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    1. MARONITE (ÉGLISE)##


MARONITE (ÉGLISE), PATRIARCHES, XVIF SIÈCLE

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et Saint-Marcellin. Voir une lettre du patriarche Jacques’Aouad de 1726 au pape, dans Anaïssi, Collectio, p. 142-143. Plus tard, à l’occasion du synode du Liban, en 1730, on décida d’employer ce qui restait des ressources à la fondation de cinq écoles : à Damas, à Sidon, à Beyrouth, à Chypre, au couvent de Beq’ata (dans le Kasrawân). Voir Relazione dell’ableguzione uposiolica alla nazione de’Maroniti nella Siria, c Monte Libano (en 1736) di Monsignor Giuseppe Simonio Assemani alla S. Congr. de Propaganda Fide, Home, 1711, p. 3 et 13.’Amira avait des tendances qui le poussaient quelquefois à faire bon marché de vénérables coutumes. L’archevêque Georges Habqoùq Al-Bech’elanî, son contemporain, nous apprend qu’une fois élu au siège patriarcal, il négligea’de demander à ses électeurs les lettres’d’usage avant d’envoyer à Borne le prêtre Michel Sa’adah Al-Hasroûnî pour solliciter, en son nom, le pallium’et la confirmation apostolique. Sans doute, en droit strict, le Saint-Siège peut nommer lui-même les patriarches, les choisir librement ou confirmer leur élection sans tenir compte d’aucune autre formalité. Mais, généralement, il n’use pas de ses prérogatives en passant outre aux traditions légitimes. Le mandataire patriarcal dut donc retourner au Liban les mains vides, et’Amira fut obligé, de se plier aux formalités d’usage. Voir la note écrite par Al-Bech’elânî, que nous avons citée plus haut, dans la revue Al-Machriq, 1 1902, t. v, p. 689-690. — Al-Bech’elânî lui reproche encore d’avoir géré les deniers de l’Église avec peu de sollicitude, d’avoir parfois manqué d’adresse dans ses rapports avec les autorités civiles, de s’être aliéné presque tout son entourage : évêques, moines, serviteurs. Ibid. p. 690. Tout cela revient à dire que’Amira manquait de l’expérience d’un administrateur, du tact et de la souplesse d’un diplomate. Ses tendances latinisantes excitaient-elles le mécontentement des vieux conservateurs ? La conscience de sa supériorité intellectuelle lui donnait-elle un ton cassant, qui froissait ses suiïragants et ses subordonnés ? Les documents permettent de le croire. Quoi qu’il en soit.il est incontestable que’Amira connut parfaitement les nécessités du ministère pastoral, et personne ne peut lui reprocher de ne s’y être pas consacré tout entier. Voir une lettre de Paul V dans Anaïssi, Bull., p. 122 ; une relation du P. Maniglier, dans Babbath, op. cit., t. n. p. 507. Dans les Annales de l’Église maronite, ’Amira est en grand renom, et sa mémoire reste vénérée. Douaïhi, Annales, an. 1644, fol. 109 v°-110 r ». Il mourut le 29 juillet 1644. Au rapport de Douaïhi, son corps était encore intact en 1656. Cité par P. Chebli, Biographie de Douaïhi, p. 11. Sur’Amira, cf. aussi Assemani, Bibl. or., t. i., p. 552.

Le 15 août 1644, l’archevêque de Sidon, Joseph Halib Al-’Aqoûrî (Joseph Bar Halib Acurensis) fut promu au siège patriarcal, et, le 10 septembre 1646, son élection confirmée par Innocent X. Voir la lettre d’Innocent X dans le Cod. Vat. lat. 7258, fol. 102. C’était un homme de jugement et d’initiative, dévoué, réalisateur. Au surplus, d’une piété qui l’imposait à l’estime des Turcs eux-mêmes. Voir une lettre de quatre archevêques dans Anaïssi, Collectio, p. 113. Esprit cultivé, il a laissé, entre autres ouvrages, une grammaire syriaque, imprimée à Borne en 1645. Il avait à cœur son rôle de défenseur-né des prérogatives de son siège et des traditions de son Église. L’abandon des anciennes coutumes, aggravé par un empiétement sur son autorité, détermina de sa part un sursaut de réaction. Le souci des droits de son siège le poussa même un peu loin, et le Saint-Siège dut intervenir pour corriger l’excès de certaines mesures. On peut prévoir, d’après ces indications, quel fut le

caractère du synode réuni par lui, le 5 décembre 1644, au monastère de Saint-Jean-Baptiste de Harache (Kasrawân). La volonté de sauvegarder l’autorité patriarcale n’excluait pas chez lui, cependant, le souci de l’orthodoxie. Voir P. Dib, Les conciles…, p. 432-434 ; la note d’Al-Bcch’elânî, citée plus haut, dans Al-Machriq, 1902, t. v, p. 690-691 ; Assemani, Bibl. or., t. i, p. 553-554.

