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ANTINOMISME — ANTIOCHE, PATRIARCAT GREC

ordures des autres hérésies. » Léon le Grand, Epist., xv, P. L., t. liv, col. 677 sq. Sous des apparences trompeuses se cache un fond abominable de dépravations, d’excès et de crimes qui rappellent le manichéisme, et qui sont la dernière manifestation de l’antinonisme pendant la période patristique. Plus tard, au moyen âge, aux XI e, xii e, xiiie siècles, l’antinomisme reparaîtra encore dans plusieurs sectes, celles des bogomiles, des pauliciens, des vaudois, des cathares, des albigeois.

Outre les Pères cités dans le corps de l’article, on peut consulter : Matter, Histoire du guosticisme, Paris, 1844 ; Néander, Genetische Entwickelung dcr g nostichen System, Berlin, 1818 ; Ulhorn, Das Basiliadinische System, Gœttingue, 1855 ; Heinrin, Die Valentinianische Gnosis, Berlin, 1871 ; la Healencycloj )àdie et le Dictionary of Christian biography.

G. Bareille.

ANTIOCHE. L’état religieux de l’Asie fera l’objet d’un article général qu’on trouvera à ce mot. Mais l’importance des groupes chrétiens qui se rattachent à l’antique Église d’Antioche, exigeait des articles spéciaux. Il convenait aussi de nous occuper ici des principaux conciles tenus en cette ville et de la célèbre école qui y fut florissante. Nous réunissons donc sous le mot Antioche les articles suivants : I. Patriarcat grec. II. Patriarcat grec-melkite. III. Patriarcat latin. IV. Patriarcat jacobite. V. Patriarcat syrien catholique. VI. Conciles. VII. École chrétienne. — Pour le patriarcat maronite d’Antioche, voir le mot Maronites.

I. ANTIOCHE, patriarcat grec — I. Introduction du christianisme. IL Évêques des premiers siècles. III. Gnose. IV. Liturgie. V. Schisme d’Antioche (330415). VI. Conciles d’Éphèse et de Chalcédoine. Perte de Chypre, de la Palestine et de la Perse. VIL Du concile de Chalcédoine à la conquête arabe (451-638). VIII. La domination musulmane (638-969) et l’occupation byzantine (969-1084). IX. Sièges suffragants d’Antioche. X. Des croisades à 1728. XL De 1728 à nos jours. XII. Situation actuelle et statistique.

I. Introduction du christianisme.

L’annonce de l’Évangile parvint dès les premiers jours à la communauté juive d’Antioche ; Nicolas, un des sept diacres, en était originaire. Act., iv, 5. Dès que la persécution sévit à Jérusalem, immolant Etienne et dispersant les collaborateurs du Christ, apôtres et disciples se rendirent dans la métropole de l’Orient, prêchant la bonne nouvelle aux seuls enfants de Jacob, nemini loquentes verbuni nisi solis Judith. Act., xi, 19. Cette conception étroite du christianisme répugnait à l’esprit libéral des missionnaires, venus de Chypre et de Cyrène, qui étaient depuis leur naissance en contact journalier avec les gentils ; ils se mêlèrent à eux, leur firent part des grandes vérités qui intéressaient tous les peuples et, si grands qu’eussent été les progrès de la religion nouvelle parmi les fils de la synagogue, c’est de préférence au sein de la population païenne qu’elle se recruta. Antioche fut réellement la première Église de la gentilité, le vrai berceau du christianisme.

Barnabe d’abord, puis son ami Saul vinrent, au nom de l’Église mère de Sion, approuver ces innovations, affermir les volontés défaillantes, organiser la communauté. Bientôt, le nombre des disciples augmenta en de telles proportions que, pour les distinguer des juifs, le vulgaire les surnomma chrétiens. Act., xj, 26. Antioche devint alors le centre effectif des missions, d’où des apôtres zélés, comme Barnabe, Siméon Niger, Lucius de Cyrène, Manahen, Paul, Act., xiii, 1, Jean, Marc, Silas, etc., rayonnèrent dans les iles de Chypre et de Crète, dans les grandes cités de l’Asie Mineure, de la Thrace et de la Macédoine. Au retour de chaque expédition, Paul ne manqua jamais d’aller consoler ses enfants d’Antioche et de retremper sa ferveur sur le premier théâtre de son apostolat. Act., xiv, 25 ; xv, 35 ;

