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APOCALYPSES APOCRYPHES


aux anges tombés leur condamnation : ils devaient être enchaînés sous terre jusqu’au jour du jugement. Hénoch s’acquitte du message, et les condamnés le supplient d'écrire en leur faveur une supplique à l’Eternel, parce qu’ils ne peuvent plus parler à Dieu, ni lever les yeux au ciel, par honte des péchés qu’ils ont commis et pour lesquels ils sont condamnés. Hénoch rédige la supplique et va la lire au pays de Dan. Il reçoit la réponse dans son sommeil, et elle forme un petit livre « des paroles de justice ». La prière des anges tombés ne peut être exaucée, et une sentence définitive a été prononcée contre eux. Ils ne remonteront jamais au ciel et ils seront enchaînés jusqu'à la (in du monde. Dieu qu’Esdras a vu dans sa gloire, assis sur un trône, au milieu du feu et entouré de myriades d’anges, lui a dit la sentence des anges déchus : « Vous deviez intercéder pour les hommes, et non les hommes pour vous… Vous étiez des saints, des esprits vivants, éternels… Vous étiez dans le ciel et vous connaissiez tous les secrets… Il n’y a pas de paix pour vous. » A partir du chapitre XVII, Hénoch raconte les voyages qu’il a faits, sous la conduite des anges, aux extrémités du ciel et de la terre, et il décrit les merveilles qu’il a contemplées. Il a vu la prison des anges où se réunissent les âmes des hommes avant le jugement. Il y a un emplacement réservé aux esprits de ceux qui, comme Abel, demandent justice, un autre pour les pécheurs eux-mêmes où ils seront tourmentés jusqu’au jour du grand jugement, et un troisième pour ceux qui, n’ayant été ni pieux ni impies, méritent d'être assimilés aux pécheurs sans être punis autant qu’eux. Un lieu lumineux, placé sur la même montagne, est destiné aux justes. C’est sur une autre montagne, dont le sommet ressemble au trône de Dieu, que le Seigneur viendra s’asseoir quand il visitera la terre. Là, se trouve l’arbre de vie, dont le fruit sera après le jugement la nourriture des justes, et l’arbre sera lui-même transplanté en un lieu saint, près de la maison de Dieu, le roi du monde. Au milieu de la terre, il y a un lieu béni, auprès duquel se voit une vallée maudite, où seront rassemblés les blasphémateurs. Bien loin, à l’orient, au delà de la mer Erythrée, Hénoch visite « le jardin de la justice », c’est-à-dire le paradis terrestre, planté de grands arbres, entre autres l’arbre de la science.

Dans les chapitres lxxii-cv, il y a moins de doctrine que dans les précédents. L’ange Uriel explique à Hénoch les phénomènes astronomiques, le cours du soleil, de la lune et des étoiles. Des anges dirigent les étoiles et président à leurs mouvements, à leurs phases et à leurs conversions, lxxii-lxxxii. Hénoch raconte ensuite à Mathusala, son fils, deux visions qu’il a eues. La première est relative au déluge ; la seconde est une description allégorique de l’histoire d’Israël, depuis l’origine jusqu'à la fin des temps. Les personnages sont représentés sous la figure d’animaux. L’allégorie est assez facile à comprendre jusqu’au temps de la captivité. A partir de là, la pensée est obscure. Il semble qu’il y est question d’anges qui, chargés de veiller à ce que les nations païennes n’oppriment et ne persécutent pas les Juifs au delà de ce que Dieu avait décrété, négligèrent leur mission, laissèrent les nations frapper Israël plus qu’il ne convenait et furent jetés dans le feu de l’enfer avec les anges déchus. Le jugement arrivera à l'époque de l’auteur ; les païens et les pécheurs seront punis. Dieu transportera ailleurs la ville de Jérusalem et élèvera sur son emplacement une nouvelle ville, plus grande et plus haute que la première. Le Messie, figuré par un jeune taureau blanc, naît enfin et devient la terreur des bêtes féroces et des oiseaux de proie. Les derniers chapitres de cette section renferment une exhortation morale à pratiquer la justice, parce qu’il est écrit sur les tablettes célestes, dans le livre des saints, qu’une grande récompense est préparée aux justes, lxxxiii-cv.

