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ALLEMAGNE, PUBLICATIONS CATHOLIQUES


Facultés et séminaires (nommons, parmi ces derniers, celui de Mayence qui fut, dès le commencement du siècle, un foyer de vie catholique pour l’Allemagne), rivalisèrent d’ardeur pour donner à la théologie allemande un incomparable essor. Est-ce dire qu’elle soit arrivée aujourd’hui à l’apogée de ses efforts et de ses succès ? Qui oserait l’affirmer ? Qui, surtout, oserait prétendre qu’il ne reste encore de grandes lacunes à combler et de grandes tâches à remplir ?

Après cet aperçu général, passons rapidement en revue le développement des différentes branches de la science sacrée.

III. Théologie dogmatique.

1° xvie et xviie siècles. — C’est à trois jésuites étrangers que revient la gloire d’avoir, au temps des grandes luttes contre le protestantisme, restauré en Allemagne la théologie scolastique. Grégoire de Valentia (1551-1603), professeur à Dillingen et à Ingolstadt, le plus grand d’entre eux, Commentaria theologica, 4 vol., Ingolstadt, 1591, etc. ; Rodolphe d’Arriaga (1592-1667), professeur à Prague, Disputaliones theologicse in Summam S. Thomee, 8 vol. in-fol., Anvers, 1643 sq., et Martin Becanus (1561-1624), l’infatigable adversaire du calvinisme, Summa theologiæ scholasiicse, Mayence, 1612, 4 vol. in-4°. Il faut y joindre le jésuite allemand Ad. Tanner (1572-1632), le plus célèbre des disciples de Grégoire, Vniversa theologia scholastica, speculativa, practica ad methodum S. Thomse, Ingolstadt, 1626, 4 vol. in-fol. Tous, sauf Arriaga, qui resta sur le terrain purement scolastique, surent joindre à l’élément spéculatif et systématique les données de l’exégèse et de la patristique. Ils assurèrent en Allemagne la prépondérance au système moliniste, tandis que le thomisme eut ses défenseurs dans les écoles de Cologne et de Salzbourg.

2° xviiie siècle et commencement du xix". — Le commencement du xviiie siècle vit le thomisme reprendre plus d’inlluence dans les abbayes et écoles bénédictines et tandis que le scotisme trouvait quelques représentants dans les rangs des franciscains de la stricte observance, les augustins défendirent contre les jésuites les doctrines de Berti (augustinianisme). On discuta entre ces différentes écoles les questions de la science divine, de la grâce, de l’objet formel de la foi. L’époque fut surtout fertile en manuels de théologie traitant d’après la division usitée alors la theologia dogmatica (positive), scholastica et polemica. Les œuvres les plus importantes sont : pour l’école thomiste la Theologia Salisburgensis (Theologia scholastica secundum viam et doctrinam S. Thomœ), de P. Metzger (1637-1702), le meilleur théologien parmi les bénédictins allemands, Augsbourg, 1695, 2 vol. in-fol. ; — pour l’école franciscaine la Theologia scholastica, 4 vol. in-fol. (1721), de Krisper ; — pour l’école des jésuites la Theologia Wirceburgensis (Theologia dogmatica, polemica, scholastica et moralis), Wurzbourg, 1766-1771, t. xiv, in-8°, de Kilber († 1783), Holtzclau et Neubauer, de beaucoup le meilleur ouvrage du temps. Le nom d’Eusèbe Amort (1692-1775), chanoine régulier de Saint-Augustin, l’homme le plus érudit et le plus universel de son époque en Allemagne, philosophe, théologien, moraliste, controversiste, historien et critique, marque le passage à une nouvelle période dans l’histoire de la théologie. Sa Theologia ecleclica moralis et scholastica, Augsbourg, 4 vol. in-fol., 1752, tout en restant fidèle à la méthode scolastique, tend à la simplifier, s’élève contre le formalisme néo-scolastique et cherche à concilier les doctrines fondamentales du thomisme avec les systèmes opposés. La philosophie aristotélicienne, déjà attaquée de toutes parts et abandonnée par un certain nombre de théologiens catholiques, trouva en lui un intrépide défenseur. Cependant la philosophie « empirique » de l’époque ne cessa de gagner du terrain. Les questions de méthodologie théologique agitèrent de plus en plus les esprits. Gallus Cartier († 1777), aban donnant l’esprit et la méthode scolastiques, publia sa P/iilosophia eclectica, Augsbourg, 1756, suivie bientôt de sa Theologia universalis ad mentem et methodum celeberrimorum nostræ selatis theologorum ac S. Scriptural interpretum, Augsbourg et Wurzbourg, 1757-1758, 5 vol. in-4° ; l’ex-jésuite Stattler, l’un des plus féconds et des plus inlluents théologiens du temps, sa Philosophia metltodo scientiis propria explanala, Augsbourg, 17691772, 5 vol., mettant la « réflexion » à la place de « l’abstraction ». D’autre part, Schmier et Cartier publiaient leurs Loci theologici tendant à faire prévaloir dans la théologie ainsi simplifiée l’élément positif.

