Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.1.djvu/266

Cette page n’a pas encore été corrigée
517
518
MELCHITE (EGLISE !


exclusif, bien qu’il convienne également aux orthodoxes. Cf. C. Charon, L’origine ethnographique des melkiles. dans les Échos d’Orient, 1908, t. sa, p. 82-91. Nous nous conformerons à la tradition commune en ne parlant que de l’Église mclehite unie à Rome.

Les origines.

L’hérésie monophysite était

devenue au vie siècle la doctrine religieuse de presque toute la Syrie, surtout après l’organisation de l’Église dissidente appelée jacobite, du nom de son fondateur Jacques Baraddaï. Les catholiques ne comprenaient qu’une minorité grecque ou fortement hellénisée qui continuait à demander ses directives à Constantinople. Tant que dura la domination des empereurs byzantins, leur situation demeura satisfaisante, malgré l’hostilité des hérétiques. Les invasions perses de 540, 576, 606, 613-615, avaient cependant causé bien des dévastations. L’arrivée des Arabes musulmans, en 635, rendit précaire la position des melchites, soupçonnés par leurs nouveaux maîtres de se faire les agents des Byzantins, tandis que les jacobites accueillaient les envahisseurs avec plus ou moins de sympathie pour se débarrasser de la domination détestée de Constantinople. Il s’ensuivit une émigration grecque considérable qui diminua fortement le nombre des fidèles. C. Karalewskij, art. Antioche, dans le Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques, t. iii, col. 589-90. Les premiers temps de l’occupation arabe ne virent cependant point de persécutions proprement dites. Si le Coran fut enseigné aux Syriens et si les chrétiens furent assujettis à un impôt spécial, les califes permirent aux diverses confessions de s’organiser librement en communautés autonomes, système que les Turcs imitèrent plus tard. La persécution ne commença que vers la fin du viie siècle. Il y eut de ce fait plusieurs vacances du siège patriarcal d’Antioche et quelques-unes furent de longue durée, comme celle de 702 à 742. Les Byzantins réussirent à occuper Antioche pendant plus d’un siècle (969-1085) et rétablirent l’autorité du patriarche dans la Syrie du Nord.

Le schisme.

Les melchites avaient toujours

suivi, même sous la domination arabe, les diverses phases de la politique religieuse de l’empire byzantin. C’est dire que leur union à Borne dépendait de la cour de Constantinople, puisque c’était par elle qu’ils conservaient quelques relations avec l’Occident. Beaucoup de leurs patriarches et de leurs évêques étaient d’ailleurs grecs ou de formation byzantine. Le schisme de Michel Cérulaire (1054) fit sentir ses funestes effets jusqu’en Syrie. Si le patriarche Pierre III hésita à suivre son collègue de Constantinople, il n’en fut pas de même de son successeur, Théodose III Chrysobergès, partisan avéré de Cérulaire, nommé au trône d’Antioche probablement en 1057. L. Bréhier, Le schisme oriental du XI’siècle, Paris, 1899, p. 231-236. Les relations avec Borne devenaient d’ailleurs difficiles. Les patriarches de cette époque furent pris exclusivement parmi le clergé byzantin, dont ils avaient naturellement les préventions antilatines mises en honneur par Photius et Michel Cérulaire. Le bas clergé, entièrement indigène et souvent ignorant, subissait l’influence de ses chefs. Le régime instauré par les croisés augmenta encore l’hostilité des melchites contre Borne. Depuis l’établissement d’un patriarche latin à. Antioche, les titulaires grecs résidaient le plus souvent à Constantinople, d’où ils dirigeaient le mouvement antiromain. L’un d’eux, Théodore IV Villehardouin, de la famille de ce nom et passé à l’orthodoxie grecque, souscrivit cependant à l’union proclamée au concile de Lyon en 1274. Bentrés en Syrie après le départ des croisés, les patriarches grecs d’Antioche résidèrent en divers lieux, surtout après la ruine de la ville. C’est probablement Pa côme I er qui transporta le siège à Damas, dans la seconde moitié du xiv » siècle.

