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MASSORE

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Le texte courant d’abord écrit en caractère hébréophéniciens, et graduellement retranscrit en caractères carrés. Sanhédrin, 216-22 b ; Megilla^ i, 9, se trouve divisé clairement en mots séparés par un intervalle, conformément au sens qui lui a été attribué traditionnellement. Toutefois cette division n’a pas dû être tout à fait identique dans les manuscrits, la Massore même donne deux listes de mots qui doivent être divisés autrement que dans le texte reçu, i.es sopherim occidentaux (palestiniens) et les orientaux (babyloniens ) divisaient différemment, par exemple, III Reg., xx, 33 ; et assez nombreux sont les passages où les Septante présupposent une division en conflit avec l’actuelle. Ginsburg, Introduction to the Massorelicocritical édition oj the. hebrew Bible, Londres, 1897, p. 158-162 et 296. Les lettres finales ont été définitivement adoptées. Megilla, i, 9 ; Ginsburg, p. 297299. Il y a encore. quelques abréviations. Ginsburg, p. 165-170. Graduellement les consonnes quiescentes (maires lertionis) de valeur vocalique se sont multipliées pour faciliter la lecture dans un texte originairement dépourvu de voyelles : mais ici encore diverses étaient les lectures dans les diverses écoles de sopherim, comme le révèlent le contrôle ou la comparaison des passages parallèles du texte lui-même, du Samaritain, des Septante et anciennes versions, et des manuscrits occidentaux et orientaux. Ginsburg, p. 137-157.

Plusieurs particularités attiraient d’autre part l’attention du lecteur. Quinze mots en tout (dix dans le Pentateuque, quatre dans les Prophètes, et un dans les Hagiographes) étaient surmontés de points, sans plus d’explication. Divers documents post-bibliques en donnent la liste pour le Pentateuque, en particulier Siphra, Num., ix, 10. C’étaient : Gen., xvi, 5 ; xviii, 9 ; xix, 33 ; xxxiii, 4 ; xxxvii, 12 ; Num., iii, 39 ; ix, 10 ; xxi, 30 ; xxix, 15, et Deut., xxiv, 28. Le Codex babulonicus (ms. des Prophètes, an. 916, de Saint-Pétersbourg) a trois fois la liste complétée par l’addition de ; Is., xliv, 9 ; Ez., xli, 20 et xlvi, 22 ; II Reg., xix, 20 et Ps., xxvii, 13. L’examen soit, en premier lieu, de la raison donnée par le Siphri, soit du Samaritain et des anciennes versions où font défaut plusieurs des mots en question, prouve que l’intention des sopherim était de les exponctuer comme apocryphes et inauthentiques. Les manuscrits révèlent que la liste en pourrait être augmentée ; et l’on peut dire que « ces points offrent le plus ancien résultat de la critique textuelle de la part des sopherim ». Ginsburg, p. 318-334. En quatre autres passages : Jud., xviii, 30 ; Ps., lxxx, 14 ; Job, xxxviii, 13 et 15, une lettre dite suspendue, parce que placée au-dessus des autres pour être intercalée parmi les syllabes au cours de la lecture, indiquait un autre expédient des sophe rim à l’effet de marquer des variantes admises dans différentes écoles. L’une d’elles, Jud., xviii, 30, a une importance particulière au point de vue de l’intégrité du texte. Voir plus loin. Enfin, nouveau signe, et des plus anciens, imaginé pour indiquer un résultat critique : c’est le noun dit « séparé », ou « inversé », qui marquait comme de crochets ou parenthèses les neuf passages : Num., x, 35 et 36 ; Ps., cvii, 23 à 28 et 40, afin d’avertir que ces passages sont transposés et hors de place. Siphra, Num., x, 35 ; Sopherim, vi, 1 ; Sabbath, 115 6-116 a. Cf. Septante pour Num., x, 3536. Ginsburg, p. 334-345.

