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APOCALYPSE

fut réfuté par saint Hippolyte, Capita adversus Caium, publiés par Gwynn, Hermathena, t. vi, p. 397-418, et traduits en allemand par Harnack, Die Gwynn’schen Cajus-und Hippolytus Fragmente, dans Texte und Untersuchungen, t. vi, 3e fasc., Leipzig, 1890, p. 121-133, et par Zahn, Geschichte der Neutestamentlichen Kanons, t. ii, 2, Erlangen, 1892, p. 973-991. L’Église romaine resta fidèle à la tradition ecclésiastique et continua à recevoir l’Apocalypse de saint Jean, malgré les raisons de Caïus. Faisant sans doute allusion à cette discussion, l’auteur du canon de Muratori, qui reproduit la foi de l’Église de Rome, dit : « Nous recevons aussi l’Apocalypse de Jean… bien que quelques-uns des nôtres ne veuillent pas qu’elle soit lue dans l’église. » E. Preuschen, Analecta, Fribourg-en-Brisgau et Leipzig, 1893, p. 133-134. Saint Denys d’Alexandrie, par opposition contre le millénarisme de Népos, reprit l’opinion de Caïus sur l’origine de l’Apocalypse, mais il ne rejeta pas cette prophétie hors du canon. « J’admets, dit-il, que l’écrit est d’un auteur saint et inspiré. » Il n’osait pas repousser tout à fait un livre que beaucoup de chrétiens estimaient grandement. Bien qu’il n’en comprit pas le sens, il en admirait la profondeur et il se fiait plus à la foi de l’Église qu’à son propre jugement. Eusèbe, H. E., vii, 25, P. G., t. xx, col. 697. L’Église d’Alexandrie a toujours conservé l’Apocalypse dans son recueil des Écritures, témoins saint Athanase, Didyme et saint Cyrille d’Alexandrie. Ce livre prophétique néanmoins, par suite des attaques dont il avait été l’objet, tomba dans le discrédit en Orient au cours des siècles suivants. Saint Méthode, évêque de Tyr, affirme, il est vrai, l’inspiration de saint Jean et cite plusieurs fois l’Apocalypse comme Écriture sainte, Convivium decem virginum, i, 5 ; iii, 3 ; v, 8 ; vi, 5 ; viii, 4, P. G., t. xviii, col. 45, 64, 112, 121, 144, 145 ; De resurrectione, 13, ibid., col. 284, et Pamphile, Apologia pro Origene, P. G., t. xvii, col. 596, agit de même. Mais Eusèbe de Césarée, H. E., iii, 25, P. G., t. xx, col. 268, 269, relate les doutes soulevés sur sa canonicité. Il reconnaît qu’on peut la placer, si l’on veut, au nombre des homologoumènes, des livres généralement reçus dans l’Église, ou bien parmi les antilégomènes du second degré, qu’il appelle νόθα, « bâtards, » apocryphes. Les anciens, selon lui, sont partagés de sentiment à son sujet, les uns la plaçant avec les ouvrages acceptés de tous, les autres la mettant hors du canon. Il cite cependant, Demonst. ev., viii, 2, P. G., t. xxii, col. 605, l’Apocalypse comme un livre saint. Qu’en conclure ? Ou bien que dans son Histoire il mentionne simplement le conflit, ou bien que, s’il doutait lui-même de l’autorité divine de l’Apocalypse, il a été inconséquent en la citant comme divine. Saint Cyrille de Jérusalem, Catech., iv, 36, P. G., t. xxxiii, col. 500, ne la mentionne pas dans son canon des Livres saints ; il semble même, Catech., xv, 16, ibid., col. 892, la ranger parmi les apocryphes, en disant que l’Antéchrist régnera trois ans et demi, non d’après les apocryphes, mais d’après Daniel. Il en fait cependant usage. Catech., x, 3, col. 664. De même, Saint Grégoire de Nazianze, Carm., i, 1, 12, P. G., t. xxxvii, col. 474, omet l’Apocalypse, qu’il cite ailleurs, Orat., xxix, 17, P. G., t. xxxvi, col. 96 ; Orat., xlii, 9, ibid., col. 469, ainsi que saint Basile, Adv. Eunom., ii, 14, P. G., t. xxix, col. 600 ; saint Grégoire de Nysse, Adv. Eunom., ii, P. G., t. xlv, col. 501 ; Adv. Apoll., 37, ibid., col. 1208. Toutefois, ce dernier, Orat. in ordin. suam, t. xlvi, col. 549, reproduit Apoc. iii, 5, comme étant ἐν ἀποκρυφοίς. L’Apocalypse n’est pas citée dans la liste des livres du Nouveau Testament du canon 60e de Laodicée, Mansi, Concil., t. ii, col. 574, du 85e des canons apostoliques, P. G., t. cxxxvii, col. 212. Saint Amphiloque, Iambi ad Seleucum, P. G., t. xxxvii, col. 1597-1598, dit que l’Apocalypse est acceptée par quelques-uns, mais jugée apocryphe par le plus grand nombre. Saint Chrysostome ne cite jamais l’Apocalypse et la Synopsis Scripturæ, qui lui est attribuée, n’en parle pas. Théodore de Mopsueste et Théodoret ne s’en servent pas. L’Église syrienne a subi l’influence des Grecs. Bien que saint Éphrem ait souvent cité l’Apocalypse, ce livre ne se trouvait ni dans la Peschito ni dans la recension de la version philoxénienne faite par Thomas de Harkel. Ce ne fut qu’après le viie siècle que les Syriens eurent dans leur langue une traduction de l’Apocalypse. Cosmas Indicopleustes, Topog. christ., 12, P. G., t. lxxxviii, col. 373, ne connaît pas l’Apocalypse.