Tentatives d’union.

Dorothée I" (1434-351451) se fit représenter au concile de Florence par

Isidore, métropolite de Kiev, acquis à l’union. Il semble que les décisions du concile furent bien accueillies en Syrie. Malheureusement le voyage que le métropolite de Césarée de Cappadoce, Arsène, fit à Jérusalem en 1443 détruisit en grande partie cette bonne impression et l’union fut éphémère. Allatius, De Ecdesise orientalis et occidentalis perpétua consensione, Cologne, 1648, t. III, c. v, col. 938-942. Le pape Calixte III, tout à l’idée de reprendre Constantinople aux Turcs, chercha à se ménager des alliances en Syrie et y envoya en mission Moïse Giblet d’origine française et probablement de rite byzantin. Moïse fit des ouvertures d’union au patriarche Michel II et gagna à la cause de Borne Joachim, évêque d’Epiphanie (Hama), en 1456. Il écrivit de Chypre à Marc III, frère et successeur de Michel III, une longue lettre sur le même sujet et lui envoya un discours de Grégoire Mammas, patriarche catholique de Constantinople. En février 1457, il vint trouver Marc III et finit par le décider à faire l’union. Un synode local rétablit le nom du pape dans les diptyques. Marc III se mit en relations avec Calixte III. Son successeur, Joachim II d’Epiphanie, était déjà catholique. A peine élu, il se rendit en Palestine, où il eut une longue conférence avec les patriarches Marc d’Alexandrie et Joachim de Jérusalem, qui se prononcèrent tous deux pour la reconnaissance du pape. Moïse Giblet, devenu le mandataire des trois prélats, se rendit à Borne pour remettre à Pie II leur acte d’union (1459). Cette démarche collective n’eut malheureusement pas de résultat durable, sans doute à cause du manque de relations suivies entre l’Orient et l’Occident.

La conquête de la Syrie par les Ottomans, en 1516, ne changea pas la situation des Églises chrétiennes, sauf que le patriarche œcuménique de Constantinople, devenu par la volonté des sultans le chef spirituel et temporel des orthodoxes de l’empire, fit tous ses efforts pour établir en Syrie une hiérarchie purement grecque. S’il réussit assez souvent pour le siège patriarcal, il ne put jamais en faire autant pour les sièges épiscopaux, qui restèrent toujours en nombre plus ou moins grand entre les mains des indigènes.

De nouvelles relations se créèrent entre Borne et la Syrie dans la seconde moitié du xvie siècle. Grégoire XIII avait envoyé en Orient un prêtre maltais, Léonard Abel, pour travailler à l’union des jacobites qui venaient de lui faire des ouvertures et faire accepter la réforme récente du calendrier (1583). Léonard, créé évêque titulaire de Sidon, se mit en relations avec le patriarche d’Antioche, Joachim V, qui éluda sa réponse sous prétexte de s’entendre avec ses collègues d’Alexandrie et de Constantinople, puis avec Michel VII, qui souscrivit la profession de foi qu’on lui présenta, voir Ab : l (Léonard), dans le Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques, 1. 1, col. 69, 70. Le vieux prélat mourut avant d’avoir pu travailler sérieusement pour la cause de l’union.

Les tentatives de rapprochement ne reprirent qu’avec le xviie siècle. Mélèce Karmi, devenu archevêque d’Alep en 1612, se préoccupait de reviser les traductions arabes qui supplantaient de plus en plus les syriaques. Pour atteindre ce résultat, il entra en relations avec Borne, afin d’obtenir des livres grecs et de bons traducteurs. La Propagande, nouvellement fondée, répondit avec bienveillance, mais ne crut pas devoir encore accorder ce qui lui était demandé. Les jésuites et les capucins s’établirent à Alep en 1625, les carmes en 1626 et travaillèrent également au rap-