Le Talmud et la Massore nous apprennent, au surplus, que beaucoup de leçons furent introduites par les sopherim dans la lecture des textes sacrés comme partie intégrante de ces textes, et d’abord à titre de tradition orale, en attendant qu’elles fussent indiquées de manière ou d’autre à la marge. Ainsi fut imposée la prononciation de certains mots ; ce sont les

miqra’sopherim, « prononciation de scribes ». Une lettre (le iwi>conjonctif)dut être retranchée au commencement de deux ou trois mots dans les cinq passages : Gen., xviii, 5 ; xxiv, 55 ; Num., xxxi, 2 ; Ps., xlviii, 26 et xxxvi, 7 ; ce sont les’îttûr sopherim « retranchement de scribes » : simple question d’élégance de style, selon Raschi. et qui n’aurait pas son application uniquement dans ces cinq cas. Ginsburg, p. 309. Des mots durent être « lus » bien que « non écrits », qerê velâ’ketîb ; le Talmud en mentionne six dans II Reg., viii, 3 ; xvi, 23 ; Jer., xxxi, 38 ; l, 29 ; Ruth, ii, 11 ; iii, 5 et 17 ; La Massore en ajoute quatre autres : Jud., xx, 13 ; II Reg., xviii, 20 ; IV Reg., xix, 31 et 37. Des manuscrits offrent même un espace blanc laissé comme à dessein à la place de ces mots. D’autres mots, par contre, « écrits » n’étaient « pas lus », ketîb velâ’qerê ; selon le Talmud : IV Reg., v, 18 ; Jer., xxxii, 11 ; li, 3 ; Ez., xlviii, 16 ; Ruth, iii, 12 ; la Massore du Codex babylonicus ajoute : II Reg., xiii, 33 ; xv, 21 ; Jer., xxxi, 11 ; xxxviii, 16 ; xxxix, 12. Lecollationnement des manuscrits pourrait allonger la liste de tous ces cas. Nedarim, 376-38 a et Ginsburg, p. 308-318.

Les plus importantes de ces lectures officiellement prescrites sont les qerâïn proprement dits et les sebirin. Ici, c’est la foule envahissante. L’édition Dær du texte massorétique relève environ quinze cents des premiers ; celle de Ginsburg note, en plus, trois cent cinquante sebirin. Et il se découvre toujours dans les manuscrits nouvellement connus et collationnés de nouveaux cas des uns et des autres. Il y a qerê, « à lire, » lorsqu’un mot du texte le plus souvent ou choquant, ou étrange, ou incorrect, ou incompréhensible doit être remplacé par un autre plus convenable, plus naturel, plus correct, plus logique. Il y a sebîr, « opinion », dans la même occurrence, sans que soit estimée nécessaire cette substitution de mots. Toutefois, la frontière entre ces deux groupes est restée quelque peu flottante : dans les manuscrits et même dans les éditions massorétiques çwdïn et sebirin s’interchangent parfois ; et lessebirin, dédaignés à tort par les éditions manuelles de la Rible hébraïque, ont souvent autant et plus d’importance que les qerâïn pour la clarté du texte. Et encore cela n’a-t-il rien d’absolu : les leçons prônées par ces lectures traditionnelles ne sont pas toujours à préférer à celles du texte, surtout quand, au lieu de reposer, comme ce dut être le plus souvent le cas, sur le témoignage de manuscrits antérieurs à la fixation du texte, elles sont plutôt le fruit de spéculations théologiques. En fait, de par la décision des sopherim, nombre de ces dernières ont réellement pénétré dans le texte lui-même où elles ont définitivement remplacé des leçons primitives et authentiques : la liste en constitue le tîqqûn sopherim, « correctoire de scribes », que nous étudierons plus loin. Enfin, toutes ces lectures et corrections doivent avoir été admises et enjointes en des temps fort anciens, vu que le Talmud interdit d’introduire dans la récitation publique de la Loi quelque altération du texte que ce soit, voire par déférence et. révérence envers la divinité ou par raison de bienséance. Megilla, 25 a ; Schebuoth, 36 a. Voir plus loin.

L’activité des Sopherim ne s’est pas limitée à ces indications critiques demeurées apparentes dans leur texte. On sait qu’ils ont compté, supputé, pesé, catalogué à l’infini et à divers points de vue les versets, les mots et jusqu’aux lettres de ce texte, avec encore beaucoup d’autres détails non toujours indifférents, tant s’en faut, bien que présentés sous des formes parfois énigmatiques. En énumérer simplement tous les chefs serait fort long et, eu égard à notre but, superflu. II suffira maintenant de dire que, dignes successeurs et fidèles disciples des scribes, les masso-