3. La canonicité admise en Occident.

Tandis que les doutes sur la canonicité de l’Apocalypse se perpétuaient en Orient, l’Occident continuait à maintenir ce livre dans le recueil des livres inspirés. Les attaques de Caïus ne trouvèrent pas d’écho. Les écrivains latins citent tous l’Apocalypse. Quelques-uns cependant connaissent le sentiment défavorable des Églises orientales. Saint Philastre, Hæres., 88, P. L., t. xii, col. 1199, subit l’influence de l’Orient et ne compte pas l’Apocalypse au nombre des livres canoniques. Il parle des aloges qui repoussent l’Apocalypse. Hæres., 60, ibid., col. 1174. Rufin, Exposit. symboli, 37, P. L., t. xxi, col. 374, saint Jérôme, Epist., liii, ad Paulin., P. L., t. xxii, col. 513, inscrivent l’Apocalypse au canon des Écritures. Ce dernier docteur n’ignore pas l’opinion des Églises grecques, mais il suit les anciens écrivains qui sont favorables à l’Apocalypse. Epist., cxxix, ad Dardan., P. L., t. xxii, col. 1103. Saint Augustin, De doct. christ., ii, n. 13, P. L., t. xxxiv, col. 41, les conciles africains tenus à Carthage en 393, 397 et 419, Mansi, Concil., t. iii, col. 924 ; t. iv, col. 430 ; le pape Innocent Ier, dans sa lettre à Exupère, évêque de Toulouse, Mansi, t. iii, col. 1041 ; le décret de Gélase, Labbe, Concil., t. iv, col. 1261, inscrivent l’Apocalypse au canon biblique. Junilius, Instit. reg. divinæ iegis, P. L., t. lxviii, col. 18, 20, connaît les doutes qui existent en Orient au sujet de l’Apocalypse, mais à cause de la foi des Occidentaux, il en fait un livre d’autorité moyenne, c’est-à-dire un livre accepté par un grand nombre de personnes. Ces doutes avaient séduit quelques esprits en Espagne au commencement du viie siècle ; c’est pourquoi le quatrième concile de Tolède, tenu en 633, sous la présidence de saint Isidore de Séville, s’appuyant sur l’autorité des conciles antérieurs et des décrets des pontifes romains, qui ordonnent de recevoir l’Apocalypse parmi les livres divins, excommuniait ceux qui, désormais, ne la recevraient pas. Mansi, Conc., t. x, col. 624.

4. La canonicité admise aussi en Orient. Décret du concile de Florence.

L’Église grecque finit par admettre l’Apocalypse au nombre des livres inspirés. Léonce de Byzance, De sectis, P. G., t. lxxxvi, col. 1204, saint Jean Damascène, De orthodoxa fide, iv, 17, P. G., t. xciv, col. 1180, la citent. Le concile in Trullo mentionnait la diversité des sentiments. Mansi, Concil., t. xi, col. 939. Au ixe siècle, le patriarche Nicéphore, Chronographia, P. G., t. c, col. 1056, rangeait encore l’Apocalypse parmi les antilégomènes. Photius reproduit les décrets divergents de Laodicée et de Carthage. Les canonistes grecs du xiie siècle commentent la décision du concile in Trullo, et justifient l’admission de l’Apocalypse. In canones comment., P. G., t. cxxxvii, col. 213-218. Au xive siècle, Nicéphore Calliste, H. E., ii, 45, P. G., t. cxlv, col. 885, met l’Apocalypse au nombre des livres acceptés depuis longtemps dans les Églises, sans la moindre contestation. Aussi, Eugène IV, au concile de Florence, en 1441, dans son décret d’union pour les jacobites, inscrivait-il avec raison l’Apocalypse dans la liste des Livres saints que les monophysites devaient recevoir. Denzinger, Enchiridion, 5e édit., Wurzbourg, 1874, n. 600, p. 178.

5. Sentiments des protestants. Définition des conciles de Trente et du Vatican.

— Luther, dans la préface de