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ANACHORETES — ANALOGIE

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11 y aurait eu, paraît-il, à Hiérapolis, des ascètes païens, qui vivaient sur des colonnes. Il est difficile de croire, au cas où ils auraient véritablement existé, que leur exemple ait provoqué les stylites chrétiens. Une seule analogie ne suffirait point pour l’affirmer.

Théodoret dit que ce genre de vie fut inauguré au Ve siècle (vers 423), par un moine syrien, nommé Syméon, qui menait déjà une existence des plus austères et qui résolut de fixer son séjour au sommet d’une colonne. Il voulait, par ce moyen, se soustraire au contact de la foule, qui se pressait autour de lui. Sa première colonne eut d’abord six coudées de haut. Il en prit ensuite une de douze, puis une de vingt-deux. A la fin, il en occupait une qui avait trente six coudées d’élévation. Théodoret, loc. cit. ; Tillemont, Mémoires, Paris, 1678, t. xv, p. 347392. Du haut de sa colonne, Syméon exerça sur ses contemporains une intluence extraordinaire. Les Arabes qui parcouraient le pays le tenaient en grande estime ; ses exhortations en convertirent un certain nombre. Vénéré des empereurs, il pouvait leur recommander par lettre les intérêts de l’Église.

Syméon fit école. L’Orient compte à sa suite un grand nombre de stylites. Saint Nil, contemporain de Syméon, écrivit deux lettres à un stylite nommé Nicandros. L. II. Epist., cxiv et ex, P. G., t. lxxix, col. 250. Voici les noms de quelques autres stylites des plus connus : saint Daniel, qui vécut auprès de Constantinople († 495 ; saint Syméon le jeune, auprès d’Antioche († 596) ; saint Alypius, à Adrianopolis (VIIe s.) ; saint Luc le jeune qui vécut au mont Saint-Joannice en Grèce… († 956). Cette institution s’est conservée en Mésopotamie, en Syrie, en Asie Mineure, et dans la région de Constantinople, jusqu’au XIIe siècle ; elle a pénétré avec la foi chez les peuples slaves, où l’on rencontre parmi les Ruthènes un stylite pendant le xvi° siècle.

L’Occident n’offre qu’un seul exemple de solitaire vivant au sommet d’une colonne, c’est Wulllaicus, que saint Grégoire de Tours rencontra à Yvoy, dans les Ar-dennes (585).

lous les stylites ne restaient pas exposés aux intempéries de l’air. Quelques-uns habitaient une petite cabane construite au sommet de leur colonne.

Le P. Delahaye, S. J., a réuni tous les renseignements que l’on peut désirer sur cette question dans son travail sur les Stylites, Compterendu du troisième congrès scientifique international des catholiques (1894), V section, p. 190-232.

VI. Pasteurs.

Les moines pasteurs ou paissants, Boirxoi, menaient une existence non moins extraordinaire. Ils n’avaient pas de domicile fixe. Ils erraient à travers les montagnes ou les plaines du désert, s’arrètant au lieu où la nuit les surprenait. Les fruits des arbres, l’herbe qui poussait à terre étaient leur seul aliment ; ils s’abreuvaient aux sources ou aux ruisseaux qu’ils rencontraient. Saint Jacques mena le premier ce genre de vie en Mésopotamie avant de monter sur le siège épiscopal de Nisibe. Théodoret, op. cit., i, P. G., t. lxxxii, col. 1291-1295. Il eut un certain nombre d’imitateurs. Saint Éphrem célèbre avec enthousiasme les vertus de ces hommes extraordinaires et fait un tableau vivant de leur existence. Sei-mo in Patres defunctos, Opéra grseca, t. i, p. 175-191, édit. Rome. Ce genre de" vie exigeait une grande énergie morale et des forces physiques peu communes. Le diacre d’Édesse déplore la fin malheureuse de pauvres solitaires qui s’étaient engagés à la légère dans cette vie errante. Epist. ad Johannem, Op. gr., t. ii, p. 187-188 ; Tillemont, t. iiv p. 292-295. On rencontre quelques moines pasteurs en Palestine et en Egypte. Quelques-uns d’entre eux fuyaient jusqu’à la vue des hommes et ne portaient aucun vêtement. Évagre scolast., Hist. eccles., 1. I, 21, P. G., t. lxxxvi, col. 2419 ; Sulpice Sévère, Dialogue, i, édit. Halm, p. 167.

