Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.1.djvu/128

Cette page n’a pas encore été corrigée

! ’iJ

MAKTYRK. IIISTOI HK

242

les luthériens que contre les catholiques fidèles à

l’autorité de Home. A son tour, sa tille. Marie, exécutera les anglicans avec une ardeur implacable.

Hume. The History of Ep gland jrom the invasion oj Julius Civsar te the Révolution in 168ê, Londres. 171)2. vante « la fermeté inflexible qui leur fit braver les dangers, les tourments et la mort même ». Bossuet parle au contraire de l’entêtement de parti » et. dans son Cinquième avertissement aux protestants sur les lettres de M. Jurieu, fait remarquer combien < ce courage forcené ressemble peu à la constance véritable, toujours réglée, toujours douce et soumise aux ordres publics, telle qu’a été celle des martyrs »,

Mais ceci peut sembler de la polémique. Aujourd’hui, le théologien peut juger les protestants morts pour leur convictions religieuses avec moins de sévérité et reconnaître que ceux qui moururent avec courage et sincérité, purent avoir le mérite du martyre : néanmoins ils n’en auront point à nos yeux l’auréole, car l’Eglise reste fidèle à la sentence traditionnelle formulée par saint Augustin : Causa, non pœna, martyrem jæit. Comme l’enseignait à la Sorbonne le futur cardinal Perraud : « 11 était incontestable qu’ils avaient souffert, souffert avec une invincible constance, souffert des supplices semblables à ceux que le paganisme expirant avait fait souffrir aux disciples du Crucifié. Il y avait là un élément de séduction bien propre à troubler les consciences les plus généreuses. » Le protestantisme sous Charles IX, dans Revue des cours littéraires, 1870. — Nous pouvons appliquer les mêmes principes aux prêtres assermentés qui mourront Victimes de la Révolution française, expiant leurs erreurs passées par le refus héroïque d’apostasie.

Si donc le théologien refuse, à bon droit, le titre de martyr à ces hérétiques morts avec intrépidité pour leurs convictions religieuses, ce n’est pas qu’il mette en doute leur courage et leur sincérité, ce n’est pas qu’il méconnaisse l’influence profonde produite par leur mort sur ceux dont ils affermissaient ainsi les convictions erronées.. Il y a des points d’histoire qui, par leur certitude, échappent à toutes les discussions théoriques.

2. Victimes des protestants. - Ces victimes furent beaucoup plus nombreuses que les martyrs de la Réforme.

Bossuet, Cinquième avertissement, dit fort justement : « Ceux qui nous vantent leur patience et leurs martyrs sont en effet les agresseurs, et de la manière la plus sanguinaire. » Il nous suffit de rappeler sommairement les principes des réformateurs. Le doux Théodore de Bèze affirmait avec vigueur : Libertas conseientiarum diabolieum doyma. Luther, Propos de table, iii, 175, disait : o Avec les hérétiques on ne doit pas discuter : il faut les condamner sans les entendre, et. pendant qu’ils périssent par le feu, les fidèles devraient poursuivre le mal jusque dans sa source, en baignant leurs mains dans le sang des évêques catholiques et du pape, qui est le diable déguisé. » Et Mélanchthon, Opéra, édit. Bretschneider, t. ix. p. 177 :

Il est très sévèrement commandé par l’Écriture aux magistrats politiques de détruire en tous lieux, à main année, les statues qui sont l’objet de pèlerinages et d’invocations, et de punir par des supplices corporels les inguérissables qui conservent avec obstination le culte des idoles. Calvin. Lettres, édit. Bonnet, t. n. p. 207, recommande de réprimer par le glaive les gens obstinés aux superstitions de l’Antéchrist ».

