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MEKHITARISTES


nuent à étudier la rhétorique, le latin et les sciences. Puis ils consacrent plusieurs aimées à la philosophie et à la théologie, après quoi ils sont ordonnés piètres et appliqués à divers emplois avant d’être envoyés en mission. Quand ils quittent le monastère ils reçoivent le titre de vartapel (docteur). Les religieux portent une double tunique à manches larges et le manteau à capuchon, le tout de couleur noire. Ils gardent la barbe longue, comme tous les moines orientaux. Leur nombre a bien diminué dans les quinze dernières années. En 1910, ils étaient 65 prêtres et 30 moines ; en 1925, ils ne comptaient plus que 39 prêtres, 6 clercs et 7 convers. Quatre des leurs ont été massacrés par les Turcs de 1915 à 1918. Depuis la dispersion des Arméniens à travers le monde, causée par la guerre mondiale, leur recrutement devient de plus en plus difficile.

Leurs œuvres ont également diminué d’importance et de nombre. Le monastère de Saint-Lazare à Venise reste le centre de la congrégation, la résidence de l’abbé-archevêque. Il possède une vaste imprimerie, une bibliothèque de plus de 30 000 volumes, une collection de 2.000 manuscrits arméniens dont le P. Basile Sarguissian a entrepris le catalogue raisonné (le premier volume a paru en 1914’et renferme les manuscrits de l’Ancien et du Nouveau Testament, in-4°, xx pages et 838 colonnes). Outre les multiples ouvrages qu’ils publient et dont nous parlerons plus loin (on en compte déjà plus de 800 en arménien et 200 en diverses langues européennes), les Mékhitaristes de Venise font paraître, depuis 1843, une revue mensuelle d’histoire et de littérature très appréciée des connaisseurs, le Pazmavèp (le Polyhislor). Ils exercent aussi un ministère actif, desservent à Venise même la petite église de la Sainte-Croix, construite aux frais des Arméniens, et dirigent deux collèges en Italie, celui de Venise, collège Raphaélian, fondé en 1836 grâce aux libéralités d’un riche Arménien de Madras, et un autre à Milan. Un troisième, le collège Mouradian, fondé à Padoue en 1834, installé à Paris de 1846 à 1878, fut uni plus tard à celui de Venise. En Turquie, il y avait en 1914, en dehors de Constantinople, plusieurs missions à Ismidt (Nicomédie), Bagtchédjik, Trébizonde, Mouch, Van, Bitlis. Il ne leur reste plus que le collège Saint-Grégoire-lTlluminateur à Constantinople ; encore a-t-il beaucoup perdu de son importance depuis le triomphe des. nationalistes turcs (1922). Les Mékhitaristes ont dû également abandonner leurs missions de Théodosia et de Simféropol en Crimée et de Salmas en Perse. A Rome, le pape Grégoire XVI leur donna l’église de Saint-Biaise, et l’hôpital pour les Arméniens qui lui est annexé. Le but poursuivi par Mékhitar en fondant sa congrégation a été en grande partie réalisé, car elle a restauré la littérature arménienne et conservé à sa nation les trésors de connaissances accumulés par les ancêtres, elle a initié les jeunes générations aux littératures et aux sciences de l’Occident. Nous avons indiqué plus haut, col. 497, les principaux ouvrages de Mékhitar. Ses disciples ont brillamment continué l’œuvre commencée et acquis chez les Arméniens, catholiques et dissidents, et dans lç monde entier, une réputation méritée de culture littéraire et scientifique. Nous ne prétendons pas donner ici la liste complète des livres composés par ceux de Venise et qui dépassent le millier ; nous nous contenterons d’indiquer les principaux auteurs et les meilleurs de leurs ouvrages. Remarquons d’ailleurs que ces derniers sont surtout consacrés à l’histoire, à la littérarure et aux sciences. Les écrits proprement ecclésiastiques des mékhitaristes, quoique assez nombreux, ne sont le plus souvent que des traductions ou des adaptations d’ouvrages orientaux ou occidentaux, anciens et modernes.

