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MERSENNE — MESROP


nu-ut scientifique. Nous nous contenterons de mentionner sa Synopsis mathematica. Paris, 1625 ; les Questions inouïes, Paris, 1633 ; les Questions harmoniques, Paris, 1651 ; les Harmonicorum libri duodecim, Paris, 1638, les Cogitata phisieo-mathematica, Paris, 1644.

L’œuvre exégétique, philosophique et théologique du P. Mersenne a été jusqu’ici peu étudiée. — Exégète, il publia en 1623, chez Sébastien Cramoisy la première partie d’un Commentaire de la Genèse, Questiones celebcrrinve in Genesim. C’est dans ce livre que.Mersenne écrivit la phrase si souvent citée où il est question du grand nombre des athées en France ; il y signalait également les principaux ouvrages qui avaient permis à l’athéisme de se répandre : la Sagesse de Charron, les Principes de Machiavel, e De subtililate de Cardan, les œuvres de Campanella, les Dialogues de Vanini et les écrits de Fludd. Cf. Roberti, Disegno storico dell’ordine de Minimi, Rome, 1909, t. ii, p. 554. Un des mérites de P. Mersenne fut, en effet, de dénoncer à l’opinion catholique le péril rationaliste et athée qui menaçait la société du xvii » siècle, si profondément religieuse par ailleurs. Il publia des ouvrages où les théories antichrétiennes étaient exposées et réfutées avec beaucoup de force. Le premier, en deux volumes, parut en 1624 ; il était intitulé : V impiété des déistes et des plus subtils libertins découverte et réfutée par raisons de théologie et de philosophie. Il est curieux de "voir un ami de Descartes, de l’ancêtre du rationalisme moderne, s’en prendre si vivement aux libertins, tels que Charron et surtout Giordano Bruno, dont il discute les idées sur l’infinité des mondes et l’âme universelle. Contre les athées (Vanini, Campanella), il expose les preuves de l’existence de Dieu à peu près comme saint Thomas ; plus encore que Descartes, Mersenne est tributaire de la scolastique. Il admet cependant l’argument dit de saint Anselme. Dans l’ouvrage que nous analysons, l’auteur utilise souvent les arguments tirés des sciences exactes, et il est très préoccupé de montrer que science et foi ne s’opposent pas, « que les hommes savants soit en la mathématique, soit en la philosophie, soit en la cabale ne sont ni athées, ni déistes, ni libertins. » Remarquons que l’année précédente (1623) le P. Garasse, célèbre jésuite, avait donné au public un livre semblable : La doctrine curieuse des beaux esprits de ce temps ou » rétendus tsls. — En 1625, Mersenne traduisait de lord Herber de Cherbury, d’après unt texte latin, un ouvrage intitulé : La vérité des sciences contre les sceptiques et les pyrrhoniens. — En 1634, il publiait les Questions théologiques, physiques, morales et mathématiques. Tous ces ouvrages dénotent un esprit puissant, mais un peu touffu.

Le P. Mersenne fut un religieux fervent : en 1623, il avait exposé ses idées sur la spiritualité dans une Analyse de la vie spirituelle. Quand il mourut en 1648, au couvent de la Place-Royale, auquel il avait donné un grand prestige, il laissait des disciples tels que le P. Nicéron qui continuèrent son œuvre, et d’importants manuscrits conservés à la Bibliothèque nationale.

Outre les ouvrages cités au texte, voir : Poté, Éloge de Mersenne, I.e Mans, 1816 ; Ch. Adam, Éducation de Pascal, 1623-1646, Paris, 1888 ; Baillet, Vie de Descentes, Paris, 1691 ; Adam et Tannery, Correspondance de Descartes, 5 vol., Paris, 18 !)7-1910, et dans ce dictionnaire l’art. Minimes.

E. Dumoutet.

    1. MESROP##


MESROP, surnommé MACHTOTZ, célèbre docteur de l’Église arménienne.

