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    1. MARONITE (ÉGLISE##


MARONITE (ÉGLISE. ÉPOQUE DES CROISADES

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C’est sous son pontificat qu’Innocent III adressa à l’Église maronite la bulle Quia divins sapientiæ.

De retour au Liban, il s’employa à une œuvre de réforme liturgique, notamment à la réforme du Pontifical des ordinations. Voir la lettre d’Ibn-Al-Qela’l dans Doualhi, ms. 395, fol. 98 r° ; la bulle d’Innocent III Quia divinse sapienlix ; la même bulle envoyée aux Maronites, par Alexandre IV, dans T. Anaïssi. Bullar., p. 2-13 ; P. Dib, Étude sur lu liturgie maronite, Paris (1919) p. 171. Il mourut en 1230. Douaïhi, Chronologie, p. 24.

Au xiir siècle, nous trouvons, après Jérémie. Daniel de Schâmàt, Jean, Simon, Jacob, Daniel de Hadschit. Luc. — Daniel de Schâmàt fut élu en 1541 (= 1230) ; il vivait encore en 1236. Douaïhi, Chronologie, p. 25. — Nous n’avons aucune date du pontificat de Jean. Douaïhi atteste son existence en se fondant sur les archives patriarcales. Annales, fol. 39 ; Chronologie, p. 20, 24, 25. — Quant à Simon, il était patriarche en 155(3 (= 1245) et vivait encore en 1277 comme il appert de deux notes citées par Douaïhi, Chronologie, p. 25. Il reçut plusieurs lettres pontificales dont la première De supremis cœlorum (9 août 1246), à l’occasion d’une mission apostolique en Orient, confiée à Fr. Lorenzo da Orte. Voir plus loin, col. 38. Puis, en 1256 Alexandre IV lui adressa de nouveau, à lui. à l’épiscopat, au clergé et au peuple maronites, la bulle Quia divinse sapientiæ qu’Innocent III leur avait déjà envoyée. Anaïssi, Bull., p. 9-13. — Le nom de Jacob, successeur de Simon, nous est donné par une inscription syriaque gravée, en 1746, au-dessus d’une fenêtre de l’ancien couvent de Meïphouq. Cf. Chebli, dans Revue biblique, 1901, p. 209 ; Ghabriel, Histoire t. ii, 1° part. p. 209. — Daniel de Hadschit lui succéda et, au rapport de Douaïhi, il reçut, en 1280, la bulle de confirmation, reproduction de celle d’Innocent III Quia divinse sapientiæ. Au reste, son portrait, placé dans l’église de son village de Hadschit, le représentait à genoux, revêtu des ornements sacrés et du pallium pontifical, la mitre sur la tête et l’anneau à la main, et recevant de l’apôtre Pierre le bâton pastoral. Douaïhi, Chronologie, p. 26 ; Défense, dans Chartoûnî, op. cit.. p. 374, n. 1. — Enfin, Luc aurait succédé à Daniel en 1283. On ne connaît pas d’une manière certaine le nom de son successeur. Douaïhi, Chronologie, p 17-18 ; Ghabriel, loc. cit., p. 210-212.

Il ne sera pas sans intérêt de rappeler ici une erreur commise dans la lecture d’une inscription syriaque de 1277, se trouvant dans le mur de l’église du couvent de Meïphouq. Douaïhi la cite — il n’a pas dû la voir lui-même — pour donner le nom du patriarche qui succéda à Simon. Chronologie, p. 25-26. Renan, qui n’est pas allé à Meïphouq, avait eu entre les mains deux copies de cette inscription. Mais celle qu’il reproduit dans sa Mission de Phénicie, p. 253-254, est semblable au texte de Douaïhi. Voici la traduction qu’il en donne : « Au nom de Dieu, vivant éternellement, en l’année 1588 de l’ère des Grecs, a été terminé ce temple jacobite de la mère de Dieu ; qu’elle prie pour nous… » p. 254-255. Douaïhi a lu dans le mot jacobite le nom du patriarche Jacob qui succède à Simon. Mais d’autres en ont conclu que le couvent de Meïphouq aurait été un centre monophysite. I.ainmens, Fr. Gryphon, ibid., p. 87. Or, l’inscription porte, on peut encore le constater aisément, ’Mourio (construction) et non pas ya’qouboïo (jacobite). Il faut donc traduire : « Au nom de Dieu… a été terminée cette construction du couvent de la mère de Dieu… » Chebli, dans la Revue biblique, 1901, p. 588. Le copiste, ayant remplacé le mot couvent par celui de temple, a supprimé le dûlath, signe du génitif, qui doit subordonner couvent à construction. Malgré cela, tel qu’il est reproduit par Douaïhi et par Renan, le texte n’est

pas conforme aux règles de la grammaire syriaque.

