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ALEXANDRE VIII, PROPOSITIONS CONDAMNÉES PAR LUI

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une thèse, soutenue en 1704 à l’abbaye de Saint-Étienne de Caen, on osa encore laisser indécis si ces paroles : Je te baptise, sont nécessaires pour la validité du baptême. Un acte épiscopal de M9 r l’évêque de Bayeux, du 5 mai 1707, réprima cette audace, en condamnant les Thèses thcologicse. Cf. Dictionnaire des livres jansénistes, Anvers, 1752, au mot Thèses theologicse.

28. Vaiet baptismus collatus a ministro, qui omnem ritum externum formamque baptizandi observât, intus vero in corde suo apud se resolvit : Non intendo, quod facit Ecclesia.

Valide est le baptême conféré par un ministre qui observe tout le rite extérieur et garde la forme du sacrement, mais dit fermement à part soi : Je n’ai point l’intention de faire ce que fait l’Église.

C’est encore Farvacques qui soutint cette proposition à Louvain, en 1678. Voir Mémoires cités, et Berti, 0. S. Aug., Opus de theologicis disciplinis, 1. XXX, c. xvi, Venise, 1760, t. in, p. 218. Steyaert nous apprend qu’elle eut un grand succès auprès de la jeunesse avide de nouveautés, après la diffusion en Belgique d’une théologie due à un religieux français ; c’était apparemment l’ouvrage du récollet Jean Marius Scribonius, intitulé : Pantalithia seu Sunima totius veritatis theologicse, infol., Paris, 1620. Au tome IV, disp. I, De sacram., q. VII, p. 21, il distingue de l’intention spéculative et interne l’intention qui concerne la pratique et se termine à l’acte extérieur, ad praxim redacta et in actuni externum prosiliens ; cette dernière suffit, peu importe l’intention interne, s’il s’agit de la validité du sacrement. De là le raisonnement de Farvacques : Peu importe ce que le ministre pense, dit et veut intérieurement ; peu importe qu’à part soi il n’ait point l’intention de faire ce que fait l’Église, si en réalité, il fait ce que fait l’Église, en observant tout le rite extérieur et en gardant la forme du sacrement. Que résulte-t-il du rejet de la proposition 28 e par le siège apostolique ? Directement, qu’une disposition même purement intérieure du ministre qui se formulerait ainsi : Je n’ai point l’intention de faire ce que fait l’Eglise, est incompatible avec Y intention de faire ce que fait l’Église, requise dans le ministre du sacrement par le concile de Florence, dans le décret Pro Armenis, et par le concile de Trente, sess. VII, can. 11. Denzinger, n. 590, 735. Indirectement, que Yintention de faire ce que fait l’Église, essentielle à la validité du sacrement, renferme quelque chose de plus, que la simple position du rite extérieur, pour que le ministre agisse vraiment comme ministre du sacrement. La théorie de l’intention dite externe, telle qu’elle a été soutenue plus tard par Drouin, Serry et quelques autres, se trouve-t-elle par le fait même atteinte ? C’est l’avis du plus grand nombre. Voir, dans le traité De sacramentis in génère, de Lugo, disp. VII, sect. n, m ; S. Alphonse, n. 20-23 ; Franzelin, th. xvi, xvii.

29. Futilis et toties convulsa C’est une proposition frivole

est assertio de pontificis Ro— et cent fois détruite, que celle

mani supra concilium œcume— de l’autorité du pape au-dessus

nicum auctoritate atque in fidei du concile œcuménique, et de

qusestionibus decernendis in— son infaillibilité dans la décision

fallibilitate. des questions de foi.

Steyaert ne nomme pas l’auteur de cette proposition, condamnable à cette époque à tout le moins pour ses expressions injurieuses et violentes ; il se contente de cette remarque qui, maintenant surtout que le concile du Vatican a tranché la question de l’infaillibilité et affirmé le caractère irréformable de la sentence papale prononcée ex cathedra, reste le meilleur commentaire de la proposition condamnée par Alexandre VIII : « Nous y trouvons, dit Steyaert, un spécimen de l’audace, dont quelques hommes font preuve parmi nous en ce moment à l’égard d’une doctrine qui est celle du monde catholique, si on excepte un certain nombre de gens dans notre Belgique et un plus grand nombre en France. » Parmi ces adversaires de l’infaillibilité ponti ficale, il suffit de nommer celui qui était alors l’oracle des jansénistes à Louvain, Jean Opstraet, dans son ouvrage De locis theologicis.

