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ABRAXAS, NOM DE PIERRES BASILIDIENNES — ABREU (D’)

dra pas nous donner la clef de tous ces mystères, nous ne pourrons soulever qu’un coin du voile sans atteindre la réalité totale.

Incontestablement l’étroite parenté de la gnose basilidienne avec les systèmes solaires et astronomiques, te judaïsme et la religion égyptienne ne saurait être niée. Elle saute aux yeux, en quelque sorte, dans la réunion, sur une même pierre, des divers symboles qui appartiennent à d’autres manifestations religieuses que la Gnose. Ces têtes rayonnantes d’homme, de coq, de lion, de serpent, le char et ses coursiers, le fouet, Mithras font penser au culte du soleil ; le disque solaire, le croissant de la lune, Sirius, les sept planètes, certains signes du Zodiaque manifestent l’influence astronomique ; le scarabée, l’Isis, l’Anubis ne sont-ils pas égyptiens ? Et les mois d’origine juive : Iao, Sabaoth, Adonai, Gabriel, etc., n’indiquent-ils pas une relation avec le judaïsme ? Noms, images, symboles, inscriptions, le tout mêlé, cela nous parait étrange et cache des rapports intimes qui nous échappent, il est vrai, mais qui avaient un sens pour les initiés de la Gnose. Évidemment il y a là le produit d’un enseignement ésotérique, des signes cabalistiques inaccessibles aux profanes, des allusions aux rites et aux croyances mystérieuses de la secte, des symboles de la délivrance de l’âme du pneumatique, de son ascension jusqu’au plérome, tout un langage secret d’initiés. Aussi.

7. — Abraxas, d’après Matter, Histoire du guosticisme, pi. iv, fig. 7.

jusqu’à plus ample informé, ne peut-on se livrer qu’à des hypothèses sans se (latter, malgré leur vraisemblance. d’avoir atteint la vérité complète ; les sources font malheureusement défaut. Il est bon de remarquer toutefois l’absence, sur ces Abraxas, de toute allusion chrétienne, ce qui prouve combien, au fond, le gnosticisme était moins, comme le prétendaient ses partisans, une restauration du christianisme par l’exaltation de la science qu’un véritable escamotage, qu’une volatilisation de la religion révélée, sous l’éclat des images et d’un appareil pseudo-scientifique.

Ce que l’on peut dire sans crainte d’erreur, c’est que ces Abraxas, ces pierres basilidiennes, comme tant d’autres semblables que l’on retrouve chaque jour en Asie. en Egypte, à Carthage et ailleurs, étaient des amulettes, drs talismans, portés par des dévols pour se rendre telle ou telle divinité gnostique favorable, , conjurer l’esprit du mal, se préserver des maladies. Les seules inscriptions lisibles ne permettent pas d’en douter. Nous n’en citerons que quelques exemples, empruntés soit à Montfaucon, soit à Matter, ouvrages cités à la bibliographie.

1. Sur une pierre basilidienne on lit, d’un côté : Iau>, AôpaTa ?, IxSaajô, etc., et de l’autre : « Donnez-moi la giàce et la victoire puisque j’ai prononcé voire nom Caché et ineffable » (voir lig. 6). — 2. Autre pierre. D’un côté on trouve Harpocrate, assis sur une Heur de lotus, la tête radiée, la main armée du fouet, et autour la lune, Sirius, un cynocéphale, avec ces mots : Eiç’/e-j ; impair ?), un seul Jupiter Sérapisj de l’autre côté, une inscription de dix lignes, les six premières illisibles, les trois dernières donnant celle lecture : AfipaaaS Soj /apiv AXeÇ « v8p…,

Abraxas, donne la grâce à Alexandre. — 3. Au revers d’un autre Abraxas, on voit le symbole mithriaque du lion et du taureau ; à l’endroit, un pneumatique, debout, le corps, les bras, les jambes recouvertes de lettres, où l’on distingue les sept voyelles plusieurs fois répétées,

8. — Abraxas, d’après Montfaucon, ibid., p. clxiv, fig. 1.

