaciat mentionem et disponat de prædictis ; tertio, si implicite in iisdem constitutionibus de eis disponat, ut in casibus (ippcllationum ail fulurum concilium. Constit. Allatæ sunt, 26 juillet 1755, § 44.

Or, au fait, c’est le droit des Décrétâtes qu’on appliqua à l’élection de l’archevêque d’Arka : Quoa si eos (il s’agit des électeurs) vocatos non fuisse constiterit, sed contemplos, infirmunda erit penilus electio taliter celebrata, nisi poslea propter bonum pacis curaverint consentire. C. 28, A’, De electione et electi potestate, I, vi ; cf. aussi ibid., C..’16 et 55. On fit valoir ensuite, entre autres circonstances aggravantes, la prise de possession de l’office patriarcal avant la vérification par le Saint-Siège des opérations électorales et la confirmation de l’élu. Plus graves encore étaient les