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    1. MARONITE ÉGLISE)##


MARONITE ÉGLISE), PATRIARCHES, XYIie SIÈCLE

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beau insister pour lui arracher us mot, un geste d’acceptation ; ce fut peine perdue. Pour se dérober aux sollicitations, il alla se cacher dans la cellule d’un moine. Le peuple se mit à sa recherche le retrouva et le ramena à l’église afin de procéder à son intronisation. L’élu feignit de se laisser faire et demanda quelques instants pour se reposer un peu. Alors trompant la surveillance des électeurs rassurés, il s’enfuit de nouveau et se retira dans une grotte de la vallée de Qannoùbîn. Il fallut bien procéder à une nouvelle élection, d’où sortit, cette fois, l’archevêque Georges, originaire du village de Beseb’el, non loin de Tripoli. Douaïhi, Annales, an. 1657, fol. 112 v-113 r » ; P. Chebli, Biographie de Douai lii, p. 30-31. Le chevalier d’Arvieux, qui visita Qannoùbîn en 1660, nous trace, dans ses mémoires, un portait de ce prélat. J.-B. Labat, O. P., Mémoires du chevalier d’Arvieux, envoyé extraordinaire duroyà la Porte, etc., t. ii, Paris, 1735, p. 422-423. Le nouvel élu écrivit, le 17 décembre 1657, ses lettres d’obédience et les fit porter à Rome par un certain père Jean, carme déchaussé du couvent de Saint-Élisée, dans la région des cèdres, qui mourut avant d’avoir accompli sa mission. Le patriarche chargea alors le procureur général de l’ordre des carmes de remplir lui-même ce mandat et d’obtenir du Saint-Siège, suivant l’usage, pallium et confirmation. On ne sait trop pourquoi, le Saint-Siège ne se hâta guère. Voir les documents dans Anaïssi, Collectio, p. 120-121, 124-126. Georges de Beseb’el expédia donc un nouveau messager, Jean Hesronita, archiprêtre de l’Église patriarcale. A Rome, un troisième carme prit l’affaire en main ; ii rédigea un rapport dans lequel il faisait ressortir les mérites de l’élu et montrait pour quelle raison il importait de se presser : les maronites étaient livrés en pâture à la malignité des voisins. Anaïssi, Collectio, p. 125-127. A la suite de ce rapport, écrit en 1659, Alexandre VII confirma enfin l’élection du patriarche, au consistoire tenu au Quirinal, le 26 mai de la même année. Anaïssi, Collectio, p. 127-128 ; Bull., p. 153-156. Mais le pallium ne fut envoyé que le 30 août 1660. Anaïssi, Collectio, p. 128 ; voir aussi ibid., p. 126-127, une lettre du patriarche à Abraham Ecchellensis, 15 mars 1660 ; Assémani, Bibl. juris, t. v, p. xvi-xvin. — Georges de Beseb’el ne se préoccupa point seulement du gouvernement spirituel de ses sujets. A l’exemple de ses prédécesseurs, il ne négligea rien pour — adoucir leur sort et améliorer leur situation matérielle, et, à cette fin, il recourut au roi de France. R. Ristelhueber, op. cit., p. 136-138. A cette époque, en effet, les maronites vivaient au milieu d’incessantes épreuves. Pour se dérober aux ennemis de la religion, le patriarche lui-même en était souvent réduit à se cacher dans les grottes. Mémoire du chevalier d’Arvieux, t. ii, p. 419. On y trouvera une pittoresque description de la vie et des usages maronites à cette date. Voir aussi le témoignage contemporain du P. Besson, La Syrie sainte, Paris, 1660, I re part., p. 91. Sous lepon tificat de Georges de Beseb’el, Abou-Naufel El-Khazen fut nommé, par lettres patentes du 1 er janvier 1662, consul de France à Beyrouth. Cette nomination eut lieu à la suite d’une mission accomplie en France, sur l’ordre du patriarche, par.Mgr Isaac Chédrâouî. Xul doute que d’autres influences aussi, notamment celle du Saint-Siège, n’aient pesé dans la décision de Louis XIV. Abou-Xaufel était le premier titulaire du consulat de Beyrouth, séparé par le roi de celui de Sidon et d’Alep, et érigé en un poste indépendant confié à un consul particulier ». Les fonctions de consul de France à Beyrouth furent exercées pendant près d’un siècle par Abou-Xaufel et sa descendance l’vistelhueber, op. cit., p. 153-201 ; De la Roque, op. cit, t. ii, p. 286-289. Ce n’était pas un léger avantage pour le patriarcat maronite, qu’un de ses sujets portât le

