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APOCALYPSES APOCRYPHES — APOCRYPHES (LIVRES)

le fragment apocalyptique latin dépendait de l’apocalypse de Pierre, qui est du iie siècle. Mais la publication du Testament syriaque enlève tout crédit à cette conjecture ; il n’y a rien de commun entre les deux documents et leur genre est sensiblement différent. Paul de Lagarde, dans les Analecta Antenicæna de Bunsen, t. ii, 1854, p. 38, rapportait cette apocalypse aux temps de Géta (211) et de Caracalla (211-217). Neumann, dans le Literarisches Centralblatt, 1894, p. 707, reconnaît dans le roi barbare Maximin le Thrace (235-238), et dans les guerres celles de Sapor Ier (241-272). Cf. dom Morin, Revue bénédictine, janvier 1900, p. 11-13. Le Père Brucker, Études, 20 novembre 1899, p. 529, voyait dans la description des pasteurs prévaricateurs un esprit rigoriste qui lui rappelait le montanisme du iiie siècle. Funk, Das Testament unseres Herrn und die verwandten Schriften, Mayence, 1901, p. 83-88, 308, estime que cette apocalypse fait allusion, non pas aux persécutions des païens contre les chrétiens, mais aux luttes doctrinales des chrétiens entre eux, et il reconnaît, dans le roi barbare, un prince arien, Alaric ou Odoacre. L’apocalypse ne serait donc que du commencement du ve siècle et elle aurait paru en Syrie. L’auteur du Testament l’aurait composée lui-même, comme il aurait pu se servir d’une source antérieure. Cf. Bulletin de littérature ecclésiastique, Paris, 1900, p. 51-54.

VIII. autres apocalypses. — Elles n’ont pas encore été publiées en entier. 1o  Une Apocalypse de Pierre, en arabe, dont il existe plusieurs manuscrits syriaques, est une compilation de différents apocryphes, qui traite de la création du monde, du testament d’Adam, de Moïse, d’Aaron, de Jésus-Christ, des apôtres, de l’Antéchrist et de la fin du monde.

Tischendorf, Apocalypses apocryphæ, p. xx-xxiv, en a donné l’argument. Cf. R. Duval, La littérature syriaque, Paris, 1899, p. 96-97.

2o  Une Apocalypse de Barthélémy, en copte, dont un fragment a été traduit en français par Dulaurier, Fragment des révélations apocryphes de S. Barthélémy, etc., Paris, 1835, et reproduit dans le Dictionnaire des apocryphes, de Migne, t. ii, col. 160-162, et par Tischendorf, Apocalypses apocryphæ, p. xxiv-xxvii.

Harnack, Geschichte der altchrist. Lit., t. i, p. 919.

3o  Une Apocalypse de Marie, en grec, est une œuvre récente. Se trouvant sur le mont des Oliviers, la sainte Mère de Dieu demande de voir les mystères de l’autre vie. L’archange saint Michel lui montre l’enfer et lui fait connaître les pécheurs qui y souffrent. Marie veut aller auprès du Père invisible solliciter la grâce des pécheurs. L’archange répond que sept fois par jour et sept fois par nuit les anges font inutilement cette prière. Marie persiste dans son dessein, recourt à l’intercession des saints et finit par obtenir la rémission des péchés. Les chérubins l’emportent en paradis ; elle y voit les justes, et l’archange lui révèle leurs vertus. Des fragments de cet écrit ont été publiés par Tischendorf, Apocalypses apocryphæ, p. xxvii-xxx.

Gidel, Étude sur une apocalypse de la Vierge Marie. Manuscrits grecs n. 390 et 1631 de la Bibliothèque nationale, Paris, 1871 ; James, Apocrypha anecdota, Cambridge, 1893.

4o  Une Apocalypse de Daniel, dont quelques extraits grecs ont été donnés par Tischendorf, Apocalypses apocryphæ, p. xxx-xxxiii. Elle traite de la fin du monde. Le règne de la vérité et de la paix commencera alors sur terre ; malheur à ceux qui n’auront pas fait pénitence de leurs péchés. Les phénomènes de la fin des temps sont décrits ainsi que les derniers événements. Les morts ressusciteront ; les justes iront dans le paradis et les pécheurs subiront la peine éternelle. Cette apocalypse est une œuvre de basse époque.

Harnack, Geschichte der altchrist. Lit., t. i, p. 856 ; R. Duval, La littérature syriaque, p. 93 ; F. Macler, Les apocalypses apocryphes de Daniel, Paris, 1895, p. 89-99.