J. Besse.

1. ANACLET (Saint), pape, est l’un des premiers

successeurs de saint Pierre. Son nom s’écrivait tantôt’Avéy-/Xv)Toç, tantôt KXt, toç. De là vient sans doute, dans le catalogue libérien de 354 et dans le Liber ponti/icalis, la mention très probablement erronée de deux papes, saint Clet et saint Anaclct, dont le premier aurait été le prédécesseur, le second, le successeur du pape saint Clément. Ainsi eût été conciliée la tradition dérivée de la chronique d’Hippolyte, qui fait de saint Anaclet le troisième successeur de saint Pierre (Lin, Clément, Anaclet), et la tradition qui tient Anaclet pour le deuxième successeur de saint Pierre. C’est cette dernière tradition, rapportée par Eusèbe, H. E., ni, 4 ; v, 6, fondée sur le témoignage d’Hégésippe dont Eusèbe avait les écrits sous les yeux et de saint Irénée, Cont. hær., 1. III, c. iii, n. 3, P. G., t. iiv col. 849, qui mérite le plus de confiance. C’est celle qu’ont suivi saint Jérôme, C/iron. ; De viris, 15, et le catalogue pontifical rédigé sous Léon le Grand. On ne sait à peu près rien ni du nombre exact des années de ce pontificat qu’Eusèbe porte à douze, ni des actes qui l’ont rempli. Le Liber pontificalis raconte que, par reconnaissance pour saint Pierre qui l’avait ordonné prêtre, Anaclet fit construire la Memoria beati Pétri pour servir de sépulture aux évêques. Trois lettres attribuées à saint Anaclet par le pseudoIsidore et reproduites dans Migne, P. G., t. ii col. 789818 ; P. L., t. cxxx, col. 59 sq., sont apocryphes. Jaffé, n. 2-4. Elles se rapportent à des questions de discipline telles qu’on les concevait dans le haut moyen âge et ont fourni la matière de quatre dispositions insérées dans le décret de Gratien. Jaffé, n. 5-8. — L’Eglise célèbre la fête de saint Anaclet le 13 juillet. L’année de sa mort est aussi incertaine que la chronologie de son pontificat.

Jaffé, Begesta pontificum, 2’édit., t. i, p. 1 ; Ductiesne, Z.i/, pr pontificalis, Paris, 1880, t. i, p. lxix, 02 ; Colombier, Les premiers successeurs de saint Pierre, dans la Revue des questions historiques, 1876, t. xix, p. 381-413 ; Jungmann, Dissert, selectæ in hist. eccl-, Ratisbonne, 1880, t. i, p. 122 ; Lightfoot, The apostolic fathers, Londres, 1890, p. 201 ; Lipsius, Chronologie der rômisclienBischôfe, Kiel, 1869, p. 146, et Xeue Studien : ur Papstchronologie, dans Jahrb. fur protestant. Théologie. 1880, p. 78.

H. Hemmer.

2. ANACLET DU HAVRE, capucin de la province de Normandie, né au Havre le 14 octobre 1667, entra en religion en 1692 et bientôt se rendit célèbre par son savoir et son talen ! pour la prédication. Pendant plusieurs années il remplit la charge de lecteur en théologie et laissa comme souvenir de son enseignement : Sujets de conférences sur la théologie positive, où l’on propose les questions dogmatiques et historiques qui concernent la religion, tant en général qu’en particulier, avec la citation des auteurs qui traitent de ces matières. A l’usage des capucins, 3 in-4°, Rouen, 1712, t. i, p. 24608 ; t. ii p. 16-468 ; t. iii, p. viii-360. Le P. Anaclet mourut le 15 novembre 1736.

P. Edouard d’Alençon.

ANAGNOSTES, voir Lecteups.

ANALOGIE. D’une façon générale l’analogie est une ressemblance mêlée de dissemblance ou une ressemblance partielle. Elle tient le milieu entre la ressemblance totale et la dissemblance complète. On la rencontre à chaque pas sur le terrain théologique. Les théologiens affirment sans cesse que les mêmes noms appliqués à Dieu et aux créatures n’ont pas tout à fait le même sens ; que les propriétés communes à l’infini et au fini existent chez l’un et chez l’autre dans une proportion diverse ; ils ont recours à une foule d’analogies pour éclairer les mystères. L’analogie est donc un des procédés les plus fréquents de la connaissance, du langage ou du raisonnement théologiques. Nous étudierons successivement : I. Sa nature. IL Son application à la tbéodicée. III. Son rôle dans la connaissance des mystères.