Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/720

Cette page n’a pas encore été corrigée
1381
4382
ANTIDICOMARIANITES — ANTILOGIES BIBLIQUES


Leur jugement interdit à Bonose l’exercice des fonctions épiscopales. Celui-ci passa outre, et l’affaire fut portée devant le pape. Sirice, ou peut-être un autre pontife, dans la réponse à Anysius et aux évêques d’Illyrie, rejette absolument comme une perfidie judaïque la prétention de Bonose que Marie n’a pas constamment conservé sa virginité : Qui hoc adslruit, nihil aliud nisi perfidiam Judæomm adstruit qui dicunt eum non potuisse nasci ex virgine… claudat ora sua per/idia ; obmulescat, ne matreni Domini aliquo audeat ternerare convicio. Mansi, Concil. collect., t. iii, col. 675. Pour le surplus des points en litige, le pontife, comme les évêques italiens, s’en remet à la décision des évêques d’Illyrie.

Vers la même époque, nous dit saint Epiphane, il y eut en Arabie toute une secte pour combattre avec acharnement la perpétuelle virginité de Marie, et cette haine particulière leur a valu le nom d’anlidiconiarianites,’AvTt8txo|Aaptav ! T0 ». Eux aussi soutenaient que Marie avait eu de Joseph plusieurs enfants après la naissance de Jésus, et ils faisaient, dit-on, dériver leur opinion du vieil Apollinaire ou de ses disciples. Ce point toutefois n’est pas parfaitement démontré, ajoute saint Epiphane. En vue de les ramener, le vaillant controversiste adressa aux hérétiques une épître dogmatique et surtout exégétique, où sont discutés point par point tous leurs chefs de preuves. Plus tard, ayant à parler dans son Histoire des hérésies de l’erreur des antidicomarianites, plutôt que de traiter à nouveau le sujet, il inséra simplement sa lettre dans son ouvrage, Adversus hsereses, 1. III, hrer. lxxviii, P. G., t. xlii, col. 699 sq. Il n’entre pas dans notre cadre de réfuter ici les arguments apportés par les antidicomarianites. Rappelons qu’ils s’appuyaient principalement sur les passages de l’Écriture où il est fait mention des frères et des sœurs de Jésus, Matth., xii, 46 ; Marc, iii, 31 ; Luc, iivi 19 ; Matth., xiii, 55 ; Marc, vi, 3 ; Joa., ii, 12 ; iiv 3, 5, 10 ; Act., I, 14 ; I Cor., ix, 5 ; Galat., I, 19, et sur les passages de saint Matthieu, i, 18, où il est dit : Marie étant liancée à Joseph, avant qu’ils habitassent ensemble, antequam convenirent ; i, 25, où il est rapporté que Joseph ne connut point Marie jusqu’à ce qu’elle eut mis au monde notre Sauveur : et non cognoscebat eam, donec peperit filium suuni primogenitum. Mais sans recourir, comme quelques anciens Pères et saint Epiphane lui-même, à des enfants que Joseph aurait eus d’un premier mariage et d’une autre femme que Marie, l’on sait que chez les Hébreux les termes « frères » et « sœurs » signifient souvent les cousins et les cousines. D’autre part, les mots : antequam, donec, marquent seulement ce qui n’avait pas eu lieu auparavant, avant la naissance de Jésus par exemple, sans qu’on puisse logiquement en inférer tout autre chose.

L’erreur paraissait totalement oubliée, lorsqu’elle reparut au xvie siècle. Le B. Pierre Canisius atteste qu’elle fut reprise et soutenue par divers partisans de la réforme. De Maria Virgine incomparabili, 1. II, dans Summa aureade laudibus B. V. M., Paris, 1862, t. viii, col. 613-1450 ; t. ix, col. 9-409. Il est certain que les anabaptistes y adhéraient. Plusieurs disciples de Luther et de Calvin ont aussi nié la constante virginité de Marie, sous ce fallacieux prétexte qu’elle ne se trouve pas expressément affirmée dans les saintes Écritures. Aujourd’hui encore quelques protestants ont cru devoir prendre rang parmi les antidicomarianites. Citons Neander, Meyer, Alford, Farrar. Refusant d’admettre la supériorité de la virginité sur le mariage, ils ont été conduits à repousser le privilège de la très sainte Vierge Marie. Cf. Farrar, The earhj days of christianity, c. xix, dans Tanquerey, Synopsis theol. dogm. specialis, 4e édit., Paris, 1899, t. i, p. 601.

