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ANGELUS

genoux trois Ave Maria. C’est le cas pour deux lettres accordées en 1326, pour le diocèse de Passau, et ratifiées par l’évêque de cette ville, Flam. Corner, Catharus illustrata, Padoue, 1757, p. 133 ; Zaccaria, L’Ave Maria, 726 ; Hagn, Urkundenbuch f. die Gesch. des Benedictiner Stiftes Kremsmünster, Vienne, 1852, p. 202 ; pour une autre de 1325 en faveur de l’abbaye d’Amorbach, Gropp, Hist. monast. Amorbac., Francfort, 1736, p. 248 ; pour des actes du même genre de 1336, en faveur de l’abbaye de Saint-Ghislain en Hainaut, D. Baudry, Annales de l’abb. de Saint-Ghislain, dans Reiffenberg, Monum. pour servir à l’hist. des prov. de Namur, Hainaut…, Bruxelles, 1848, t. viii, p. 504 ; de 1353, à l’église de N.-B. de Consolation, à Vilvorde, Terwecoren, N.-D. de Consolation, Bruxelles, 1852, p. 112, et de 1378, en faveur de l’église de Krautheim, dans le diocèse de Mayence. Zeitschirift des Ver. f. Thüring. Gesch., Iéna, 1858, t. iii, p. 219. Parfois les actes portent que cette pratique de dire les trois Ave Maria à genoux, au son de la cloche, est secundum modum curiæ romanæ. Gropp, Hist. monast. Amorbac., p. 249 ; Chronic. Lunælac., p. 174, 176. Nous voyons cet usage établi à Vich, en 1322, Villanueva, Viage liter. á las iglesias de España, Valence, 1821, t. vi, col. 97 ; à Breslau, dans un synode de 1331, pour le bien de l’église et la paix, Hartzheim, Concil. German., t. iv, p. 317 ; à Tréguier, dans les statuts synodaux de 1334, Martène, Thes, anecd., t. iv, col. 1107 ; Act. sanct., oct. t. vii, p. 1011 ; à Paris, dans le concile de la province de Sens, où l’on décrète « que l’ordonnance du pape Jean XXII, relativement à la prière de l’Ave Maria, à l’heure du couvre-feu, sera fidèlement observée », Hardouin, Concil., t. vii, col. 1682 ; à Eichstaett dans un synode de 1334, Hartzheim, t. iv, col. 377 ; à Nantes, sous l’évêque Simon (1366-1382). Martène, Thes, anecd., t. iv, col. 962. C’est l’usage que nous trouvons officiellement reconnu dans la congrégation bénédictine de Bursfeld, en Allemagne. Ordinarius, c. xiii, dans Ceremoniale benedictinum, Paris, 1610, p. 45.

II. Sonnerie du matin. — Bientôt à la sonnerie du soir vint s’ajouter celle du matin, pendant laquelle on récita aussi la salutation angélique, le plus souvent pour honorer les douleurs de Marie au pied de la croix, ainsi qu’on avait coutume de le faire le soir pour honorer la salutation de l’ange. Cette sonnerie était généralement pratiquée au milieu du xve siècle, comme l’atteste saint Antonin, Summa, part. IV, tit. xv, c. ii, iii, § 3. On la voit adoptée en Allemagne, à Breslau, en 1416, Hartzheim, t. v, col. 160 ; à Cologne, en 1423, ibid., t. v, p. 221 ; à Mayence, la même année, ibid., t. v, col. 209 ; Hardouin, t. viii, col. 1012 ; en 1430 ; à la collégiale de Saint-Paul, à Liège, Thimister, Hist. de l’égl. coll. de Saint-Paul de Liège, 2e édit., Liège, 1890, p. 153 ; à Bamberg, en 1491. Hartzheim, t. v, p. 631. En Angleterre, l’évêque Raoul de Bath ordonne, en 1346, au clergé de sa cathédrale de réciter matin et soir cinq Ave pour les bienfaiteurs vivants et défunts avec la terminaison Jesus. Amen, en l’honneur de la Vierge. Wilkins, Concil., t. ii, p. 736-737 ; Rock, t. iii, p. 336. En 1399, l’archevêque de Cantorbéry, Thomas Arundel, mandait à l’évêque Robert de Londres, qu’à la sollicitation du roi Henri IV, la sonnerie en usage le soir aurait aussi lieu le matin pour saluer Marie leur patronne, et qu’il accordait quarante jours d’indulgence à tous ceux qui réciteraient un Pater et cinq Ave. Wilkins, t. iii, p. 246-247 ; Rock, t. iii, p. 338. En France, le concile de Lavaur, en 1368, ordonne de réciter le matin cinq Pater en l’honneur des cinq plaies de Notre-Seigneur et sept Ave en souvenir des douleurs de Marie, Hardouin, Concil., t. vii, col. 1856, usage que nous retrouvons en 1369 à Béziers, où l’on prescrit seulement trois Pater et un Ave. Martène, Thes, anecd., t. iv, col. 660.