5o  Une Apocalypse de Zacharie, père de saint Jean-Baptiste, dont l’existence et quelques extraits probables sont signalés.

Zahn, Geschichte des Neutestamentlichen Kanons, Leipzig, 1892, t. ii, fasc. 2, p. 776 ; Harnack, Geschichte des altchrist. Lit., t. i, p. 856 ; A. Berendts, Studien über Zacharias-Apocryphen und Zacharias-Legenden, Leipzig, 1895 ; Analecta Bollandiana, 1897, t. xvi, p. 92-93 ; Schürer, Geschichte des jüdischen Volkes, t. iii, p. 265.

E. Mangenot.


2. APOCALYPSE (Chevaliers de l’), fanatiques de Borne à la fin du xviie siècle. Ils avaient pour chef et fondateur Augustin Gabrino, qui s’intitulait primat du nombre septénaire et monarque de la sainte Trinité. Ses disciples, d’ailleurs peu nombreux, étaient presque tous des artisans. Ils se proposaient comme but principal de défendre l’Église contre l’Antéchrist, dont le règne, disaient-ils, était proche ; ils professaient, en outre, des doctrines opposées à l’indissolubilité du mariage. Leurs insignes, que plusieurs portaient sur leurs vêtements, étaient un sabre et un bâton de commandement posés en croix et une étoile rayonnante avec les noms des anges Gabriel, Michel et Raphaël. Le jour des Rameaux de l’année 1694, entendant chanter ces paroles : Qui est iste sex gloriæ ? Gabrino, l’épée à la main, se précipita au milieu du clergé en disant : Son io, son io questo se della gloria. Aussitôt arrêté, il fut enfermé comme fou. Un de ses disciples, charron de son métier, ayant été saisi, exposa le but et les doctrines des chevaliers de l’Apocalypse. À la suite de ces révélations, trente de ces fanatiques furent jetés en prison, les autres se dispersèrent d’eux-mêmes.

G. Moroni, Dizionario di erudizione storico-ecclesiastica, Venise, 1840, t. ii, p. 236.

B. Heurtebize.


APOCRYPHES (Livres). — I. Diverses significations.II. Nombre, listes et collections.III. Intérêt qu’ils présentent pour les théologiens.

I. Diverses significations. — Les expressions βίβλοι ἀποκρύφοι, ἀποκρύφα, libri apocryphi, apocrypha, ont été employées par les Pères et les écrivains ecclésiastiques en des sens différents qu’il importe de distinguer et de préciser.

1. Livres pseudo-canoniques. — La signification la plus ancienne dérive directement de l’étymologie du mot ἀποκρύφος, « caché, » et désigne des livres qui ne sont pas mis dans le domaine public, mais qui sont tenus cachés et communiqués aux seuls initiés d’une secte ou à certaines catégories de personnes, ou bien parce qu’ils contiennent une doctrine ésotérique, ou bien parce qu’ils ne sont pas admis à la lecture publique dans toutes les Églises, quoiqu’ils portent le nom d’un saint de l’Ancien ou du Nouveau Testament. Quels que soient, d’ailleurs, leur origine et leur contenu, qu’ils soient pseudépigraphes ou hérétiques, ils sont dits apocryphes pour cette raison principale que l’Église ne les reçoit pas universellement dans sa collection des livres inspirés. Ἀποκρύφος signifie donc expressément secretus, « caché, » et il est opposé à φανερός, manifestus, « public. » Il a pour synonyme ἀπόρρητος, arcanus, qui est mis en opposition avec ῥητος, appliqué à des livres non pas mystérieux, mais accessibles à tous. Ἀποκρύφος est aussi opposé à δημόσιος, publicus, et à κοινὸς καὶ δεδημευμένος (ou ordinairement δεδημοσιευμένος, vulgatus. Il désigne donc des livres qui ne sont pas d’usage public dans les communautés ecclésiastiques et qui diffèrent ainsi des livres que l’Église tient pour sacrés et qu’elle fait lire publiquement dans ses assemblées officielles. Il signifie « non canonique ».

Saint Irénée, Cont. hær., I, xx, n. 1, P. G., t. vii, col. 653, dit que les marcosiens prouvaient leurs erreurs par le témoignage d’écrits apocryphes et bâtards, ἀποκρύφων καὶ νόθων γραφῶν, et il cite une parole tirée des évangiles