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AMBROSIEN (RIT)


Ceriani, Magistretti, le rattachent au rite romain ; M. Duchesne et dom Cagin, au rit gallican. Les trois premiers pensent que l’autorité des papes a dû étendre à ces pays la liturgie romaine, considérée par ces savants comme la seule primitive. C’est principalement sur des raisons théologiques et sur la primauté du pape qu’ils s’appuient. Il est inutile d’observer que la thèse opposée ne peut embarrasser les théologiens, puisque les liturgies orientales, si différentes de la liturgie romaine, ne sont pas considérées comme une difficulté sérieuse et que les Églises particulières peuvent développer leur discipline d’une façon autonome. On trouvera plus loin, particulièrement au § IV relatif à la messe, diverses preuves de la parenté du rit ambrosien avec l’ancien rit gallican, en même temps que les principales ressemblances du rit ambrosien avec le rit romain.

Il y a aussi dans la théorie de Probst une équivoque sur laquelle dom Cagin a fait la lumière. La liturgie romaine dont on parle est relativement récente. Rien ne s’oppose a priori à ce que le rit ambrosien nous ait conservé fragmentairement des survivances d’un état plus ancien du rit romain. C’est l’hypothèse à laquelle se rallie dom Cagin ; il voit dans les différents rits gallicans des spécialisations d’un rit romain ancien. M. Duchesne considère le rit milanais primitif, dont nous n’avons plus que des vestiges, comme la source des rits gallicans ; d’après lui, le rit milanais lui-même aurait pour origine une réforme faite par l’évêque Auxence (355-374) dans le sens d’une accommodation des usages byzantins. Quoi qu’il en soit, la part prise par saint Ambroise à la constitution de ce rit ne saurait être déterminée historiquement. Voici tout ce que nous savons à cet égard. Dans un sermon contre Auxence (publié P. L., t. xvi, col. 1017 c), on lit, § 31 : Hijmnorwnx quoque meoruni carniinibus deceptum populum ferunt. Plane nec hoc abnuo. Grande carmen istud est quo nihil potentius quam confessio Trinitatis quæ collidie totius populi ore celebratur ? Certalim omnes student fideni fateri, Patrem et Filium et Spiritum sanction norunt versibus prædicare. Facti sunt igitur omnes magislri qui vix poterant esse discipidi. Ainsi, pour vulgariser la doctrine orthodoxe sur la Trinité, Ambroise composa des hymnes que chantait à l’église tout le peuple, divisé en deux chœurs probablement, certalim. Ce chant à deux chœurs, appliqué aux psaumes, est aussi une des innovations d’Ambroise. Saint Augustin la mentionne avec les hymnes, Confess., IX, vu, 15 : Tune hymni et psalmi ut canerentur secundum morem orientalium partium (l’Église de Syrie) ne populus mœroris tsedio conlabesceret institutum est, et il nous donne en même temps la date de cette innovation : c’était au moment où Justine réclama pour les ariens la jouissance de la basilique porcienne (386 ; cf. Ih iii, Studia Ambroisiana, p. 359). Enfin le biographe d’Ambroise, le diacre Paulin, lui attribue l’introduction de l’office même de vigiles : Hoc in tempore, primum anliplionse, hymni et vigilise in ecclesia Mediolanensi celebrari cœperunt. Cuius celebritatis devolio usque in hodiernum diem non solum in eadem ecclesia, verum per omnes pœne Occidentis provincias manet. § 13, P. L., t. xiv, col. 31 d. Ces innovations liturgiques sont des importations grecques. On ne doit pas oublier, quand on cherche à déterminer l’influence d’Ambroise, que par sa culture et par ses sympathies il était plus grec que latin, Ad. Harnack, Geschichte der altchristliclien Literatur, t. i, p. lv, quoique sa nature d’esprit et son caractère fussent profondément romains.