On y trouve cependant d’excellentes éditions arméniennes de l’Ancien et du Nouveau Testament, et de multiples manuels de piété en turc ou en arménien.

Pour la théologie proprement dite, signalons Avédikian, Sopra la processione dcllo Spirilo santo dal Pâtree dal Filio, Venise, 1824, ouvrage très estimé. Les mékhitaristes ont surtout étudié la patrologie. Ils ont donné des éditions pratiques des anciens auteurs arméniens, comme Moïse de Khorène, Zénobe de Glak, Elisée, Lazare de Pharbe, Fauste de Byzance, etc. Ils ont publié les œuvres du catholicos Jean Otznéti ou le Philosophe, du viiie siècle, Dom. Johannis philosophi Ozniensis Armeniorum catholici opéra per P. P. J.-B. Aucher, Venise, 1834, les œuvres poétiques du catholicos Nersès de Claj (xviie siècle), Venise, 1830, les œuvres en prose du même, édition Cappeletti, Venise, 1833, etc. Ils ont donné de nombreuses traductions des Pères grecs, comme l’Hexaméron de saint Basile, les Lettres de saint Ignace d’Antioche, des traductions d’ouvrages grecs et syriaques dont l’original avait disparu, et qui ne se conservaient plus que dans les versions arméniennes. Ils ont édité des livres liturgiques, comme la Lilurgia Armena, Iransporlata in italiano, du P. Avédikian, Venise, 1832, The Armenian Rilual, du P. Issaverdentz, 4 vol., Venise, 1863-1876.

L’ouvrage d’histoire le plus important est celui du P. Michel Tchamtchenian, Histoire de l’Arménie, 3 vol., Venise, 1784-1786. Le P. Alichian a publié Haïabadoum, histoire de l’Arménie, en deux parties, Venise, 1901-1902, où la critique est malheureusement en défaut. Le même auteur publia aussi divers travaux de géographie, comme la Topographie du distri< : l de Chirag, 1891, V Aïrarad, 1890, le Sissagan, 1893, le Sissouan, 1895, etc. Longtemps avant lui, le P. Indjidjian avait donné la Description de l’ancienne Arménie, 3 vol., Venise, 1835, et les Recherches archéologiques sur l’Arménie, 3 vol., Venise, 1835. Le P. Sarguissian avait publié la Topographie de la Grande et de la Petite Arménie, Venise, 1864. Citons encore Aivazovski, Seth, et -tant d’autres, qui ne s’occupèrent pas. seulement d’histoire et de géographie arméniennes, mais publièrent des ouvrages d’intérêt plus général et qui sont particulièrement appréciés.

Les mékhitaristes de Venise se sont préoccupés de fournir à la jeunesse arménienne des livres classiques, non seulement de littérature, mais encore d’histoire, de géographie, de sciences mathématiques et naturelles. Outre les auteurs nationaux dont ils ont donné mainte édition, ils ont traduit en arménien de nombreux ouvrages grecs et latins, et de multiples œuvres modernes en diverses langues européennes. Les questions de linguistique les ont également passionnés. Aussi ont-ils fourni un nombre considérable de dictionnaires, de grammaires et d’études variées sur la langue arménienne. Plusieurs d’entre eux se sont révélés des poètes remarquables, comme les frères Hurmuz, dont l’un, Mgr E. Hurmuz, traduisit l’Enéide et les Églogues de Virgile, et donna un poème, le Jardin, en quatre chants. Le P. Alichan a publié plusieurs volumes de poésies anciennes et modernes, et en a composé lui-même un grand nombre, Œuvres poétiques, 5 vol., 1857-1858, Souvenirs de la patrie’arménienne’, 1869-1870, etc. Le même auteur a publié des études critiques de divers auteurs arméniens anciens. Mgr Sukias de Somal, dans son Quadro délia letteratura armena, Venise, 1829, donne, siècle par siècle, une idée juste et raisonnée des produits de la littérature arménienne.

Cette rapide esquisse suffit à montrer l’activité littéraire et scientifique des mékhitaristes de Venise depuis deux siècles qu’ils existent. On en aura une idée plus complète en parcourant l’ouvrage du P. Ar-