xviii, 22. Cependant les multiples conversions opérées parmi les gentils éveillaient de la jalousie chez les chrétiens judaïsants, qui voulaient leur imposer les pratiques de la synagogue. Entrés directement dans le bercail du christianisme, sans passer par la porte des pratiques mosaïques, les chrétiens-gentils repoussaient la circoncision, le repos sabbatique et autres observances des convertis du judaïsme. Des disputes véhémentes éclatèrent entre les deux fractions de la communauté antiochienne. Paul et Barnabe prirent ouvertement parti contre les observances légales et portèrent les doléances des fidèles sortis du paganisme devant l’assemblée des apôtres à Jérusalem (52). Celle-ci ratifia les innovations des deux missionnaires et proclama l’affranchissement absolu des gentils vis-à-vis du joug de la Loi. Act., xv. Lorsque Céphas, oublieux des prescriptions de l’assemblée de Jérusalem, se tint à l’écart des chrétiens sortis de la gentilité et sembla par son silence encourager l’opposition des judaïsants, Paul lui résista en face et le remit dans le chemin de la vérité. Gal., ii, 11-15. Ce trait, relevé par saint Paul, donne une certitude presque absolue à la tradition qui fait de saint Pierre le fondateur de l’Eglise d’Antioche. Nous avons des témoins irrécusables de cette tradition dans les écrits d’Origène, In Luc, homil. vi, P. G., t. xiii, col. 1815 ; d’Eusèbe, H. E., l. III, c. xxxvi, P. G., t. xx, col. 288 ; de saint Jérôme, In Gal., c. il, P. L., t. xxvi, col. 341 ; Deviris illustr., 1, P. L., t. xxiii, col. 637 ; de saint Jean Chrysostome, Homil. in Ignat., P. G., t. L, col. 591, pour ne pas descendre plus bas que le IVe siècle. Toutelois, Antioche qui se glorifia it d’avoir possédé saint Pierre n’estimait pas que le chef des apôtres eût été proprement son évêque ; en effet, Eusèbe, qui avait sous les yeux les catalogues des Églises orientales, nomme Évodius comme le premier pontife d’Antioche et saint Ignace comme le second. II. E., l. III, c. xxi, P. G., t. xx, col. 256. Quelle fut la durée du séjour de saint Pierre dans la capitale de la Syrie ? Il nous est impossible de le dire. La tradition qui lui attribue sept années d’épiscopat à Antioche ne paraît pas être plus ancienne que le pape saint Grégoire. Epist., vii, 40, P. L., t. lxxvii, col. 899. Quoi qu’il en soit, la gloire d’avoir abrité le chef de l’Église rejaillit sur Antioche et l’éleva de bonne heure au-dessus des autres sièges apostoliques. IL Évèques des premîers siècles. — A Pierre et à Évodius succéda le célèbre martyr Ignace. En ce tempslà, Ménandre et Saturnin semaient l’ivraie gnostique dans le champ de l’Église antiochienne. Entre Ignace et Théophile, Eusèbe cite, H. E., l. IV, c. x, P. G., t. xx, col. 367, Héron, Corneille, Héros. Théophile, qui semble avoir vécu sous Marc-Aurèle et Commode, réfuta dans ses apologies les erreurs d’Hermogène et de Marcion. Il composa des écrits catéchétiques et, le premier, employa le mot de Trinité. Eusèbe, H. E., l. IV, c. xxiv, P. G., t. xx, col. 389 ; Duchesne, Les origines chrétiennes, Paris, 1898, p. 213-219 ; Batilfol, La littérature grecque, Paris, 1897, p. 101. S’il a écrit la première chronique remontant à la création, comme c’est probable, Théophile a le mérite d’être le plus ancien historien ecclésiastique. Après lui, l’Église fut gouvernée par Maximin, puis par Sérapion (190-209). Celui-ci intervint comme métropolitain dans une question religieuse qui divisait la communauté de Bhossos en Cilicie. Un fragment de sa lettre sur le De evangelio Pétri, inséré par Eusèbe, II. E., l. VI, c. XII, P. G., t. xx, col. 545, nous apprend qu’il avait déjà visité les chrétiens de Rhossos pour examiner leur foi et qu’il devait y retourner pour mettre un terme aux dissensions religieuses des fidèles. La tradition d’Édesse rapporte également que Sérapion aurait consacré l’atout, le troisième évêque de cette ville. Tixeront, Les origines de l’Eglise d’Édesse, Angers, 1888, p. 1 40. Ces deux épisodes dénotent les rapports existant entre Antioche et les Églises que