En face de tous ces hérétiques, l’Église a toujours continué de lire Ézéchiel dans le sens de la virginité

perpétuelle : Porta heec clausa erit, et vir non intrabit per eam, xliv, 2 ; comme elle a entendu le virum non cognosco dans un sens absolu, et par allusion au vœu de virginité émis par Marie lors de sa présentation au temple. Les symboles n’ont cessé d’appeler Marie la Vierge, la vierge par excellence. Les Orientaux ont encore précisé avec les formules : toujours vierge, vierge perpétuelle, semper virgo, virgo perpétua, tandis que les Occidentaux ne cessaient d’invoquer Marie demeurée vierge après l’enfantement du Sauveur : Post partum, Virgo, inviolata permansisti. Et, contre les novateurs passés ou futurs, l’Église a fixé pour jamais sa foi sur ce point dans les formules suivantes : l’une est du concile de Latran tenu sous Martin I er : Siquis… non confitetur, proprie et secundum veritatem Dei genitricem sanctam semperque virginem et immaculatam Mariant. .. in ultimis sseculorum absque semine concepisse ex Spiritu Sancto. et incorruptibiliter eam genuisse (enixam esse), indissolubili permanente et post partum ejusdem virginitate, condemnatus sit. Hardouin, Acta concil., t. iii, col. 822. L’autre formule est plus— précise encore et définitive : elle proclame simplement, mais absolument la virginité de Marie, avant, pendant, après l’enfantement du Sauveur. On la rencontre déjà, dit Knoll, loc. cit., dans certaines louanges mariales de IIIe concile de Constantinople : Marix illibata virgi nitas, quæ axte parti iii, in partu et post partum est interminabilis… Concile de Constantinople III, VIe œcuménique, act. 11, dans Hardouin, Acta concil., t. iii, col. 1253 sq. Elle a été surtout adoptée dogmatiquement par le pape Paul IV, dans sa célèbre constitution Cum quorundam, contre les sociniens, confirmée par Clément VIII. Les pontifes condamnent solennellement omnes et singulos qui haclenus asseruerunt… D. N. J. 67… secundum carnenx non esse conception in utero Beatissimæ semperque Virginis Mariae de Spiritu Sancto, sed sicut cœteros homines ex semine Joseph ; … aut eamdem Beatissimam Virginem Mariam non esse veram Dei Matreni, nec perstitisse semper in virginitatis integrilate, ANTE partum scilicet, in partu et perpetuo post partum. Cf. Dcnzinger, Enchiridion, n. 880.

Outre les ouvrages indiqués ci-dessus, voir les commentaires sur les endroits de l’Écriture sainte qui se rapportent à la controverse et notamment : Fillion, Comment, sur S. Matthieu, Paris, 1878, p. 283 sq. ; Vigouroux, Les Livres saints et ta critique rationaliste, Palis, t. iv. — Voir également les théologiens dans leurs traités De Yerbo incarnato ou De beata Virgine Maria, et spécialement saint Thomas, Sum. theol., IIP, q. XX viii ; Suarez, De mysteriis, disp. V, VI ; Petau, Dogm. theol., 1. XIV, c. III. VI ; Franzelin, De Verbo incarnato, thesis xv ; Stentrup, Synopsis, th. n ; Knoll, Instit. theol. theoret., Turin, 1802, t. r, p. 414 sq. ; Christ. Pesch, Prxlectiones dogmatiesc, Friljourgen-Brisgau,

! 896, t. IV, n. 593 sq.

H. QUILLIET.

ANTILOGIES BIBLIQUES, contradictions apparentes que les ennemis du christianisme ont constamment signalées dans les Livres saints pour attaquer leur véridicité et leur origine divine. Ce genre d’opposition à la Bible s’est produit, au cours des siècles, sous deux formes différentes. Les uns ont mis l’Ancien Testament en contradiction avec le Nouveau pour en conclure que ces deux recueils n’avaient pas été inspirés par le même Dieu. Les autres relevaient les antilogies de tous les Livres saints ou de quelques-uns afin d’en contester l’inspiration divine, ou la vérité. Après avoir étudié ces deux sortes d’antilogies, nous indiquerons la manière d’en trouver la solution.

I. Antilogies entre l’Ancien et le Nouveau Testament. — 1° Sectes gnos tiques. — Quelques sectes gnostiques des premiers âges du christianisme établissaient une antinomie absolue entre les livres de l’ancienne alliance et ceux de la nouvelle ; elles les attribuaient à deux principes contraires, la religion juive étant l’œuvre