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MÉLÈCE DE LYCOPOLIS — MÉLÈCE LE GALÉSIOTE


lequel leur avait ménagé une entrevue avec l’empereur. Épiphane, Hæres., Lxviii, n. 5, 6, P. G., t. XLn, col. 192, 193. Sur l’heure la manœuvre réussit au rebours de ce que l’on attendait. Irrité de voir remettre en question les décisions de Nicée dans l’affaire d’Arius, Constantin fit exiler Eusèbe. Les mélétiens durent s’en revenir tout penauds à Alexandrie ; pour l’instant ils s.e réconcilièrent tant bien que mal avec l’évêque Alexandre à qui Mélèce remit la liste des ecclésiastiques qui relevaient de lui. Athanase, Apol. cont. arian., 71, P. G., t. xxv, col. 376 ; mais le principe était posé d’une alliance entre l’Église de Mélèce et le parti arianisant. Cette collusion portera dans un avenir rapproché de bien tristes fruits.

Le plus regrettable c’est que, contrevenant à la décision de Nicée, Mélèce, se sentant mourir, ait réussi à se donner un successeur, en la personne’de Jean Arkaph qu’il fit évoque de Memphis. Cette ordination, que suivit bientôt la mort de Mélèce, dut prendre place dans le temps où Athanase lui-même succédait à Alexandre (328). Désormais les mélétiens vont se montrer les adversaires acharnés du jeune archevêque. h’Apologie d’Athanase contre les ariens est toute remplie du récit des manœuvres imaginées par les mélétiens pour perdre leur ennemi. Démarches directes auprès de Constantin, accusations invraisemblables dirigées contre l’administration tyrannique d’Athanase, tout cela aboutira finalement à la réunion du concile de Tyr en 335, qui, par un incroyable déni de justice, condamna l’archevêque d’Alexandrie. Voir Athanase (Saint), t. i, col. 2145, cf. K. Holl, dans Comptes rendus de l’Acad. de Berlin, 1925, p. 18-31. En toute cette affaire qui durera longtemps, les mélétiens apparaissent comme les auxiliaires de la coterie eusébienne et du parti arianisant.

Il n’entre pas dans notre plan de suivre dans le détail les démarches, les palinodies, les récidives des mélétiens passés au service de l’hétérodoxie. Tout cela finit par les faire classer parmi les ariens décidés, cf. Sozomène. II, xxi ; si bien qu’on n’entend plus guère parler d’eux dans la seconde moitié du ive siècle.

Les ariens disparus, il subsista néanmoins quelques communautés se réclamant encore du nom de Mélèce. C’est à quelqu’une d’entre elles que fait allusion Théodoret quand il parle d’organisations monastiques, où se perpétuaient des coutumes bizarres et vaines, qui les apparentaient aux Samaritains et aux Juifs. H. E., I, viii, P. G., t. lxxxii, col. 932. Ces vagues indications montrent que l’évêque de Cyr était bien mal renseigné sur le compte des derniers représentants du schisme mélétien. Au vie siècle encore, il est question de prêtres et de moines mélétiens à Arsinoé, dans un papyrus daté de 512. Revue des études grecques, t. iii, p. 134. Plus surprenante est la notice consacrée par Sévère d’Achmouneim au patriarche Michel (743-757) dans son Histoire des patriarches. A l’en croire, celui-ci aurait découvert dans le nome d’Arsinoé quelques milliers de moines mélétiens. Michel les aurait vainement exhortés à la pénitence ; ne parvenant pas à les convertir, il aurait demandé à Dieu de les détruire, comme jadis Sodome et Gomorrhe. Ainsi fut fait ; tous périrent à l’exception de dix qui étaient venus à résipiscence. Voir E. Renaudot, Hist. patriarch. alexandr., 1713, p. 230-231.

I. Sources. — En dehors des indications fournies par saint Athanase, Epist ad episc. JEgijptiæ et Libyse, 22, 23, P. G., t. xxv, col. 589 et dans VApologia contra arianos, ibid., col. 248-409, l’Hisloria ad monaclios, 78, 79, ibid., col. 788 sq., indications utilisées par Socrates et ceux qui dépendent de lui, il y a deux sources indépendantes qui rapportent les origines du schisme mélétien. La plus ancienne est le recueil de pièces qui figurent dans la collection dite du diacre Théodose (ms. de Vérone 60) à la suite de l’Hisloria acephala arianorum. Utilisant des suggestions de