III. L’année liturgique. — Elle commence à la SaintMartin. Ce fait s’explique par la durée de l’Avent. Il y si six dimanches de l’Avent. Si Noël tombe le dimanche (coïncidence nécessairement supposée dans la distribution de l’année), le 1 er dimanche se trouve reporté au 13 novembre. Comme les samedis sont numérotés

d’après le dimanche suivant, le 12 novembre est le 1 er samedi de l’Avent. Les anciens livres ne séparaient pas le propre des saints du propre du temps, mais plaçaient les fêtes de saints en tête des époques liturgiques correspondantes. La fête de saint Martin (11 novembre) était donc une date naturelle pour le début du cycle. Le dimanche avant Noël était consacré à la Vierge : Doniinica VI Adventus ; item ad Sanclam Mariant. L’office de ce jour était festal, avec vigiles. Cette couleur spéciale correspond à la fête de la sainte Vierge que dans certains pays gallicans on plaçait avant Noël, le 18 décembre, en Espagne, depuis le concile de Tolède de 656. Or dans l’hypothèse de Noël tombant un dimanche, le dimanche précédent porte la date du 18. C’est notre fête de VExpectatio. D’ailleurs ce dimanche d’avant Noël et toute la semaine s’appellent dans le rit ambrosien ante Nalivitatem Domini scu de exceptato (sic). Les fêtes après Noël sont de saint Etienne, de saint Jean, des Innocents et de l’ordination de saint Jacques. Cette dernière, dont l’office ramène par un jeu de mots continuel le nom de Jacob, est intéressante. En Orient et dans le rit gallican, le 27 décembre était d’abord commun aux saints Jacques et Jean. A Rome, on le consacrait seulement à Jean. Le rit ambrosien a adopté, ici comme ailleurs, un compromis. Dans l’hypothèse d’une semaine complète après Noël, il reste deux jours pour lesquels existent les offices du samedi et du dimanche après Noël. La fête du l, r janvier est appelée simplement l’octave de Noël. Puis viennent l’Epiphanie avec cinq dimanches subséquents, et ensuite les dimanches de la septuagésime, de la sexagésime, de la quinquagésime. Le dimanche suivant s’appelle dans l’antiphonaire : in capite quadragesimse, désignation analogue à celle de in capite ieiunii. C’est que le jeûne commençait alors seulement et non au mercredi précédent ; de plus, du moins au temps de saint Ambroise, on ne jeûnait pas le samedi, de même qu’en Orient et en Gaule. Ambroise, De Elia et ieiunio, x, 34. P. L., t. xiv, col. 708. Les dimanches suivants sont numérotés I, II, III de Quadragesima (correspondants à nos 2 e, 3e et 4e dimanches) et de même les jours de chaque semaine précédente. Le 1 er (2 e) porte aussi, d’après l’Évangile, le nom de De Samaritana ; le 2e (3 e) De Abraham ; le 3e (4 e) celui de De cseco ; le 4e ou dimanche avant les Rameaux, De Lazaro ; le dernier s’appelle Dom. in ramis palmarum. Ce jour-là, d’ailleurs, on ne lisait pas l’évangile de l’entrer à Jérusalem, qui était assigné au 4e dimanche de l’Avent ; mais il était fait mention de l’entrée de NotreSeigneur à Jérusalem dans la préface. Sacramentarium Bergomense, p. 58, n. 465. La Benediclio cineris et cilicii est placée après la messe du samedi de la 2e semaine, avant le dimanche De Abraltam. Les désignations de ces dimanches, si on les compare aux indications du Liber comicus de Tolède (édit. Morin, 1893), nous révèlent une transposition : le 2e (3 e) dimanche était dans le rit mozarabe celui de l’aveugle né et le 3e (4 e) Mediante die festo, Joa., iiv 14. C’est que le rit ambrosien a introduit dans l’économie de son évangéliaire une péricope romaine, Joa., viii, 31-59, d’où est tiré aujourd’hui l’évangile de la Passion. Dans l’ordre actuel, la Missa in mediante die festo est placée entre le 3e et le 4e dimanche après Pâques. Cf. Sacramentarium Bergomense, p. 78. Durant la semaine pascale, le rit ambrosien a gardé l’usage gallican des deux messes quotidiennes, la première in ecclesia minore (ou « hiemali ») pro baptizatis (cf. la rubrique du Missale gallicanum vêtus : Missa matutinalis, per totam Pascham pro parvulis qui renati sunt, mature dicenda), et la seconde, in ecclesia maiore. Les Rogations avaient lieu immédiatement avant la Pentecôte. C’était un jeûne de trois jours. Sacramentariinn Bergomense, p. 83, n. 706. Il y a là peut-être une adaptation d’un usage nouveau à une ancienne litanie célébrée en Espagne, au jeûne de la