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    1. MARONITE (ÉGLISE)##


MARONITE (ÉGLISE), LES MARONITES ET LE MONOTHÉLISME

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probablement au xiii siècle (ms. Barberini il de la Vaticane), l’antre en 1475 (ms. syr. 225 de la Bibliothèque nationale de Paris) et la troisième en 1550 (bibliothèque du couvent de Koraîm au Liban, citée par Darian, op. cit., p. 224-229). Voir aussi, à la Vaticane. le ms. rat. arab. 623. C’est un ouvrage d’un célèbre écrivain copte du xme —xive siècle, Abou’l-Barakat, qui rapporte, à la page 236, que les jacobites avaient remanié et adapté à leur Églis _e Commentaire des Évangiles, écrit par un prêtre nestorien, Abou’l-Farag Ibn-El-Tayyeb.

Si de plus on tenait compte de la situation des maronites, petit peuple entouré d’hérétiques et d’infidèles, bouleversé par des siècles d’oppression et de terreur, on ne serait plus étonné de rencontrer chez eux quelques tâtonnements, certaines surprises OU erreurs matérielles imputables à l’ignorance. Il De faut jamais oublier ces circonstances de temps et de lieu quand il s’agit de porter un jugement sur la question maronite. On n’avait point d’écoles de théologie, ni d’autres centres de culture intellectuelle. Les menaces et les épreuves de toute sorte absorbaient l’attention. Cependant, malgré le souci constant d’être prêt à se défendre contre les nombreux ennemis religieux et politiques, on ne perdait pas de vue le devoir de fidélité à l’Église de Rome. Et c’est ce qui explique pourquoi, au cours des âges, le clergé et le peuple maronites accueillaient toujours avec déférence les ordres et les directives du Saint-Siège.

Bref, un passage que l’on rencontre dans un livre même ecclésiastique, ne traduit pas nécessairement la croyance de l’Église à laquelle appartient l’auteur ou le copiste ; cela est vrai tout aussi bien pour les catholiques que pour les communautés non catholiques.

Quant aux auteurs anciens et modernes qui ont soutenu la thèse du monothélisme maronite, ils se sont fondés ou bien sur les apparences, ou bien sur certains textes pris séparément. Ils n’ont pas envisagé l’ensemble des faits et des circonstances historiques, ni mis en valeur l’étude comparative des documents. La plupart d’entre eux se sont copiés les uns les autres et beaucoup ont eu pour source directe la chronologie d’Eutychès d’Alexandrie (Sa’îd Ibn Batriq). qui n’est rien moins que sûre, notamment pour les événements dont l’auteur n’a pas été témoin. De plus, certains textes ont été interpolés, mal interprétés ou faussement attribués à des écrivains anciens. Il serait trop long de passer en revue tous les auteurs et tous les textes. Il nous suffira d’en citer, à titre d’exemples, quelques-uns parmi les plus représentatifs.

a) Timothée, prêtre de Constantinople († 518) a composé une dissertation intitulée : De iis qui accedunt ad sanctam Ecclesiam (tezçt. twv Trpoæp/ofxcvcov xfj : j.yia. èxxXrata). On y trouve parmi les hérétiques :

Maronita>, qui quartam et quintam, ac sextam synodum rejiciunt, adduntque liymno Tersanctus crucifixionem, ac unam voluntateni unamque operation°m in Christo docent. Dans ]-". Combefis, Hixloria hæresis monothelitarum, Paris, 1648, col. 459.

Or, Timothée était encore prêtre lorsqu’il écrivit cette dissertation ; il monta sur le siège de Constantinople en 511. Par conséquent, ce texte, se rapportant à des événements bien postérieurs, ne peut être de lui. Aussi bien, il manque dans un grand nombre de manuscrits. Voir Combefis, toc. cit., col. 464 ; Assémani, Bibl. orient., t. i, p. 509 ; P. G., t. Lxxxvia, col. 65, n. 53 ; S. Vailhé. Origines religieuses des maronites, dans les Échos d’Orient, 1901, t. iv, p. 159. Toutefois, Mgr David le cite contre la thèse de la perpétuelle orthodoxie des maronites sans vouloir s’occuper de la question de son authenticité. Pour lui, le fait de le

rencontrer dans un livre officiel à l’usage de Constantinople représente l’opinion de l’Église grecque sur les sentiments religieux du peuple maronite. Op. rit., p. 316. Mais l’inexactitude de ce texte ne peut échapper à personne. L’auteur affirme des choses qui se trouvent contredites par les données positives de l’histoire. Nous avons démontré, en effet, l’attachement des maronites aux IVe et V° conciles ; nous avons prouvé leur ignorance du VI e.