A Joseph Al-’Aqoûrî succédèrent, au xvir siècle, Jean Safrâouî (164-8-1656), Georges de Beseb’el (1657-1670) et Etienne Douaïhi (1670-1701).

Jean Safrâouî, élu vers la fin de 1648, fut préconisé au consistoire du 13 septembre 1649. Anaïssi, Collectio, p. 116-117. Sa caractéristique est l’abnégation, la pénitence : ascète impitoyable à son corps, il atteignit par la pratique de la prière et de l’austérité une réputation peu ordinaire. Ses privations, toutefois, n’ébranlèrent pas sa robuste et harmonieuse constitution ; il conserva jusqu’au bout toute l’énergie de son caractère, toute la vigueur de son intelligence et se distingua « par sa capacité dans les sciences divines et morales. » De la Boque, op. cit., t. ii, Paris, 1722, p. 131. Au surplus, une rare délicatesse de sentiments, une bonté instinctive et une humeur constamment affable lui assurèrent l’affection de son peuple et la confiance de son clergé. Bien ne lui échappait dans l’administration de son Église ; il savait tout prévoir, tout diriger, au temporel comme au spirituel. Al-Bech’élânî, loc. cit. ; Douaïhi, Annales, an. 1656, fol. 112 v°. Ami des réformes, il entreprit, avec le concours de deux archevêques, Isaac Chédrâouî et Joseph Karmseddânî, l’étude de l’Office. Il prépara l’édition du Phenqith (IltvaÇ) ou Propre des fêtes fixes, et, en 1650, il chargea Fauste Nairon de le présenter à Borne en deux volumes, l’un pour la partie d’hiver et l’autre pour la partie estivale. Les deux volumes sortirent des presses de la Propagande, le premier, en 1656, sous le titre : Officia Sanctorum juxlu rilum Ecclesiæ Maronitarum. Pars hiemalis édita auctoritate Sanclissimi Patris nostri D. Innocenta X et abundantia clementiæ Sanctissimi Patris nostri Alexandri VII ; le second, en 1666, sous le titre : Officia Sanclorum juxta rilum Ecclesiæ Maronitarum. Pars œstiua édita auctoritate Sanclissimi Patris nostri D. Alexandri Papse Vil. Cf. P. Dib, Liturgie maronite, p. 148-150 Assemani, Bibl. juris. t. V, p. xv-xvi.

Sous le pontificat de Safrâouî, Isaac Chédrâouî, archevêque de Tripoli, accomplit en France une mission dont le résultat fut de faire attribuer aux maronites une « protection et sauvegarde spéciale » qui les plaçaient au premier rang des chrétiens du Levant. Voir les lettres royales délivrées le 28 avril 1649, dans Bistelhueber, op. cit., p. 130-131. Sur Chédrâouî, voir Assemani, Bibl. or., t. i, p. 552-553 ; la revue arabe Al-Machriq, 1899, t. ii, p. 939 ; Bistelhueber, op. cit., p. 126 et 153-155. Mais Jean Safrâouî obtint davantage encore pour le plus grand bien de son Église et du catholicisme en Orient : Il fut un des artisans de la nomination au vice-consulat de France à Beyrouth d’un illustre maronite, Abou-Naufel-El-Khâzen, qui se distinguait par son dévouement à la cause catholique. Nous possédons encore la supplique qu’il adressa, en 1656, à Alexandre VII, le priant d’intervenir auprès du Boi très chrétien en faveur de ce candidat. Anaïssi, Collectio, p. 119 ; cf. Bistelhueber, op. cit., p. 148-149.

A la mort de Safrâouî, survenue à Qannoùbîn, le 23 décembre 1656, les vœux de la nation se portèrent sur Georges Habqoùq Al-Bech’élànî, prélat très estimé pour son jugement droit et son inépuisable dévouement. Mais sa profonde humilité se dressa contre les instances de l’assemblée électorale. La charge patriarcale lui paraissait trop lourde pour ses épaules. On eut