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    1. MESSE DANS L’ÉCRITURE##


MESSE DANS L’ÉCRITURE, ETAT DE LA QUESTION

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dré aujourd’hui. « v. 5. Or ces mots ont été adressés à Jésus le jour de sa résurrection, s’il faut en croire Ait., xiii, 33. Ainsi c’est au ciel seulement que le Christ est prêtre. Il ne s’est donc immolé comme victime ni à la cène, ni au calvaire, ni au cénacle Cf. Franzelin, Tractatus de Ycrbo incarnato. Home. 1881.

Ces thèses n’ont pas été totalement abandonnées. .Même dans les cinquante dernières années on retrouve des conceptions quelque peu semblables chez certains docteurs anglais. La vertu expiatoire de la mort du Christ est niée ou diminuée. Le sacrifice sanglant du Calvaire n’a fait que préparer celui du ciel, seul sacrifice proprement dit et complet. C’est par sa relation avec ce dernier que la cène chrétienne aurait le caractère d’une offrande rituelle ou d’un sacrifice. Sur ce sentiment que chaque auteur (Brightman, Milligan, Puller, peut-être Mason et Gore) expose avec des nuances propres et parfois assez subtiles, voir Morthner, The eucharistie sacrifice, p. 82 sq. ; 515 sq. ; Paterson, art. sacrifice, dans Dictionary of the Bible de Hastings, t. iv, p. 347 sq. ; Stone, A history of the doctrine of the holy Eucharisl, t. ii, Londres, 1909, p. 581 sq., 646 sq. ; Lamiroy, De essentia ss. missæ sacrificii, Louvain, 1919, p. 16 et 17, n. 2.

On le sait, au cours du dernier demi-siècle la critique indépendante s’est écartée davantage encore de la doctrine catholique sur la cène et sur la messe. Déjà en ce Dictionnaire, on a présenté les principales hypothèses émises entre 1891 et 1913 sur les origines de l’eucharistie. Art. Eucharistie, t. v, col. 1024-1031. Il suffit d’exposer brièvement ici les thèses proposées depuis cette date.

Les affirmations d’A. Loisy déjà relatées ont été complétées en deux ouvrages nouveaux, Les mystères païens et le mystère chrétien, Paris, 1919, et Essai historique sur le sacrifice, Paris, 1920. L’auteur applique à l’eucharistie sa théorie générale sur les origines du christianisme : Le message de Jésus est devenu un mystère. Il n’y a pas eu transposition d’une idée païenne à côté du judaïsme et de l’Évangile, si bien que le christianisme serait un agrégat de parties disparates ; il y a eu pénétration de l’élément primitif par un esprit nouveau. Peu à peu, par une action collective et inconsciente, mais sur laquelle certains docteurs. Paul, l’auteur du quatrième évangile, Apollos et des inconnus exercèrent une influence profonde, le judaïsme évangélique des origines fut conçu, transformé, présenté à la manière d’une religion à mystères. Par une doctrine et des initiations, par la vie et la mort d’un Dieu sauveur, par la communion à lui en des rites mystérieux, l’Évangile prétendit offrir aux hommes une économie de rédemption universelle, et une bienheureuse immortalité.

Le cas de l’eucharistie et du sacrifice n’est qu’un des phénomènes de l’opération générale. « Les premiers chrétiens n’ont pas institué la cène pour imiter un mystère quelconque, mais ils ont bientôt et de plus en plus compris la cène à la façon des rites païens de communion mystique » à un personnage divin et sauveur. La première communauté se réunissait en un’repas fraternel, animé par le souvenir du.Maître et par l’espérance de son prochain retour ». « Bientôt l’on trouva, et Paul pensa voir que par le pain rompu représentant mystiquement le Christ supplicié sur la croix et par le vin de la coupe représentant de même le sang de Jésus », le fidèle s’unit mystiquement au Christ qui est mort pour son salut et dont la résurrection est le gage de l’immortalité promise à ceux qui croient en lui. Ainsi le christianisme eut aussi son repas sacré, son festin de sacrifice, directement coordonné à l’immolation du Calvaire qui était comme renouvelée dans le symbole eucharistique… ». — « Le

