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MASSORE


les deux leçons alternantes condamnant a « la destruction la cité de Beth-Sehaneseh », ville du soleil, Héliopolis… Voir, au surplus, Dictionn. de la Bible, Paris. 1912, t. iii, col. 992, 993.

L’Ecclésiaste soulève le problème de l’immortalité de l’âme et le pose sous forme inlerrogative : « Qui connaît, dit-il, le souille de l’homme ? est-ce qu’il monte vraiment en haut… ? « , iii, 21 : avec peut-être le doute qu’il n’en est rien, mais doute provisoire et cartésien, puisque la solution affirmative est donnée plus loin, mi. 7 : » Le souflle de ( l’homme) retourne à Dieu qui l’a donné. » Toutes les versions ont entendu en ce sens le n initial de l’hébreu, hà’ôlâhl Mais la Massore s’est émue quelque jour de ce semblant de scepticisme et a fait, par une ponctuation particulière, de l’interrogatif un relatif : « Qui connaît le souffle de l’homme, qui monte en haut… ? » : ce qui sonne mieux assurément aux oreilles pies, mais n’en détruit pas moins l’harmonie de l’argumentation dans tout le passage : hâ’ôldh.

Aucune de toutes ces altérations, pour importantes qu’elles soient très souvent au point de vue de l’intelligence et de la clarté du texte, ne détruit rien de la croyance juive et n’y change rien de caractéristique ou d’essentiel. Il en est de même de certaines divergences parfois considérables qui existent entre notre recension massorétique, et la recension hébraïque supposée par les Septante dans les Prophètes et les Hagiographes. Le grec de I Reg., xviii, 6-xrx, 1, fournit par exemple un texte beaucoup plus court que l’hébreu, dans un récit parfaitement ordonné et vraisemblable que déparent et affaiblissent considérablement les additions visiblement postérieures faites au texte massorétique. Dans le livre grec de Jérémie un discours du prophète, xxv, 1-13, sert d’introduction à une série d’oracles contre les Gentils, xxv, 14-xxxi, que l’hébreu a reportés beaucoup plus loin, et dans un ordre tout différent, à la fin du livre : xlix, 34-39 ; xlvi ; l-li ; xlviii, 1-7 ; xlix, 7-22 ; xux, 1-5 ; xlix, 28-33 ; xlix, 23-27 ; xlviii. Voir ci-dessus, t. viii, col. 849 sq. Le psaume ix (grec) alphabétique a été coupé en deux dans l’hébreu, ix et x, avec suppression de trois strophes, addition d’une strophe nouvelle, ix, 20-21, et dérangements dans l’ordre des versets. La partie poétique du livre de Job contient dans l’hébreu massorétique une foule de développements qui n’existaient pas dans le texte primitif des Septante….Mais ces éléments nouveaux, apparemment introduits dans ce livre de Job et dans celui des Rois par des recenseurs s’autorisant de textes plus complets, encore qu’ils intéressent le développement doctrinal et l’histoire sainte, n’y modifient rien de traditionnel ni d’essentiel, et les remaniements subis par le livre de Jérémie et par celui des psaumes n’ont de portée qu’au point de vue littéraire pour le premier, et, pour le second, qu’au point de vue exclusivement liturgique, qui paraît bien avoir dominé dans le temple et dans la synagogue l’arrangement de la collection. « Plus grave assurément serait l’accusation portée contre les Juifs par quelques Pères des premiers siècles d’avoir altéré le texte de l’Ancien Testament dans les passages qui étaient favorables aux chrétiens, si elle était fondée sur des faits réels. Ainsi Justin, Dial.,

71, 84. P. G., t. vi, col. 644, 673, reproche aux Juifs de lire dans Isaïe, vii, 14, veôcvtç « jeune fille », au lieu de 7rxp6évoç « vierge » ; comme aussi, Ibid.,