Les croisades donnèrent lieu, entre Rome et la Syrie, à de fréquentes allées et venues. Nous avons cité certaines lettres pontificales adressées, durant cette période, aux maronites. Il y en eut certainement d’autres que nous ignorons encore. En effet, au rapport d’Ibn-Al-Qela’i, les archives patriarcales contenaient, en 1494, plus de quinze lettres envoyées par le Saint-Siège. Ci-dessus, col. 35. Nous n’en connaissons que huit ou neuf. Les relations des papes avec les maronites ne se limitèrent pas à l’échange des .ettres. Il y eut aussi, de part et d’autre, un échange de missions. Ainsi, les catholiques du Liban reçurent plus d’une fois la visite de légats pontificaux. Ce fut d’abord le légat d’Innocent II, puis celui d’Innocent III. Cf. plus haut, col. 23, 25. En 1246, à la suite du I er concile de Lyon, Innocent IV chargea un frère mineur, Lorenzo da Orte, de visiter en son nom diverses Églises orientales et de régler certaines questions. Le pape annonça cette légation par la lettre De supremis cœlorum du 9 (et non pas du 6)août 1246, adressée aux chefs respectifs de ces Églises. Voir cette lettre et d’autres documents pontificaux concernant cette mission dans Sbaralea, Bullar. francise, t. i, p. 421422, 460-461, 475. Cf. Potthast, Regesta pontif. rcman., t. ii, n. 12546, 12630, 12636, 12637 ; Golubovich, Biblioteca, t. i, p. 215-216 ; t. ii, p. 349-350. Les maronites étaient compris dans cette mission ; à cette fin, le pape envoya un exemplaire de sa lettre à leur patriarche. Sbaralea, p. 422 C’est de cette mission que datent les premières relations de l’Église maronite avec l’Ordre de Saint-François. Golubovich, Biblioteca, t. ir, p. 349-350.

L’action du cardinal Pierre d’Amalfi, légat d’Innocent III, marque le début d’une latinisation officielle de la discipline maronite. Innocent III écrivait en effet : ’Quia vero dictus cardinalis, in quibusdam intellexit vos pati defectum, illum in vobis apostolica ; auctoritatis plenitudine supplere curavit, injungens… ut hanc formam baptizando servetis, quod in trina inimersione unica tantum fiât invocatio Trinitatis ; ut etiam corifirniationis utamini sacramento a solis episcopis conferendo ; et ne in confectione chrismatis aliquam speciem, nisi balsamum et oleum apponatis… Quse omnia vos, tanquam obedientise filii, dévote ac humiliter recepistis. Nos autem approbantes præscripta, et inviolabiliter observari mandantes, vos Fratres et Filios, quos débita charitate in Domino amplexamur, cum Ecclesiis in vestris provinciis constitutis, sub Beati Pétri et nostra protectione suscipimus, et præsentis scripti privilegio communimus, statuentes, ut pontifices in Maronitarum terminis constituti vestibus et insigniis pontificalibus sibi congruentibus juxta morem Latinorum utantur, Ecclesia ? Romanse consuetudinibus se in omnibus studiosius conformantes. Anaïssi, Bullar., p. 3-4.

Alexandre IV et Nicolas III, nous venons de le voir, adressèrent de nouveau la même lettre aux maronites. Devant ces instances pontificales, les patriarches, comme Jérémie, Daniel de Hadschit, eussent voulu appliquer les instructions venues de Rome ; ils tentèrent de les mettre en pratique. Douaïhi, ms. 395, fol. 98 ; Chronologie, p. 26. Mais, en fait, la réalisation de cette réforme conçue dans un esprit de latinisation, préparée par l’action des Croisés, se réduisit surtout à quelques détails extérieurs et d’importance secondaire, nous le verrons plus loin.

L’époque des croisades produisit une véritable renaissance dans l’Église maronite. Les monuments de l’art religieux nous en fournissent la preuve. « Si l’on excepte la période romaine, à aucune autre, l’art de la construction n’a déployé autant d’activité en Syrie. Dans les ports, chaque colonie marchande voulait posséder au moins, une église, ses caravansérails, ses bains. De cette époque datent lis nombreuses