cœur d’Osiris était dans tous les sacrifices. Le Christ meurt dans toutes les synaxes où l’on fait la commémoration de sa mort… » Il n’y a pas qu’ « un enseignement par images et en gestes rituels, mais comme une communion réelle au Christ esprit, au Christ immortel. On n’allait pas plus loin chez Dionysos ni chez Mitiira, si toutefois on allait jusque-là… Toutes les spéculations théologiques sur le mystère de l’eucharistie et le sacrifice de la messe ont leur point de départ dans les théories de Paul et du quatrième évangile. »

Peterson YVelter rattache aussi la cène chrétienne aux mystères, mais il croit pouvoir le faire surtout en s’aidant du témoignage des liturgies, et à ce prototype d’origine païenne il associe un antécédent juif, l’offrande des prémices. Altchristliche Liturgien : I. Das christliche Mysterium ; IL Das christliche Opfer, Gcettingue, 1921 et 1922.

A l’origine, comme le racontent les Actes, les premiers chrétiens se réunissaient pour prendre un repas en commun. Un ou plusieurs donateurs, puis la collectivité des fidèles apportaient les vivres à consommer. Par souci de bon ordre, de dévotion et de charité, on fit de ces contributions volontaires des cérémonies rituelles. Les offrandes furent apportées processionnellement, soumises à des actes de bénédiction. On les accompagna d’un mémento du donateur et d’autres personnes, de prières et d’intercessions de toute espèce. Ainsi se constitua le sacrifice chrétien d’origine judaïque.

Parallèlement s’infiltrèrent dans les assemblées chrétiennes la notion et les rites des mystères païens. Réunis pour célébrer le souvenir de la mort et de la résurrection de Jésus considéré comme un Dieu sauveur, les chrétiens crurent le voir apparaître au milieu des siens. Entouré des armées célestes, il visitait, ses fidèles. Saisis d’un enthousiame sacré, enrichis de charismes prophétiques, les assistants saluaient cette épiphanie de leurs louanges et de leurs actions de grâces. Anges et séraphins unissaient leurs hymnes aux acclamations de la foule. Le ciel et la terre commémoraient (anamnèse), ils célébraient avec allégresse et gratitude le personnage divin qui s’était fait homme, qui avait souffert, était descendu’aux enfers, puis ressuscité pour vaincre la mort et le démon. Ainsi les assistants étaient sanctifiés. Dans la suite, ces deux rites, mystère et sacrifice des offrandes, se compénétrèrent.

Au début, l’épiphanie et la parousie du Seigneur s’accomplissaient par l’opération du Saint-Esprit. Les paroles de la consécration ou bien n’étaient pas prononcées ou ne l’étaient que pour rappeler davantage la cène et la passion du Seigneur. Puis on fut tenté de rendre plus concret le mystère. On lia l’épiphanie du Seigneur au pain et au viii, on attribua aux paroles de la cène la vertu de transformer les éléments matériels en corps et en sang du Christ. Le pain et le vin attirèrent alors toute l’attention. L’ancienne offrande des prémices tendit à disparaître. Si elle ne fut pas supprimée, du moins on se contenta d’apporter le pain et le vin pour le mystère. En certains endroits, l’offrande antique fut détachée du repas eucharistique, devint un repas de charité distinct et sans connexion avec le mystère. Quant aux prières prononcées à l’origine pendant l’offrande des dons, un bon nombre d’entre elles furent conservées, mais prirent un sens nouveau ; elles devinrent partie intégrante de la célébration du mystère. C’est ainsi que prit naissance la messe. Non sans complaisance, Will, Le culte, Strasbourg, 1925, t. i, expose et adopte un bon nombre de ces conceptions.

("est encore les antiques liturgies que consulte de préférence Lietzmann pour retrouver l’origine de l’eucharistie. Messe und Ilcrrenmuhl, Bonn, 1926. Celles qui sont en usage au ive siècle et plus tard lui parais-