C’est alors queM.Gerbet, l’illustre abbé de Saint-Biaise, traça dans une sorte d’encyclopédie, Principia théologies eœegeticee, — dogmaticæ, — sijmbolicæ, — mysticæ, — moralis, — canonicee, — sacramentalis, — Uturgicæ, Saint-Biaise, 1753-1759, le plan d’une nouvelle théologie. L’élément historico-dogmatique prédomine chez lui comme chez Amort : ses conceptions spéculatives se rattachent plutôt à saint Augustin qu’à saint Thomas. Il voit dans la méthode scolastique un excellent exercice de l’esprit, mais en lui reprochant ses excès lui dénie le droit d’occuper à elle seule le domaine de la théologie.

C’est à ces tendances positives des écoles bénédictines que nous devons deux ouvrages d’une solide érudition, YAnalysis Patrum de D. Schram (1722-1797), qui publia en outre un Compendium theologiœ… methodo scientifica propositum, Augsbourg, 1768, 3 vol., et des Institutiones mysticæ, Augsbourg, 1774, 2 vol., ainsi que VHistoria theologico-critica de vita scriptis atque doctrina S. S. Patrum, Augsbourg, 1783-1793, 13 vol. in-8 », de Lumper (1747-1800), en même temps que l’introduction de la patrologie dans le cadre de l’enseignement théologique.

Tout ce que ces réformes pouvaient avoir de légitime fut malheureusement plus que contrebalancé par l’esprit fébronien et joséphiste des hommes d’Église et d’État qui, depuis 1750, cherchèrent à les introduire de force dans toutes les écoles théologiques de l’empire. Les jésuites perdirent d’abord la direction de l’enseignement théologique ; on finit par leur enlever leurs chaires et les persécuter ouvertement. La théologie dogmatique perdit peu à peu son prestige ; une sèche nomenclature de notices historiques dut remplacer ce qui lui manquait en profondeur et en esprit catholique.

Quelques œuvres cependant dénotent un sincère effort vers une conception plus élevée et plus correcte de la théologie, ce sont les Institutiones theologiæ dogmaticæ, de Klùpfel (1782) et de Wiest (1788), le Systema theologiæ catholicæ de Dobmayer (1807-1819), Y Anthropologia biblica d’Oberthiir, le System der katholisch-spekulativen Théologie de Fr. Brenner (1815 sq., 1827 sq., 1837), qui, en prenant comme point de départ l’idée du royaume de Dieu, tenta une synthèse de l’élément dogmatique, philosophique et historique de la théologie. Mettre la philosophie de l’histoire et une connaissance approfondie de l’Écriture au service de la théologie, c’est ce qu’avait essayé déjà non sans succès le plus célèbre théologien de l’école de Lucerne, J. H. O. Giigler (17821827), Die heilige Kunst, etc., Landshut, 1814 ; Lucerne, 1817 sq. Le souffle vivifiant de son maître, M. Sailer, a passé dans ses œuvres, et l’on y pressent l’approche d’une ère nouvelle. L. Liebermann dans ses Institutiones theologiæ dogmaticæ, 5 vol., Mayence, 1819-1827, donna l’exemple d’une exposition claire et concise, plus positive que spéculative du dogme catholique, dont la parfaite orthodoxie était à cette époque, plus que jamais, un inappréciable mérite.

3° Depuis 1830. — Les efforts qui suivirent pour rendre à la théologie ce que le joséphisme lui avait enlevé de profondeur et de solidité spéculative et la défendre des erreurs philosophiques du temps ne furent pas tous heureux. Hermès († 1831), en luttant contre la