72, 73, col. 644-645, d’avoir supprimé dans le psaume xevi, 10 Cgrec et Vulg. xcv) les mots : ànb toû Ç’iXou, (psautier romain : Dominus regnavit a ligno). Tertullien, De cultu jem., i, 3, P. L., t. i, col. 1308, dit aussi que les Juifs ont retranché des Écritures plusieurs choses concernant le Messie : rejecta… csetera

quæ Christian sonant. Origène, Ad A/riçan, , 19, P. G., t. xi, col. 69, 72, paraît faire planer sur les livres hébreux le soupçon de fraude en assurant que hoc solum pro vero habendum in Scripluris divinis quod Septuaginta interprètes (ranstulerunt ; nam id esse solum quod auctoritale apostolica confirmatum sit. Cf. In Jerem., hom. xvi, 10, ibid., t. xin.cOl. 149, 452. Saint Jean Chrysostome, In Matlli., hom. v, 2, P. G., t. lvii, col. 57, formule un semblable soupçon à propos d’Isaïe, vii, 14 : Posl Christi adventum interpretati sunt Judœique manserunl, unde in suspicionem cadunt utpole qui ex inimicitia sic potius dixerint (non virginem, sed puellam), ac prophelias de industria obscure converterinl. — Ajouter ici l’accusation séculaire d’avoir altéré sciemment dans le psaume xxii (xxi) 17, le mot si expressif kâ’ûrû (ou kâ’rû), copoÇav, fodf.runt tnanus meas et pedes meos, en celui, inintelligible, de kà’âri, sicut leo.

On aura remarqué déjà que pour Is., vii, 14, Justin condamne non le texte hébreu, mais la traduction grecque d’Aquila ; que sa critique porte non sur la teneur elle-même, mais sur l’interprétation ; et que pour le psaume xevi, 10, la leçon a ligno, à.nb toû ÇùXou, n’a de répondant dans aucun manuscrit hébreu, ni dans aucune version faite directement sur l’hébreu : elle ne peut venir que de la xoivy], vulgate hellénique, pro locis et temporibus et pro voluntate scriptorum, velus corrupta editio. S. Jérôme, Epist., evi, Ad Sunniam et Fretellam, 2, P. L., t. xxii, col. 838. D’autre part, Tertullien vise simplement le livre apocryphe d’Hénoch, qu’il tenait pour canonique, et n’atteint ainsi qu’indirectement les Écritures divinement rétablies, selon lui, par Esdras après la captivité. De son côté, saint Jean Chrysostome n’accuse nullement les Juifs de falsification du texte hébreu, mais visiblement d’avoir à dessein traduit de manière obscure les prophéties messianiques. Quant à Origène, non seulement il ne donne aucune preuve du fait qu’il avance, mais au témoignage de saint Jérôme, In Isaiam, vi, 9, P. L., t. xxiv, col. 99, il se prononce, in octavo volumine Explanationum Isaiæ en faveur des Juifs. Et Jérôme lui-même, qui « soupçonnait » que les Juifs avaient retranché quelques mots du Deutéronome pour échapper à la malédiction, In Ep. ad Gal., t. II, t. xxvi, col. 357, n’est point trop affirmatif : Ineertum habemus utrum Septuaginla interprètes addiderint…an in veteri Hebraico ita fuerit, et postea a Judœis deletum sit. Et on peut dire en effet que la comparaison de la Bible hébraïque et de la Bible grecque ne trahit en réalité, dans aucun cas, une altération du texte hébreu qui aurait été faite en vue de combattre les interprétations reçues parmi les chrétiens.

Les docteurs juifs doivent être aussi innocentés de la corruption volontaire du texte de Ps., xxii, 17. Bien que la leçon kâ’âri soit prédominante, il n’a pas manqué de « manuscrits corrects » où la leçon traditionnelle des Bibles grecques et latines, kâ’ûrû, se rencontrait dans le texte même, bien que notée d’un qerê, au témoignage de l’éditeur de la Bible rabbinique de Venise, 1524-1525, Jacob ben-Chayim, t. iv, Mass. finalis, lettre Aleph. Du reste la massore du passage signale pour le mot, avec une vocalisation particulière, un « sens différent » de sicut leo et en fait en conséquence, un verbe. Celle de Num., xxiv, 9, certifie pour le psaume la lecture kâ’ârû, foderunl, au ketib. Et c’est en vain que des critiques comme Hupfeld, Die Psalmen, Gotha, 1858, t. ii, p. 25 et Bær, Liber psalmorum (édit. massor.), Leipzig, 1880, p. 91, accusent Ben-Chayim d’avoir falsifié lui-même la Massore dans ces passages « pour la gloire de Dieu et pour plaire à son imprimeur chrétien » ; car » tout important Codex avec la Massore reconnaît au ino