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MESSE DANS L'ÉCRITURE, L'ÉPITRE AUX HEUREUX

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Dieu pour nous », ix, 21, « assis à sa droite », x, 12, « il intercède sans cesse en notre faveur ». vii, 25.

Deuxième affirmation : Le Christ a offert une victime unique, son corps et son sang. Il n’y a pas et il ne saurait y avoir pour le chrétien d’autres hosties. Nombreux étaient les animaux qui, sous la loi juive, pouvaient être immolés au Seigneur et il y avait aussi des oblations non sanglantes. Mais « le sang des taureaux et des boucs était incapable de faire disparaître les péchés », x, -1 ; les sacrifices de la loi « ne pouvaient donner la perfection pour toujours », x, 1 ; Dieu « n’agréait pas ces holocaustes, ces offrandes pour le péché, ces oblations et ces victimes diverses ». viii, 5-7. « Le corps que le Créateur a formé au Christ », vni, '5-10, « le sang » qu’il lui a donné, ix, 12, 14, Jés.us « lui-même », telle est la seule victime de h' loi nouvelle.

Et enfin, à plusieurs reprises et dans les termes les plus formels, il est dit qu’une fois pour toutes cette seule hostie des temps nouveaux a été offerte par l’unique souverain pontife des chrétiens. En Israël, les mêmes sacrifices étaient toujours à répéter parce qu’ils étaient imparfaits. Ainsi le grand prêtre recommençait chaque année le rite de l’expiation dans le Saint des Saints. Mais puisque Jésus s’est offert lui-même sur la"croix, pour entrer ensuite avec son sang dans le ciel, il a donc présenté à Dieu une victime « sans tache », ix, 14 ; apte « à purifier les consciences » du premier coup, une bonne fois et pour toujours, ix, 14. Puisque « son sang » versé sur le Calvaire et introduit ainsi*.dans le tabernacle céleste a détruit le péché, ix, 25-28, on peut dire qu’il « a obtenu une rédemption éternelle ». ix, 12. Aussi l'Épître aux Hébreux déclaret-elle^en termes exprès et à neuf reprises différentes que le Christ n’a pas à « s’offrir plusieurs fois », que son oblation sur la croix est « unique ». iv, 14 ; vii, 27 ; ix, 12 ; ix, 25, 26, 28 ; x, 10, 12, 14.

Cet écrit enseigne-t-il que la réitération de la cène a le caractère d’un sacrifice ? C’est ce que nous rechercherons dans un instant. Mais s’il le dit ou le laisse entendre, déjà un point doit demeurer hors de toute contestation : cette oblation ne fait qu’un avec celle de la croix ; elle ne tend ni à la remplacer, ni à la compléter ; la victime doit être la même, la seule hostie qui ait de la valeur aux yeux des fidèles, le corps et le sang du Christ ; et enfin, les officiants de cet acte ne sauraient intervenir que pour être les porte-paroles, les représentants de l’unique pontife des chrétiens, Jésus, seul grand prêtre de la nouvelle Loi.

Ceci posé, reste à voir si l'Épître aux Hébreux attribue le caractère d’un sacrifice à la réitération de la cène, telle que la célébraient certainement les chrétiens à l'époque où cet écrit fut composé. La réponse à cette question dépend du sens qu’on attribue à la phrase : Nous avons un autel dont ceux-là n’ont pas le droit de manger qui font le service du tabernacle, xiii, 10. Or, il est impossible de discuter cette proposition en l’isolant de son contexte. Le voici : « xiii, 7. Souvenez-vous de vos guides qui vous ont annoncé la parole de Dieu et considérant quelle a été l’issue de leur vie, imitez leur foi. 8. Jésus-Christ est le même hier et aujourd’hui. Il le sera éternellement. 9. Ne vous laissez pas emporter par des opinions diverses et étrangères, car il est bon d’affermir son cœur par la grâce et non par des aliments qui n’ont servi de rien à ceux qui s’y attachent. 10. Nous avons un autel dont n’ont pas le droit de manger ceux qui font le service du tabernacle. 11. Car sont brûlés hors du camp les corps des animaux dont le sang offert en sacrifice pour le péché est porté dans le sanctuaire par le grand prêtre. 12. C’est pour cela que Jésus, lui aussi, devant sanctifier le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte. 13. Sortons donc tous du camp pour aller à lui, en portant son opprobre. 14. Car nous n’avons

point ici de cité permanente, mais nous cherchons celle qui est à venir. 15. Par lui donc offrons sans cesse à Dieu un sacrifice de louanges, c’est-à-dire le fruit des lèvres qui honorent son nom. 10. Et n’oubliez pas la bienfaisance et la libéralité, car par de tels sacrifices on se rend Dieu favorable. »