Ce sont ces principes que l’on vit appliquer contre les catholiques par les pseudo-réformateurs partout où ceux-ci arrivèrent au pouvoir. C’est ce que nous allons montrer brièvement.

a) Luthéranisme. La Réforme s’opéra par les profanations, le sac des églises, la destruction des

monastères, le bris des images, la confiscation des biens ecclésiastiques, l’exil imposé aux prêtres et laïques fidèles au catholicisme. Néanmoins il y eut peu de sang versé ; des catholiques furent mis à mort à la suite d’émeutes populaires, d’attentats individuels, non de sentences judiciaires. La raison vient surtout de ce que, dans les contrées allemandes, il n’y eut guère de résistance à la Réforme, dès qu’elle fut proclamée par les princes.

Par contre il y en eut en Suède, où Gustave Wasa recourut à l’astuce et à la violence ; en Danemark, où tous les évêques furent incarcérés ; en Norvège, où les évêques durent s’enfuir pour éviter un sort semblable ; en Islande, où un évêque fut mis à mort.

b) Calvinisme. a. Pays-Bas. — Les Gueux commirent des profanations et des atrocités sans précédent. A la prise de Brielle (1572), les 184 prêtres qui refusèrent d’apostasier furent mis à mort. Trois mois après, les 19 martyrs de Gorcum furent pendus. Leur admirable mort a été racontée par Estius ; ils furent canonisés en 1867.

b. France. — Bien avant le crime politique de la Saint-Barthélémy, des massacres prémédités de catholiques s’accomplirent dans toutes les provinces, Normandie, Orléanais, Maine, Dauphiné, Languedoc, Provence. Les huguenots, aidés du baron des Adrets, s’emparèrent de Lyon en l’an 1562, mirent les églises à sac et chassèrent prêtres et moines. Le cardinal de Lorraine pourra dire au concile de Trente : « Trois mille religieux français ont subi le martyre pour n’avoir pas voulu trahir le Siège apostolique. » On peut en voir le détail dans le Theatrum crudeliiatis hiereticorum. Anvers, 1587. Voir, p. 42, plus de 120 personnes martyrisées, en moins de 2 ans, dans le seul diocèse d’Angoulême. Citons les jésuites Salez et Saultemouche que Pie NI vient de béatifier. J. Blanc, Les martyrs d’Aubénas, Valence, 1906. Les camisards immolèrent un grand nombre de catholiques dans les Cévennes. Jeanne d’Albret décréta, en 1571, dans son royaume du Béarn l’abolition du culte catholique. Bossuet déclare : « Une infinité de prêtres, de religieux, de catholiques de tous états ont été massacrés dans le Béarn par les ordres de la reine. Jeanne, sans autre crime que celui de leur religion ou de leur ordre. » Cinquième avertissement. Le culte catholique n’y fut rétabli qu’un an après Ledit de Nantes.

c. Suisse. — La Réforme de Zwingle et de Calvin s’imposa par la violence. Le plus illustre martyr est le capucin Eidèle de Sigmaringen assassiné en 1622 et canonisé en 1746. Un des paradoxes les plus curieux, ne s’expliquanl que par une foncière ignorance de l’histoire, est de nous voir reprocher certaines victimes du fanatisme de Calvin lorsque sa fureur aveugle s’étendit même sur les adversaires du dogme catholique.

d. Hongrie. Luthériens et calvinistes se disputaient la prépondérance ; les catholiques furent persécutés par les deux partis. Tous les chanoines de Grosswarden furent massacrés en 1566, pour avoir refusé de se marier et d’embrasser le nouvel évangile. En 1619, Rakoczy, lieutenant du calviniste Dethlen Gabor, envahit la ville de Kaschau et fit mourir, après les pires supplices, le chanoine Crizin et les jésuites Grodecz et Pougracz. Ces trois martyrs ont été béatifiés en 1905.

c) Anglicanisme. La persécution commence en 1535 sous Henri VIII ; puis loi de 1547 sous Edouard VI ; bill de 1558, de 1563, de 1571. de 1581. de 1593 sous Elisabeth, variant les peines et les délits, pour aboutir toujours finalement a la peine capitale. Jacques II essaya de réagir, mais indocile aux conseils de modération du pape Innocent XI, il provoqua la révolution de 1688. Guillaume III et Marie remirenl