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AMICO — AMMIEN MARCELLIN


lume : De jure et justifia, fut déféré à la S. C. de l’Index, qui y censura trois propositions (18 juin 1651) ; elles furent plus tard condamnées par Alexandre VII (n. 17) et Innocent XI (n. 32 et 33). Un décret du 6 juillet 1655 permet la lecture du volume, quand il aura été corrigé. D’après Sotwel, l’édition d’Anvers, 1650, n’aurait déjà plus les trois propositions en question. La faculté de théologie de Louvain lança, le 6 septembre 1619, contre elles une censure, dans laquelle l’auteur est nommé le P. Ami. Pascal les a aussi critiquées dans sa 7e Provinciale. Le P. Patuzzi, dominicain, publia : Storia d’un fatlo del Padre Amico Gesuita… tradotta dal francese, au t. ii p. 3-12, de ses Osservazioni di Eusebio Eraniste… diretle al P. Zaccaria, Venise, 1756, in-8°, 2 vol.

De Baclter et Sommervogel, Bibl. de la C de Jésus, t. i, col. 280-282.

C. Sommervogel.

AMINTA Philippe, dominicain italien. On a de lui : Epitome absoluta ac novissima de locis theologicis, ad theologise candidatorum institutionem scitu necessaria, Macerata, 1819 ; — L’Ebraismo sema replicae sconfttto colle stesse armi, con 100 parafrasi délie profezie avverate in Gesù Christo, Rome, 1823.

P. Mandonnet.

AMMIEN MARCELLIN, historien de valeur, était un Grec originaire d’Antioche. Il s’adonna de bonne heure aux études, sans négliger pour cela la carrière des armes. Il servit sous Constance, sous Julien l’Apostat en Perse, et dans différentes guerres sous ses successeurs. Retiré à Rome où il mourut vers l’an 400, il écrivit une histoire romaine en trente et un livres : Rerum gestarum libri XXXI, pour faire suite aux Annales de Tacite, depuis l’année 96 après J.-C. (Nerva) jusqu’à la mort de Valens en 378. Les treize premiers livres sont perdus. Les dix-huit derniers, les plus intéressants parce qu’ils traitent la période contemporaine de l’auteur, sont conservés et constituent l’une des sources les plus sûres et les plus abondantes pour l’histoire du IVe siècle depuis l’élévation de Gallus, frère de Julien l’Apostat, au rang de César. L’ouvrage d’Ammien Marcellin n’a pas de valeur littéraire ; la lecture en est rendue pénible par l’emphase du style, la recherche de tournures poétiques, la bizarrerie et l’obscurité des constructions. L’auteur avait de la lecture et citait ou imitait servilement et tour à tour ses auteurs favoris. Virgile, Horace, Ovide, Lucain, Plaute, Térence, Cicéron, Aulu-Gelle, Salluste, César, Tacite, etc. Le fruit de son labeur est une marquetterie un peu confuse, où le mauvais goût de l’époque se double des défauts personnels à l’auleur. En revanche il a créé une mine de renseignements historiques, géographiques et archéologiques. Ses informations sont ordinairement très sûres, la droiture de son jugement et l’impartialité de ses récits inattaquables.

Ammien Marcellin a parlé du christianisme en plusieurs rencontres, avec tant d’égards, que certains critiques en ont conclu jadis qu’il était chrétien (Claud. Chifllet). Le contraire est certain. Lui-même ne se donne nulle part pour chrétien, bien qu’il écrive à la lin du ive siècle (vers 390) sous des empereurs chrétiens, à une époque où aucun retour de fortune ne pouvait plus galvaniser le paganisme. Lorsqu’il parle de choses chrétiennes, de martyres ou de synodes, il introduit des explications, des bouts de commentaire qui trahissent une plume païenne, écrivant un ouvrage destiné à des lecteurs païens qui n’ont qu’une connaissance vague et superficielle du christianisme. Au contraire, il parle avec aisance, naturel et déférence des usages païens, des auspices et des augures, xxi, 1. Il est trop éclairé pour croire à un grossier polythéisme ; plus détaché que Julien lui-même des formes religieuses du paganisme, il appartient à cette classe de païens qui étaient arrivé à

une sorte de monothéisme assez analogue au déisme rationaliste. La croyance en une divinité supérieure, fatum, numen, directrice des destinées du monde, vengeresse des crimes, rémunératrice des bonnes actions, se manifeste clairement chez Ammien dans le récit de l’assassinat de Gallus par Constance, parmi une grande abondance d’images païennes : vigilavit utrobique superni numinis œquitas… xiv, 11, 24-26.