Un critique contemporain a donné de ce morceau une interprétation toute nouvelle. D’après O. Holtzmann, Der Hebrærbrief und dus Abendmnhl, dans Zeitschri/t fur die N. T. Wissensclvtfl, 1909, p. 251200, l'épître combattrait une doctrine et une tendance étrangères au christianisme, doctrine qui attribuerait à l’eucharistie, et non à la grâce, une force spirituelle, tendance à présenter la communion comme un repas de sacrifice où les fidèles mangeraient la chair du Christ offert en victime sur la croix. Au >-. 9 serait dénoncée l’erreur : les fidèles sont invités à ne pas se laisser entraîner vers des opinions contraires à la foi primitive, à ne pas croire que l’on affermit son cœur par certains mets, alors que seule la grâce peut fortifier notre âme. Or, fait observer Holtzmann, il ne peut être question ici ni des idolothytes, ni des aliments purs de la loi mosaïque, ni des viandes des sacrifices juifs, puisqu’on ne mangeait aucune de ces nourritures pour fortifier son cœur. Si plusieurs chrétiens croyaient pouvoir consommer de tels aliments, ce n'était pas pour y trouver une puissance spirituelle. Donc, le mets auquel on attribuait la puissance d’affermir l'âme, au lieu de réserver cet effet à la grâce, ne peut être que l’eucharistie. A cette erreur, la lettre, dans les versets qui suivent, oppose l’enseignement chrétien primitif. Comme l’a maintes fois ailleurs affirmé l'épître, le Christ est une victime expiatoire qui s’est offerte pour le péché, vii, 27 ; viii, 3 ; ix, 26, 28 ; x, 12. En cet endroit même est rappelée cette doctrine : Jésus a versé son sang pour sanctifier le peuple, xiii, 12. Or la loi défendait de manger les viandes des victimes offertes en sacrifice expiatoire, on les brûlait hors du camp, xiii, 11. Il n’y a pas eu d’exception pour la chair du Christ. // a été mis à mort, lui aussi, hors de la ville, xiii, 12. Donc on ne doit pas se nourrir de son corps. Les chrétiens ont un autel, 6uCTtaaxr]piov, il est vrai. Mais c’est le Christ en personne, puisqu’il est sacrificateur et victime, Ouaîa. Ceux qui font l’office du « tabernacle », en d’autres termes du « temple pneumatique du Nouveau Testament », c’est-à-dire les chrétiens, n’ont donc pas le droit de manger de cet autel, xiii, 10. Le faire, c’est abandonner la doctrine primitive. D’après elle les disciples de Jésus n’ont qu’un sacrifice, une victime, un autel, ceux de la croix, oblation unique et définitive, comme le répète maintes fois l'Épître aux Hébreux. Le culte des chrétiens se compose donc exclusivement de la louange et de la prière, xiii, 14, de l’aumône et de la charité, xiii, 10.

Sans aller aussi loin, sans découvrir dans cette lettre une attaque contre l’usage de la communion et contre la croyance au caractère sacrificiel de la cène chrétienne, plusieurs critiques entendent comme O. Holtzmann le ꝟ. 10 : « Nous avons un autel dont n’ont pas le droit de manger ceux qui font le service du tabernacle. » Pour eux aussi, les personnes ici désignées sont les chrétiens et non les prêtres ou lévites juifs. Ces derniers en effet n’avaient nul désir de participer à l’eucharistie. L’auteur n’avait pas à leur dénier ce droit ; il est par trop évident qu’ils ne le réclament ni ne le possèdent. Le sens est donc le suivant : Nous avons un autel dont les chrétiens n’ont pas le droit de manger. Sans doute, l'épître n’ignore pas l’eucharistie et ne se propose pas de la combattre, mais elle ne voit dans la cène ni un sacrifice, ni même un repas, au cours duquel les fidèles recueillent le bénéfice de la mort du Christ. « On ne mange pas de ce qu’il y a sur l’autel chrétien… puisque le seul sacrifice qui procure le