Voilà un document sur lequel on se fondait à Constantinople pour taxer d’hérésie l’Église maronite.

b) Saint Germain, patriarche de Constantinople (715-730), nous a laissé un traité : De hæresibus et synodis, P. G., t. xcviii, col. 39-88. On y lit :

Et quas quidem hactenus commemoravi, ea* sunt capitales hsereses, et qua ? inter cæteras eminent ex ipsis instar propaginum derivatas. Jam quidam ex his hæreticis, sexta rejecta synodo, quintam quoque subvertunt ; alii, hls duabus rejectis, quartam recipiunt, hique cum Jacobitis bellum gerunt ; qui hos vicissim insanos judicant, quia quartam recipientes, reliquas duas récusant admitterc ; quod ii faciunt qui Maronitae appellantur. Horum exstat monasterium in Syrise montibus aedificatum, quorum plerique omnino sextam imo et quintam quartamque synodum respuunt. Quippe qui quartam admiserit, sextam quoque amplectatur necesse est, si certe ratiocinio ac mente non careat ; etenim sextae synodi radix, ut ita dicam, fundamentum, ac firma basis, ipsa quarta est. Loc. cit., col. 82.

Ce passage témoigne d’un manque d’ordre dans les idées et d’unité dans la composition. Après avoir rangé les maronites parmi les partisans du IVe concile, l’auteur se rétracte, pour ainsi dire, et fait passer le plus grand nombre d’entre eux au camp ennemi. Puis, pour les convaincre d’illogisme à propos du VIe concile, il s’appuie Sur leur attachement à celui de Chalcédoine. Tout cela est de nature à jeter un doute sérieux sur l’authenticité de ce texte qui serait retouché par une main postérieure, ou même interpolé dans l’œuvre de saint Germain. Cette hypothèse est d’autant plus vraisemblable que le patriarche de Constantinople ne pouvait guère ignorer les polémiques doctrinales qui mettaient aux prises maronites et monophysites et la fidélité des premiers à la cause chalcédonienne. En outre, même l’authenticité de ce passage supposée, cela ne changerait rien à nos conclusions. En effet, le texte dont il s’agit, qu’il appartienne réellement à Germain ou à un autre écrivain, est en contradiction manifeste avec les faits avérés de l’histoire du monophysisme en Syrie. D’autre part, le patriarche de Constantinople a composé son traité, à la demande du diacre Anthime, peu après avoir démissionné, vers le milieu de janvier 729. C’était donc à l’époque où la question monothélite venait de diviser le parti chalcédonien de Syrie. Nous avons vu comment la discussion fut portée à la connaissance des maronites et dans quel sens elle fut comprise par eux. Si Germain qui se trouvait à Constantinople avait pu apprendre le fait de cette discussion, il ne lui était guère loisible d’en saisir les nuances. Il eût fondé son jugement sur de simples bruits, colportés de loin par des personnes de la partie adverse ou des gens peu ou mal renseignés sur la nature du conflit. D’ailleurs, nous avons démontré qu’à cette époque les maronites n’avaient pas encore connaissance du VIe concile.

c) Dans les ouvrages de saint Jean Damascène, il est question des maronites une première fois dans le Libellusde recta sententia ; puis dans la lettre à l’archimandrite Jordanès De hymno trisagio. Aux deux ouvrages, ils sont mentionnés d’un mot. Le Libellai de recta sententia est une profession de loi. rédigée vers 726 pour être adressée, au nom d’Élie, évêque de Iabroud, à Pierre, métropolite de Damas. Quant à la lettre à Jordanès. elle fut composée aprè la mort de