titre de consul de France avec tous les droits et les honneurs dont jouissaient les autres agents du Levant. Georges mourut au couvent de Mar-Challita (dans le Kasrawàn), le 12 avril 1670, victime d’une épidémie, probablement de la peste répandue alors dans le pays. Douaïhi, Annales, an. 1670, fol. 115 r » ; P. Chebli, Biographie de Douaïhi, p. 47-18 ; la note d’Al-Bech’élànî, dans Al-Machriq, 1902, t. v, p. 691.

L’épidémie qui ravageait le Liban et avait gagné Qannoùbîn ne permit pas au collège électoral de se réunir, suivant l’usage, le neuvième jour après la mort du patriarche. La vacance du siège suscita les intrigues, même au sein de l’épicopat, et certains gouverneurs civils crurent nécessaire d’intervenir pour hâter l’élection patriarcale. Le 20 mai 1670, Etienne Douaïhi (Douwaïhi, Ed-Douaïhi, Aldoensis, ou Ehdenensis = d’Edhen, lieu de sa naissance) fut porté au gouvernement de l’Église maronite. — Cette figure attachante est l’une de celles qui dominent l’histoire des maronites. Xé à Ehden (nord du Liban), le 2 août 1630, Douaïhi fut envoyé, en 1641, par le patriarche’Amira au collège de Rome. Quand il eut achevé le cours de philosophie, il présenta, sous les auspices du cardinal Capponio, une thèse dont la brillante soutenance lui mérita l’éloge de toute l’assistance et, de la part du cardinal, l’ordre de la faire imprimer. Elle fut, en effet, éditée sous ce titre : Conclusiones philosophicse EE. Principi Aloysio S. B. E. card. Capponio a Stephano Edenensi… dicatse, Rome, 1650. Le jeune Etienne acheva d’une façon aussi brillante ses études théologiques ; il dédia sa thèse au patriarche maronite, Jean Safràouî. Il possédait à merveille l’art de l’argumentation, fort cultivé aux universités romaines. Durant son long séjour à Rome, Douaïhi se mit à la recherche de tous les documents relatifs à l’histoire de sa nation. Il en découvrit un assez grand nombre, surtout’à la bibliothèque du collège, alors riche en manuscrits. En 1655, il quitta la Ville éternelle et revint au Liban ; le 25 mars de l’année suivante, il reçut la prêtrise de la main du patriarche lui-même. Aussitôt ordonné, il s’employa à l’instruction des enfants, à la prédication, mais sans jamais abandonner l’étude et les recherches historiques. A Alep, où il passa plus d’une année, s’ouvrit à son activité sacerdotale un vaste champ d’apostolat, et il eut la joie de ramener à l’union un groupe important de nos frères des Églises séparées. Sa parole, remportait toujours un succès de bon aloi : on l’appelait le second Chrysostome.

Après avoir donné ainsi la mesure de son talent, de son tact, de son zèle, il fut désigné au choix du patriarche pour l’évêché de Xicosie (Chypre), et sacré le 8 juillet 1668. Il entreprit aussitôt, au nom du patriarche, la visite pastorale du Liban nord et de la région de’Akkàr. Puis, il s’embarqua pour Chypre. Quelques notes, écrites sur des livres d’église, nous conservent encore la trace de son passage dans cette île. L’une d’elles le qualifie de splendore délia nazione maronila. Durant ses tournées pastorales, au Liban et en Chypre, toujours en quête de nouveaux documents, l’évêque de Xicosie eut la bonne fortune de rencontrer de nombreux mss. qui devaient lui servir dans ses travaux historiques. A son retour de Chypre, il ne retrouva plus le patriarche, qui venait de mourir. Le 20 mai 1670, il recueillait lui-même sa succession. Les difficultés qui surgirent à cette occasion l’empêchèrent d’envoyer à Rome, dès son élection, les lettres accoutumées. Il ne put écrire que le 21 août 1671. Il confia ses lettres avec le dossier électoral au prêtre Joseph Simon de Hasroun (Hesronita), qui s’embarqua vers la fin de l’été, et arriva à Rome le 10 octobre. Mais les intrigues autour de l’élection n’avaient pas encore pris lin. Des prélats et des notables écrivirent