emblème des sept régions sidérales ; au-dessous du personnage le mot Aë).avxSava).Sa ; et, verticalement, le long du sceptre que le pneumatique tient de la main gauche, ces mots en caractères grecs : ocv 0apai Aa&p. 0’j>.ay w AëpacTai ; dans lesquels Matter voit de l’hébreu et qu’il traduit ainsi : « (Tiens) le regard fixé sur Abraxas qui met fin à tes angoisses. » Matter, Hist. du gnost., t. iii, pl. iv, fig. 7 (Voir fig. 7). — En voici deux autres qui ont appartenu à des femmes : 4. Sur l’un, pas d’image, une simple inscription qui commence d’un côté et s’achève de l’autre : a) lato Aëa(7a| AStovat aytov ovou.a ( ?) Sslcou 8uva(u ; çu).a ? aTî O-jeStav Ilau).sivav — b) arco Ttavroç xaxou ôaijjiovoç. Matter, Hist. du gnost., t. iii, pl. x, fig. 6. (Voir fig. 8). — 5. Sur l’autre, ornée du serpent qui se mord la queue, à l’intérieur duquel un autre serpent à tête de lion, deux figures égyptiennes, les sept voyelles, et à l’extérieur une inscription illisible, nous lisons au revers : Ta<770v tïjv fr^xpav tv, ; 5stva et ; tov tStov touov o tov —Lux).ov to’j v)Xiov… — Voilà deux femmes, l’une, Vibia Paulina qui demande à Iao Abrasax Adonai d’èlre préservée de tout mauvais démon, l’autre qui demande à celui qui règle le cours du soleil ou la fécondité ou une heureuse délivrance, dit Montfaucon, L’antiquité expliquée, t. il, pl. il, p. 372. N’est-ce pas la preuve du rôle que les femmes jouèrent dans les sectes gnostiques ? En tout cas il est bon de rappeler les faits de corruption que saint Irénée, Cont. Iiœr., I, xiii, 3, 4, 5, 6, P. G., t. VII, col. 585, 588, reproche à Marc et aux marcosiens. On n’ignore pas, en effet, que ces sectaires, sous prétexte de leur révéler tous les mystères de la Gnose, attiraient à eux les femmes et finissaient par en abuser.

Quoi qu’il en soit de la manière de comprendre et d’interpréter les pierres basilidiennes, il n’en est pas moins avéré que, si elles restent encore un mystère pour nous, elles prouvent le caractère de syncrétisme du gnosticisme de Basilide. Nous n’avons plus qu’à souhaiter une heureuse découverte qui nous permette enfin de connaître complètement le sens caché et symbolique de ces talismans et nous aide à mieux saisir l’ensemble du système basilidien.

A consulter : Les auteurs cités par Matter, Hist. du gnosticisme, Paris, —1828, t. ii, p. 53 ; Chifflet, Abraxas-Protcus, dissert, jointe à l’Abraxas de Jani Macarii, Anvers, 1657 ; de Montfaucon, L’antiquité expliquée, Paris, 1719, t. II b ; Chabouillel, Catal. des camées et des pierres gravées de la llibliotheque impériale, Paris, 1858 ; Kopp, Palxographia crïlica, Manlieim, 1817-1829 ; Bcllerinunn, Ein Versuch ùber die Gemmen. .. Akraxasbile, Berlin, 1817-1819 ; Mogenstcrn, Abraxasgemme, Dorpat, 18ï3 ; liaudissin, Studien z. semit. lieligionsgeschiehte, Leipzig, 187ti ; Dieterich, Abraxas, Studien tur Tteligionsgeschichte drs Spàteren AUertum s, Leipzig, 1892 ; Dict. d’archéologie chrétienne, t. i, col. 127-155.

D. lÎAREII.LE. ABREU (d’) Sébastien, jésuite portugais, né à Crato (Alemtejo), en 1593, enseigna la théologie à Evora, fut théologien du général de la Compagnie de Jésus, chancelier de l’université d’Évora et mourut dans cette ville, le 18 octobre 1694. Institutio parochi seu speculum pa-