30. Ubi quis invenerit doctri— Quand on trouve une docnarn in Augustino clare funda— trine clairement établie dans tam, illam absolute potest te— saint Augustin, on peut absolunere et docere, non respiciendo ment la soutenir et l’enseigner, ad ullam pontificis bullam. sans avoir égard à aucune

bulle des papes.

Havermans avait avancé cette proposition à Anvers, le 8 mars 1677, Spécimen doclrinec, p. 111, et Steyaert nous apprend qu’il n’avait pas manqué d’approbateurs parmi ses collègues. Du reste, l’abbé Martin de Barcos, neveu de Saint-Cyran, n’avait guère eu d’autre objet que d’établir la même doctrine, dans son livre anonyme : Quse sit sancti Augustini et doctrinœ ejus auctoritas in Ecclesia, Paris, 1650. Assurément l’autorité de saint Augustin est grande dans la sainte Église, particulièrement en ce qui concerne les matières de la grâce ; malgré tout, l’infaillibilité n’a été promise qu’à l’Eglise universelle et au pontife romain. En cas de conilit réel, ce serait donc l’autorité de saint Augustin qui devrait céder. S. Thomas, Sum. theol., II a II e, q. x, a. 12. Mais, si les baianistes et les jansénistes en appelaient ainsi au grand docteur d’IIippone, c’était pour abriter sous son ombre leurs erreurs, plusieurs fois réprouvées par l’Église. Procédé scandaleux, schismatique et hérétique.

31. Bulla Urbani VIII « In La bulle d’Urbain VIII qui eminenti », est subreptitia. commence par ces mots In

eminenti, est subreptice.

Le Mémoire du P. Duffy donnait celte proposition comme défendue à Louvain, le 19 octobre 1678, mais sans nommer l’auteur. Pareil propos n’était pas rare parmi les baianistes et les jansénistes d’alors ; Sinnich en avait donné l’exemple. Spécimen doctrinœ, p. 86-90. Le but de cette tactique est manifeste. La bulle In eminenti, du 6 mars 1641, est celle qui confirmait les actes pontificaux promulgués contre les propositions de Baius, sous Pie V en 1567, et sous Grégoire XIII en 1579, et qui condamnait le livre de Jansénius comme renouvelant quelques-unes de ces propositions ; il fallait la faire passer pour subreptice, c’est-à-dire extorquée par les jésuites frauduleusement et sur une fausse exposition des faits. Procédé inefficace, remarque Steyaert ; car, les constitutions émises depuis par Innocent X et Alexandre VII, et certainement authentiques, étaient beaucoup plus fortes que la bulle In eminenti. Urbain VIII avait lui-même protesté d’avance contre ces insinuations, en insérant ces mots : ex diligenti et m a titra ejusdem libri cui litulus, Augustinus, lectione. ». Au reste, la bulle d’Alexandre VIII dans la partie qui condamnait les trente et une propositions dont nous nous occupons, eut bientôt le même sort que la bulle In eminenti ; Arnauld la traita de subreptice dans les Difficultés proposées à M. Steyaert, IX e partie, 96 e difficulté. Ce procédé mérite la même appréciation que celui d’Havermans dans la proposition précédente.

Un mot, en terminant ce commentaire, sur l’attitude du parti atteint par la constitution d’Alexandre VIII. Il y eut les jansénistes réfractaires, comme Arnauld et dom Gerberon ; ce parti se prolongea dans Quesnel et le pseudosynode de Pistoie. A Louvain même, un docteur lié avec les jansénistes, qu’on croit être Jean Libert Hennebel, fit paraître un opuscule de 16 pages in-4°, intitulé : Notx brèves ac modestee in propositions xxxi, S. Inquisitionis decreto nnper proscriptas, Cologne (en fait, Louvain), Nicolas Schouten, 1691. Ces Notes enlevaient souvent aux propositions censurées leur vraie signification ; parfois même, sous prétexte de les expliquer, elles éludaient la condamnation. Exemple, la note relative à la 25 e proposition, où on lit cette glose : « Ne