Ammien professe une véritable estime pour le christianisme dont il se sent rapproché par sa croyance en un numen cseleste, œternum, divinum, perpetuum, xxvii, 3, 15, summum, cfficax, xiv, 11, 25, et par le sérieux de la conduite morale. Tout en louant chez Julien la science philosophique, les qualités d’homme d’État et de général, il relève le contraste de ses efforts pour « faire revenir sur terre la justice exilée au ciel » avec l’iniquité de ses défenses à l’égard des chrétiens : illud autem erat inclemens obruendum perenni silentio, quod arcebat docere magislros rhetoricos et grammaticos ritus christiani cullores, XXII, 10, 7 ; il fait à Jovien une sorte de mérite d’avoir été christianse legis studiosus, xxv, 10, 15 ; il laisse entrevoir son estime pour les vierges chrétiennes : inventas… alias quoque virgines christiano rilu cullui divino sacratas, custodiri intactas et religioni servire solito more, nullo vêtante, præcepit (il s’agit de Sapor, roi des Perses), xviii, 10, 4. De même il parlait avantageusement des chrétiens qui deviare a religione compulsi pertulerc cruciabiles pœnas, ad usque gloriosam mortem intemcrata fide progressi, et nunc martyres appellantur, xxii, 11, 10. Enfin Ammien ne ménage pas les éloges, aux clercs chrétiens, surtout aux clercs qui vivant aux champs répandaient l’édification par la régularité et l’austérité de leur vie, xxvii, 3, 15. Si Ammien est bien disposé à l’égard des chrétiens, il n’est pas des leurs : il regarde le christianisme avec sympathie sans en redouter les succès, mais sans en pénétrer les principes, sans en approfondir les doctrines, sans se passionner ni même s’animer pour les controverses. Son éloge des clercs champêtres a pour pendant la critique des mœurs du clergé de Rome, vivant dans le luxe, les plaisirs, recherchant les honneurs et les largesses des matrones, briguant le siège épiscopal. Il avait assisté aux luttes sanglantes que se livrèrent les partisans du pape Damase et de son compétiteur Ursinus et il en rapporte quelques traits : constat in basilica Sicinini, ubi ritus Christiani est conventiculum, uno die centum triginta septem reperta cadavera peremplorum, xxvii, 3, 13. De même qu’il ne soupçonne pas l’intérêt que prennent les chrétiens à la légitimité de leurs évêques, de même il ne saisit guère les nuances des doctrines qui mettaient aux prises les fidèles. C’est à propos du rôle de Constance dans les querelles ariennes qu’Ammien écrit ces paroles souvent citées : Ckristianam religionem absolutarn et simplicem anili superstitione confundens in qua scrutanda perplexius qtiam componenda gravius excilavit discidia plurima ; quæ progressa fusius aluit concertatione verborum ut catervis antistitum junientis publias ultro citroque discurrentibus per synodos, quas appellant, dum ritum omnem ad suuni trahere conantur arbitrium, rei vehicularim succideret nervos, xxi, 16, 18. Il est peu croyable que l’historien ait appliqué l’expression de religio absoluta et simplex au christianisme orthodoxe et prétendu stigmatiser l’arianisme comme une superstitio anilis. Il est très vraisemblable que le christianisme qu’Ammien a en vue est un christianisme philosophique, tel qu’il se le figure, et plus ou moins conforme à son propre déisme, et que la superstition qu’il reproche à Constance de favoriser ce n’est pas tant une secte chrétienne que les subtilités dogmatiques elles-mêmes. En tant qu’homme d’État, il réprouve les disputes interminables d’évêques jaloux de plier tous leurs coreligionnaires à leur ma-