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ALEXANDRE DE HALES

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I. Vie. — La date et le lieu de sa naissance sont inconnus. Il prit son nom du couvent de Halés, au comté de Glocester, où l’on pense qu’il avait fait ses premières études.

Il vint à Paris, y fréquenta les écoles, y fut reçu docteur et y enseigna la philosophie et la théologie. C’était un professeur très renommé quand il entra, en 1222, ou plus probablement en 1231, Denifle, Chartul. univers. Paris., Paris, 1889, t. I, p. 135, dans l’ordre des frères mineurs, qui le chargèrent aussitôt de la direction de leurs études. Jean de Florence, second général des franciscains, leur avait défendu de prendre le titre de docteur, comme contraire à l’humilité dont ils faisaient profession. Alexandre, qui portait ce titre avant sa réception dans l’ordre, le garda avec sa chaire sous l’habit de saint François. Les frères mineurs l’imitèrent depuis lors. De son vivant, l’université de Paris ne songea pas à leur •en contester le droit.

Alexandre travaillait sans relâche à la préparation de ses cours. Ses historiens le disent et nous en avons la preuve dans la Somme qui reproduit son enseignement. On le désigna sous le nom de doctor irrefragabilis. Ce titre lui fut-il donné spontanément par ses élèves ? Nous ne savons. Plusieurs auteurs pensent qu’il lui fut attribué à la suite d’une bulle d’Alexandre IV, du 28juillet 1256, dont il sera question plus loin, et où ses sentiments sont traités d’irréfragables, sententiarum irrefragabilium. Quoi qu’il en soit, il n’est pas surprenant qu’il ait excité l’admiration de ses contemporains.

Il eut certainement pour disciple Jean de la Rochelle. Saint Bonaventure, qui entra dans l’ordre de SaintFrançois en 1238, appelait plus tard Alexandre son père et son maître, paterel magister tioster. IV Sent., 1. II, dist. XXIII, q. m. Ce qui suppose qu’il avait aussi suivi ses leçons. Furent-elles aussi entendues par saint Thomas d’Aquin en 1244 ? Wadding et Sbaralea l’ont soutenu. Ils se fondaient sur une épitaphe qui ornait le tombeau d’Alexandre de Halés. Mais il semble bien que la première épitaphe qui fut placée sur cette tombe n’a rien contenu de pareil. D’autre part, si nous en croyons les biographes de saint Thomas, ce dernier aurait commencé l’étude des sciences sacrées à Cologne, à l’école d’Albert le Grand, et ne serait venu à Paris qu’après la mort d’Alexandre. Wadding croit encore que Duns Scot fut l’élève du premier docteur franciscain. Cette opinion ne s’appuie sur aucun texte ; elle est même tout à fait invraisemblable, car Duns Scot mourut en 1308, soixantetrois ans après la mort d’Alexandre de Halés.

Jean de la Rochelle enseigna sous Alexandre, et figure en 1238, parmi les maîtres en théologie de l’université de Paris. Denifle, op. cit., t. i, n. 108, p. 158.

En 1242, Alexandre de Halés composa avec les franciscains Jean de la Rochelle, Richard et Robert de Bastia, une explication de la règle de saint François, Wadding, Scrip. ord. minorum, p. 9, et il fut envoyé au chapitre général de son ordre qui se tenait à Bologne.

Il mourut trois ans plus tard, le 21 ou le 27 août 1245 suivant Wadding, ibid., le 15 août suivant Denifle, op. cit., p. 187. Il fut inhumé dans l’église du couvent des cordeliers à Paris, où l’on voyait son tombeau jusqu’en 1790. Jean de la Rochelle l’avait précédé de quelques mois dans la tombe. Denifle, ibid.

II. Écrits. — On a attribué à Alexandre de Halés un grand nombre d’écrits philosophiques, historiques, exégétiques ou théologiques, dont la plupart ne sont pas de lui. Nous ne parlerons que de ceux qui ont été imprimés.

1° Ouvrages philosophiques. — Alexandre de Halés avait enseigné la philosophie. Il est donc probable qu’il laissa des travaux sur cette science. On a imprimé sous son nom : 1. Commentarii in metaphysicam Aristotelis, Venise, 1572, et 2. Expositio super tertium librum de anima (Oxford), 1480. Mais le premier de

ces ouvrages a pour auteur Alexandre d’Alexandrie, qui était général des mineurs en 1313. Pour le second, il est si rare que les critiques n’ont pu l’examiner. Sbaralea, Supplementum Waddingi, Rome, 1806, p. 19, incline à penser qu’il est aussi d’Alexandre d’Alexandrie.