III. Sonnerie de midi. — La sonnerie du midi, postérieure aux deux autres, eut d’abord pour but de vénérer la passion du Sauveur. Elle est signalée, en 1413, à Olmütz, Hartzheim, t. v, col. 41 ; en 1423, à Mayence, ibid., col. 209, et à Cologne, ibid., col. 221 ; mais elle n’avait lieu que les vendredis, afin que les fidèles se rappelassent les souffrances de Jésus-Christ et les bienfaits de la rédemption. En 1451, nous voyons cet usage adopté pour tous les jours au monastère du Val-des-Écoliers, à Mons en Hainaut. G. Decamps, N.-D. du Val-des-Écoliers, à Mons, Mons, 1885, p. 69. Le pape Calixte III généralisa cet usage en 1456 en ordonnant la sonnerie quotidienne de midi et en prescrivant la récitation de trois Ave, afin d’obtenir le secours divin dans la guerre contre les Turcs. S. Antonin, Chronic., part. III, c. xiv ; Baronius, Annal., ad ann. 1456, n. 19, Bar-le-Duc, t. xxix, p. 67 ; Pastor, Geschichte der Püpste, 2e édit., Fribourg, 1891, t. i, p. 596-597. Cette ordonnance fut renouvelée en 1500 par Alexandre VI, qui y ajouta la récitation du Pater. Baronius, Annal., ad ann. 1500, n. 4, Bar-le-Duc, t. xxx, p. 307. L’usage de vénérer la passion du Sauveur le vendredi fut cependant maintenu et encouragé par les papes, mais fut séparé de l’Angelus (Benoit XIV, décret du 23 déc. 1740).

Cette pratique de sonner à midi se répandit rapidement en France, surtout quand, en 1472, Louis XI l’étendit à tout son royaume et demanda qu’on priât à cette heure pour la paix, Robert Gaguin, Hist. Franc., Lud. XI, l. X, c. xii ; Genebrard, Chronogr. sacra, Cologne, 1581, p. 1085 ; cf. Du Cange, Glossar., art. Angelus ; Baronius, Annal., ad ann. 1472, n. 12, Bar-le-Duc, t. xxix, p. 527 ; Acta sanct., oct. t. vii, p. 1110. On trouve dans les archives de la ville de Tournai, 17 mars 1475, la déclaration suivante : « On vous fait assavoir que nostre saint père le pape, à la requeste du roy, nostre sire, a donné et octroie à tous ceulx et celles qui, par chacun jour environ heure de midy, au son de la cloce qui lors sonnera, diront dévotement trois Ave Maria, en priant Dieu pour paix et union du royaulme, trois cents jours de pardon et indulgence pour chacun jour, et se nomme l’Ave Maria de la paix. » Bullet. de la Soc. hist. et litt. de Tournai, t. xxii, 1889, p. 253-254. On rencontre une déclaration analogue dans les registres du chapitre de Beauvais. Barraud, Annal. arch. de Didron, 1858, p. 148. En 1476, une fondation fut faite chez les croisiers d’Aix-la-Chapelle pour y sonner, selon l’usage de collégiale de Notre-Dame, un triple son de la cloche à midi, pour vénérer la passion de Notre-Seigneur, Ernst, Suffragants de Liège, Liège, 1823, p. 266, usage qui se rencontre à la collégiale de Saint-Denis, à Liège, vers la même époque. Bull. de la comm. royale d’hist. de Belgique, 3e série, t. xiv, p. 167. L’usage de sonner trois fois le jour existait aussi en Angleterre à la fin du xve siècle. Dans des Horæ B. V. citées par Bridgett et Green, il était dit que Sixte IV avait accordé des indulgences à cette pratique, à la demande d’Élisabeth, épouse de Henri VII, et que les archevêques de Cantorbéry et d’York, ainsi que plusieurs évêques, en avaient agi de même. Bridgett, p. 218 ; Ed. Green, dans Downside review, 1895, p. 280.

IV. Fusion en une seule dévotion. — C’est au xvie siècle seulement qu’on voit ces différentes dévotions se fusionner et faire place à une prière uniforme. En 1509, le prieur de la Grande-Chartreuse, François Dupuy, établit pour les maisons de l’ordre en France, en conformité avec l’ordonnance pontificale, l’usage de sonner le matin, à midi et le soir, en récitant chaque fois trois Ave Maria. Mabillon, n. 122, p. lxxix. A la même époque, Guillaume Briçonnet, évêque de Meaux et de Lodève et abbé de Saint-Germain-des-Prés, obtint de Léon X des indulgences pour les fidèles de ses diocèses et de la juridiction du monastère qui réciteraient à genoux trois Ave aux mêmes moments. Bouillart, Hist. de l’abbaye de Saint-Germain des Prez, Paris, 1724, 1880. Nous retrouvons cet usage à Milan, sous saint Charles Borromée, Acta Mediol. Eccl., Padoue, 1754, t. i, p. 27, 360, 415 ; à Brixen,