I. Vif.. — Il naquit vers le déclin du iv siècle au village de Hatzik (var. Hatzegatz-Gegh) de la province de Taron. Disciple du patriarche Nersès Parthev (Nersès le Grand), doué d’un génie universel, profondément versé dans les littératures grecque, syriaque et persane, il entra bientôt, sur

la recommandation du chiliarque Aravan, au service du roi arménien Yerham Chapouh, en qualité de chancelier du « divan ». En 395, renonçant à la cour royale, il embrasse la carrière religieuse, et s’établit dans le district de Qoghten, retombé dans le mazdéisme, afin de le ramener au christianisme. Après avoir vaqué ainsi à son ministère d’apôtre évangélisateur jusqu’à la Ve année du règne de Verham-Chapouh (an. CCCXCVII), frère de Chosrow III, il se rend auprès du catholicos Sahak ou Isaac III, avec lequel, en 406, il effectue l’invention de l’alphabet arménien, en même temps qu’il jette, de concert avec cet illustre patriarche, les fondements d’un culte national, et d’une liturgie hayeanoarménienne.

Depuis lors Mesrop-Machtotz apparaît comme le fidèle ministre et adjoint plénipotentiaire de son grand patriarche, Isaac III, dont il ne fait qu’exécuter les ordres ou combinaisons, soit qu’il effectue, à la tête d’une légation, un voyage diplomatique à la ccur de Byzance chez l’empereur Théodose II et le patriarche Atticus, en vue de renouer les anciens liens avec l’Église grecque, qui avaient été coupés brutalement par les suzerains sassanides ; soit que, chef d’une école de lettrés, il dirige la traduction en arménien des Écritures bibliques, liturgiques et autres des Églises grecque et syriaque < ; École ou Académie des saints traducteurs » ; soit enfin que, poursuivant son œuvre d’évangélisation, il continue à parcourir, en missionnaire apostolique les provinces limitrophes de l’Arménie, retombées en partie dans le paganisme, la Siounie, l’Albanie et l’Ibérie, dont les alphabets originaires et rudimentaires ont été, selon le témoignage de ses biographes, remaniés et adaptés au type mesropo-haycanien, par le même. iMesrop, ainsi l’alphabet des Albanais et le type khoutzouri de l’écriture géorgienne, dans le but manifeste de resserrer et réunir ces Églises ibéro-albaniennes à la communauté de juridiction du catholicos arménien. Sur l’alphabet des Albanais, voir Karamiantz. dans Zeitschr. der deutschen morgent . Gesellschaft, t. xl, p. 313 ; Junker, Caucasica. t. iii, p. 120. — Après la mort d’Isaac le Grand, ce fut tout naturellement Mesrop qui fut désigné comme administrateur du patriarcat d’Arménie, charge qu’il occupa encore 6 mois, jusqu’à son décès, survenu en 441.

II. Œuvres. — Les mêmes biographes, qui nous ont fourni ce canevas de la vie de saint Mesrop-Machtotz, à savoir Qoriun, Vie de saint Mesrop, Venise, 1833, éd. allem. par Welte, Tubingue, 1841, et Lazare Pharbetzi, lui attribuent nombre d’ouvrages, dont les principaux sont : 1° Un recueil d’oraisons, sermons et discours théologiques, conservés fragmentairement dans la collection dite des Sermons de saint Grégoire l’Illuminateur, Constantinople, 1737, Venise, 1838. — 2° Une version arménienne du Nouveau Testament. — 3° Un Euchologe en arménien. -— 4° Une série d’hymnes. Les hymnaires et principaux livres liturgiques de l’Église grégorienne, Charagan’s Machlotz, c’est-à-dire « rituel », dénomination correspondant au surnom Machtolz de Mesrop même, remontent précisément, pour ce qui est de leur fonds et noyau primitif, au grand couple Mesrop-Sahak comme auteurs ou promoteurs. C’est surtout à titre d’organisateur, de directeur d’école et de diplomate administrateur, que paraît grand et extraordinaire le rôle joué par Mesrop sous l’égide du grand Isaac III. Quoique très probablement il ne soit pas en réalité le traducteur de la version du Nouveau Testament, que lui attribue la tradition, sa gloire incontestable consistera à avoir mis sur pied, comme docteur et président, toute une académie de""* traducteurs r de textes syro-grecs, e