2° Ouvrages historiques. — On a attribué à Alexandre de Halés De faclis Mahommedi, ou De origine, progrcssu et fine Mahumetes et quadruplici reprobatione prophétisa ejus, Strasbourg, 1550 ; Cologne, 1551, mais cet ouvrage a pour auteur Jean de Galles, franciscain anglais du xm e siècle. Histoire littéraire de la France, t. xviii, p. 326.

3° Écrits exégétiques. — On a publié sous le nom d’Alexandre de Halés : Poslilla in psallerium, Venise, 1496 ; Leipzig, 1554 ; Venise, 1556. Cette attribution est fautive, car le même ouvrage a été aussi publié sous le nom de Hugues de Saint-Cher, Venise, 1516 et 1546, etc., et il est bien de ce dernier auteur. On a encore imprimé, sous le nom d’Alexandre, d’après un manuscrit du couvent des franciscains d’Anvers, Commentarii in Apocalypsim sancti Joannis, in-fol., Paris, 1647. Les critiques doutent que ce commentaire soit de la main d’Alexandre. Cependant parmi des citations d’auteurs du xn e siècle, cet ouvrage n’en contient aucune d’écrivains postérieurs au commencement du xm e siècle. C’est un indice en faveur de son authenticité.

4° Ouvrages théologiques. — On a impimé sous le nom d’Alexandre les ouvrages suivants : 1. Summa virtutum, Paris, 1509 ; ouvrage inachevé. La Somme théologique d’Alexandre dont nous allons parler, ne contient pas les questions De virtutibus in génère qu’il avait annoncées. On en a conclu qu’il devait avoir écrit un traité des vertus, qui se serait détaché de la somme. Mais nous verrons que sa somme est inachevée et qu’elle offre plusieurs autres lacunes semblables. D’autre part, il s’est trouvé que la Summa virtutum dont on faisait honneur au docteur franciscain, avait des ressemblances avec la seconde partie de la Somme de saint Thomas d’Aquin. Bien que ces ressemblances fussent lointaines (S. Bonaventurse opéra, Quaracchi, 1882, t. i, p. 60, 61), on accusa ce dernier de plagiat : ce qui envenima la discussion. La vérité est que cette Summa virtutum n’est point d’Alexandre, mais d’un auteur franciscain postérieur, Zeiler, DerKatholik, 1879, 1. 1, p. 38-39 ; S. Bonaventurse, Opéra, Quaracchi, 1882, t.i, p.LXi, lxii ; Prosper de Martigné, La scolastique et les traditions franciscaines, Paris, 1888, p. 55. Simler, Des sommes de théologie, Paris, 1871, p. 118-134, analyse assez longuement la Summa virtutum dont il a découvert un exemplaire et soutient qu’elle est l’œuvre d’Alexandre. Mais il y a une grande différence entre ce qu’on dit de la foi dans la Summa theologise (voir plus loin) et dans la Summa virtutum. Simler, op. cit., p. 127, 128. La Summa virtutum est en outre divisée en collationes, articuli et quœstiones, et non en quœstiones, membra et articidi. Ce qui prouve qu’elle n’a jamais fait partie de la Theologiœ summa, dont les divisions sont intitulées de cette dernière manière. Cependant la Theologise summa est le seul ouvrage attribué à Alexandre par la bulle d’Alexandre IV, du 28 juillet 1256 (voir plus loin), qui n’aurait pas manqué de signaler aussi la Summa virtutum, puisqu’elle en est distincte, si elle avait été attribuée dès lors au célèbre docteur franciscain. — 2. Expositio quatuor magistrorum in rcgulam sancti Francisci, imprimé dans Firtnamentum trium ordinum, Nuremberg, 1482. C’est l’explication de la règle de saint François que nous avons vu rédiger par Alexandre en collaboration avec trois de ses confrères. — 3. Un sermon sur l’Immaculée Conception, attribué à tort (cf. Prosper de Martigné, La scolastique et les traditions franciscaines, p. 367 sq.) à Alexandre de Halés (voir plus loin son opinion sur ce dogme), a été imprimé à Louvain en 1663, par les soins de Pierre de Alva. — 4. Quœstiones