Les trois paraboles, qui composent la vision de sa gesse, xxxvii-lxxi, à part quelques passages concernant Noé, qui y ont été insérés plus tard, forment un tout, bien distinct des autres parties du livre par la doctrine sur les anges, les fins dernières et le Messie. La première parabole décrit la demeure des élus & sous les ailes du Seigneur des esprits », et les quatre anges, qui se tiennent devant Dieu : Michel, le miséricordieux et le patient ; Raphaël, préposé aux douleurs et aux blessures des hommes ; Gabriel, préposé aux forces du monde, et Phanuel, préposé à la pénitence et à l’espérance. Hénoch voit les secrets des cieux. Un rapport mystérieux existe entre les noms des étoiles et ceux des justes. La sagesse était venue habiter parmi les enfants des hommes, mais elle n’y a pas trouvé de séjour ; elle est revenue au ciel et elle y habite avec les anges. L’injustice s’est dès lors établie sur la terre. La seconde parabole concerne le juge suprême, nommé l'Élu, et le Fils de l’homme qui l’accompagnera. Avant que fussent créés le soleil et les étoiles, ce Fils de l’homme était appelé par son nom devant le Seigneur des esprits. Il sera la lumière des peuples et l’espérance des affligés. Tous les habitants de la terre se prosterneront en adoration devant lui. La personne du Messie est fortement mise en évidence au moyen de traits empruntés aux descriptions messianiques de l’Ancien Testament. Le fond est certainement juif ; mais une main chrétienne l’a retouché et y a peutêtre inséré la dénomination du Fils de l’homme. Une invasion des Mèdes et des Parthes en Palestine précédera la fin du monde. La troisième parabole décrit encore le bonheur réservé aux justes, le grand jugement et les phénomènes célestes. Dans une révélation faite à Noé, il est de nouveau question des anges prévaricateurs et des secrets qu’ils ont fait connaître aux hommes.

GfrÔrer, Prophetx veteres pseudepigraphi, Stuttgart, 1840 ; Migne, Dictionnaire des apocryphes, Paris, 1856, t. I, col. 393514 ; Charles, The book of Enoch, Oxford, 1893 ; Loisy, L’enseignement biblique, 1893, chronique, p. 116-128, 133-138 ; Schurer, Geschichte des jùdischen Volkes, 3e édit., t. iii, p. 190209 ; Philippi, Das Buch Hénoch, sein Zeitalter und sein Verhàltniss zutn Judasl » iefe, 1868 ; Kautzsch, Die Apocryphen und Pseudepigraphen des A. T., Tubingue, 1900, t. ii, p. 217310 ; F. Martin, Le livre d' Hénoch. traduit sur le texte éthiopien, Paris, 1906.

2. Livre slave.

Le livre des secrets d' Hénoch, en slavon, publié par MM. Morlill et Charles, The Book of the Secrets of Enoch, Oxford, 1896, est différent du livre éthiopien. Conservé en cinq manuscrits qui ont été copiés en Bulgarie et en Russie aux XVIe et xviie siècles, il se présente à nous en deux recensions, l’une plus développée qui est le véritable texte de la version slavonne, l’autre plus courte qui est un abrégé de la première. Le texte primitif était probablement grec, quoique certaines parties aient pu être rédigées en hébreu. L’ouvrage semble avoir été composé en Egypte, dans la première moitié du I er siècle de notre ère, par un juif helléniste. Il ne contient pas la moindre trace de christianisme ni aucune préoccupation messianique. On peut le diviser en trois parties. Dans la première, nous avons le récit du voyage d’Hénoch à travers les sept cieux sous la conduite de deux anges. Au premier ciel, le patriarche voit entre autres les deux cents anges qui gouvernent les étoiles, et ceux qui gardent les magasins de la neige et de la glace, les réservoirs des nuages et de la rosée. Au second ciel, il aperçoit, au milieu de sombres ténèbres, des anges qui n’ont pas obéi aux préceptes de Dieu, ont pris conseil de leur propre volonté et ont été rélégués du cinquième ciel, où ils habitaient. En attendant l'éternel jugement, ils sont plongés dans la douleur et ne cessent de pleurer. Ils demandent à Hénoch d’intercéder pour eux auprès de Dieu. Au troisième ciel se trouve un jardin avec l’arbre de vie au milieu. Du pied de cet arbre, partent quatre fleuves qui descendent au paradis terrestre et se répandent sur