P. Batiffol, Ed. Schwartz a montré qu’il s’agit d’un ensemble de documents, très analogues aux Fragmenta hisloricu de saint Hilaire. Voir ci-dessous. Se rapportent au schisme mélétien, dans cette collection, la lettre de Philéas et ses compagnons à Mélèce et l’encyclique de Pierre d’Alexandrie, réunies par le fragment historique. Ce dernier n’a pas évidemment la même valeur documentaire que les deux lettres, et il y aurait lieu d’étudier de plus près son origine. Le second document est la notice du Panarion, Mares., Lxviii ; il est relativement plus récent ; la notice a été rédigée après 373 (mort d’Athanase, élection de Pierre II, intrusion de Lucius), et, sans doute, d’après des récits oraux provenant de l’un de ces ecclésiastiques fidèles qui s’enfuirent en Palestine à ce moment. Les souvenirs du garant d’Épiphane sont déjà très brouillés. H. Achelis suppose qu’il s’agit d’un ancien partisan de Mélèce, revenu à l’Église catholique. De fait il insiste sur l’orthodoxie de l’évêque schismatique et sur son zèle pour défendre la saine doctrine ; il cherche une excuse à son attitude dans la question pénitentielle. On a souvent présenté son récit comme inconciliable avec celui du « document fondamental » ; ce n’est pas absolument exact, et nous avons essayé, avec Ed. Schwartz, d’utiliser l’un et l’autre. Mais la tentative de fusion proposée par H. Achelis dans l’art. Meletius von Lycopolls de la Protest. Realenc., t. xii, 1903, p. 558-562, nous paraît moins heureuse ; cet auteur l’a, d’ailleurs, partiellement abandonnée dans le Supplément, 1913, t. xxiv, p. 83, en reportant les origines du schisme en 306, au lieu de 311, date qu’exigeait sa première hypothèse.

II. Travaux.

Outre les histoires ecclésiastiques anciennes < voir surtout Tillemont, Mémoires, t. v, p. 453 sq. (762-763) et modernes (voir surtout Hefele-Leclercq, Histoire des conciles, t 1, p. 488 sq., L. Duchesne, Hist. anc. de l’Église, 1907, t. ii, p. 97-100, 147 sq., etc.) ; consulter Ed. Schwartz, Zur Geschichie des Athanasius, v, dans Nachrichlen von der k. Gesells. der Wissensch. zu Gotlingen, 1905, p. 164-187, qui analyse avec beaucoup de sagacité les deux sources anciennes.,

E. Amann.

3. MÉLÈCE LE GALÉSIOTE ou LE

CONFESSEUR controversiste grec de la seconde moitié du xme siècle. — Né en 1209 à Théodotou, petit village des bords de la mer Noire, il avait reçu au baptême le nom de Michel, qu’il changea en celui de Mélèce en prenant l’habit monastique au mont Sinaï, au cours d’un voyage, où il visita tout à tour la Palestine, l’Egypte et la Syrie, sans se fixer nulle part. Revenu en Asie Mineure, il s’arrêta au mont Latros, près de Milet, puis au mont Galésios, près d’Éphèse, dans le célèbre monastère fondé par saint Lazare le Galésiote. De là il se rendit au mont Saint -Auxence. en face de Constantinople, sur la côte d’Asie, d’où il redescendit bientôt pour s’établir dans l’îlot de Saint-André, sur le golfe de Nicomédie, où il se construisit un monastère avec diverses dépendances. Importuné par les visiteurs qui devenaient sans cesse plus nombreux, il remonta bientôt au mont Saint-Auxence. Il s’y trouvait encore en mai 1275, lors de la chute du patriarche Joseph et de l’avènement de Jean Beccos, prélat favorable à l’union avec Rome. L’orthodoxie paraissant en danger, Mélèce, accompagné d’un confrère du nom de Galaction, descend à la capitale et ne craint pas de reprocher son impiété à l’empereur latinisant Michel VIII Paléologue (1261-1282). Cette hardiesse lui coûte la liberté, et il est exilé, toujours en compagnie de Galaction, à la petite île de Skyros dans la mer Egée, d’où il part pour Rome en 1279, lors de l’ambassade auprès du pape Nicolas III de Léon d’Héraclée et de Théophane de Nicée. Au bout de deux ans, à l’avènement du pape Martin IV (1281-1285), cette mission revient en Orient, et Mélèce regagne son île de Skyros, d’où il ne tarde pas à être emmené à Constantinople par ordre de l’empereur, qui l’enferme dans la prison dite t£>v Nouu.spwv, et lui fait couper la langue. Mais, observe gravement le biographe, Mélèce n’en parla que mieux. Rendu à la liberté à l’avènement de l’empereur Andronic II (1282-1328), il tombe bientôt malade, et après trois années de